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NDDL : la préfète invite les expulsés à se faire « régulariser »

La préfète des Pays de la Loire a appelé vendredi les occupants de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, y compris les expulsés, à déclarer leurs projets agricoles d’ici au 23 avril pour amorcer un « processus de régularisation » alors qu’une opération de gendarmerie est en cours sur le terrain. « J’ai demandé à la direction départementale des territoires d’élaborer un formulaire simplifié pour permettre à ceux qui le souhaitent de déclarer leurs projets dans les meilleurs délais », a déclaré Nicole Klein lors d’une conférence de presse à Nantes. « Il leur est simplement demandé à ce stade de déclarer leur nom, de déclarer le projet agricole qu’ils souhaitent développer et de préciser les parcelles sur lesquelles ils souhaitent le mettre en œuvre afin que l’État […] puisse instruire ces demandes. »

La déclaration intervient après plusieurs jours d’affrontements sur le terrain et alors que, sur Vice, une avocate de zadistes, Aïnoha Pascual, annonce qu’elle a déposé des référés pour contester les expulsions, « illégales », selon elle : « En France, pour expulser quelqu’un, il faut qu’il y ait eu une décision de justice rendue dans le respect des règles de l’équité et du contradictoire. […] Or, aucun habitant n’a reçu d’ordre d’expulsion en bonne et due forme. L’évacuation de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes est donc, techniquement, hors la loi. […] Beaucoup de gens se sont fait connaître, ont donné leur identité et ainsi que le numéro de parcelle sur lequel ils vivaient, afin de se mettre en conformité avec la loi, précise-t-elle. Ils attendaient un ordre d’expulsion… qui n’était pas arrivé quand les bulldozers ont commencé à raser leurs habitations. »

Mais le tribunal de Nantes a rejeté vendredi la demande d’un autre occupant de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes qui contestait la légalité de son expulsion du lieu-dit « Les 100 noms », a-t-on appris auprès de ses avocats. Cédric Dussart, 28 ans, qui s’occupait du poulailler de la ferme des « 100 noms », avait assigné la préfète de Loire-Atlantique Nicole Klein devant le TGI pour avoir mis à exécution une ordonnance sur requête d’expulsion (sans procédure contradictoire ni publique, NDLR), datée de 2013.

Ses avocats Stéphane Vallée et Pierre Huriet, qui attaquaient la préfecture pour « voie de fait » et « trouble manifestement illicite », l’accusaient d’avoir « gardé secrète » cette ordonnance, les empêchant de lancer un recours pour la contester. Le tribunal « a jugé que les comportements allégués ne relèvent pas de la voie de fait », a indiqué à l’AFP Me Vallée. Les avocats ne savaient pas immédiatement quelles suites donner à la procédure. « La voie de fait était le seul moyen. On va voir avec notre client, mais les voies de recours ne sont pas nombreuses », a précisé Me Huriet.

Plus d’expulsions, mais une opération de police en cours

Malgré l’annonce jeudi par Emmanuel Macron de la fin des expulsions, les opérations policières continuent ce vendredi à Notre-Dame-des-Landes. Une opération coup de poing pour dégager les axes routiers combinée avec une opération de police judiciaire en lien avec les « exactions » des jours précédents a débuté ce vendredi à 6 heures sur la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, a-t-on appris auprès de la gendarmerie.

L’opération se concentre sur la D81, une des deux routes principales traversant la ZAD, où une embuscade a eu lieu jeudi, selon les gendarmes. « Aucune expulsion n’est prévue ce jour », a précisé la gendarmerie, mais « une manœuvre de dégagement des axes sur la zone ainsi qu’une opération de police judiciaire » dans le cadre de « violences commises contre les forces de l’ordre ». Selon une source proche du dossier, jeudi quelque 500 opposants, des zadistes et leurs soutiens venus de France et d’Europe, étaient présents sur la ZAD.

Jeudi vers 13 h 15, des gendarmes, partis pour relever une autre unité, ont été stoppés par une barricade et ont été attaqués par surprise au moment où ils faisaient demi-tour, a expliqué à l’Agence France-Presse la colonelle Karine Lejeune, porte-parole de la gendarmerie nationale. Dix gendarmes ont été blessés, dont cinq brûlés par de l’acide aux jambes, et un blessé par de multiples éclats d’un « engin explosif improvisé ». Les zadistes ont contesté toute « embuscade » dans un communiqué, précisant que, voyant les gendarmes arriver, « des personnes présentes ont apparemment craint une nouvelle attaque sur les lieux environnants », d’où les heurts.

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Les projets agricoles collectifs détruits

Jeudi, lors de son interview au journal de 13 heures, le président de la République avait pourtant déclaré : «  L’opération est arrivée à un point où tout ce qui était évacuable a été évacué. Il y aura maintenant dans les prochains jours un travail sous l’autorité de la préfète qui consiste à permettre aux projets agricoles légaux organisés de se faire. » D’autres heurts ont aussi éclaté jeudi en fin d’après-midi dans le secteur du Lama fâché, au bord de la D281, l’ex-route des Chicanes, a constaté un photographe de l’Agence France-Presse. L’équipe « médic » de la ZAD a fait état jeudi soir de sept blessés dans la journée.

Le 17 janvier, lorsqu’il a mis fin au projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes, le Premier ministre Édouard Philippe s’était engagé à éradiquer cette « zone de non-droit ». Deux mille cinq cents gendarmes sont mobilisés pour cette opération. Les autorités ont recensé 97 « squats » ou « lieux de vie », selon la terminologie des zadistes sur cette vaste zone de 1 650 hectares. L’intervention entamée lundi visait à expulser toute personne n’ayant pas régularisé sa situation en déclarant de nouveaux projets agricoles individuels.

L ‘importance de l’opération menée depuis lundi a amené les opposants à durcir le ton. En rasant les lieux de vie installés autour de la D281, où se cristallisaient les tensions depuis l’abandon du projet d’aéroport, les gendarmes ont détruit au passage des projets agricoles collectifs. Choqués par l’ampleur des destructions occasionnées à leurs installations, les occupants de la ZAD et leurs soutiens organisent la riposte.


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