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Université : la Sorbonne évacuée, Tolbiac fait de la résistance

Sur Twitter, certains s’amusaient de la « reconstitution grandeur nature » de Mai 68 orchestrée ce jeudi 12 avril au soir par les autorités : des CRS à la Sorbonne. Sauf que, cette fois, ce sont les forces de l’ordre qui ont eu gain de cause et sont parvenues à déloger les étudiants qui tentaient d’occuper ce haut lieu de la contestation il y a 50 ans. Selon le cabinet du recteur, les étudiants réunis en assemblée générale avaient voté « l’occupation » du site, dans le cadre de l’opposition à la réforme de l’accès à l’université. « Après trois heures de négociations infructueuses » avec eux, le recteur a requis l’intervention des forces de l’ordre, « avec regret », selon le cabinet du recteur.

« Environ 200 étudiants qui se trouvaient à la Sorbonne depuis le milieu de l’après-midi votaient uneoccupation et refusaient de quitter les lieux », a indiqué la préfecture de police de Paris dans un communiqué. « L’évacuation, qui a concerné 191 personnes, s’est déroulée dans le calme et sans aucun incident », a ajouté la préfecture de police. La Sorbonne a ensuite précisé que, « pour des raisons de sécurité, la Sorbonne sera fermée vendredi et samedi ».

On va rester ici parce qu’on veut que le gouvernement nous entende. Les gens sont en colère, on le voit partout.

La réforme de l’accès à l’université, une « sélection », selon ses détracteurs, puisqu’elle classe les candidatures des bacheliers, perturbe certaines universités depuis des semaines, voire des mois. À Paris-Tolbiac, occupée depuis fin mars, le président de l’université Panthéon-Sorbonne avait demandé mercredi l’intervention de la police, mais la préfecture n’avait pas donné suite à cette demande. Jeudi soir, des forces de l’ordre étaient présentes à l’extérieur de l’université, a constaté un journaliste de l’AFP. Elles ont quitté les lieux vers 23 h 30, sous les huées de quelque 200 personnes.

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Natacha (prénom modifié), installée dans le site de Tolbiac depuis une semaine, a indiqué à l’AFP que, « dans la soirée, les flics sont arrivés et ont encerclé Tolbiac. Ils se sont rapprochés [des grilles] et, au bout d’un moment, sont repartis ». L’étudiante en histoire se dit déterminée : « On va rester ici parce qu’on veut que le gouvernement nous entende. Les gens sont en colère, on le voit partout. »

Une dizaine d’universités sont bloquées par des « agitateurs professionnels », a estimé jeudi Emmanuel Macron en conseillant aux étudiants de plutôt réviser leurs examens, qui, a-t-il prévenu, ne seront pas « en chocolat ». En clair, les étudiants qui espèrent voir valider leurs partiels automatiquement en seront pour leurs frais.

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La fermeté de Macron

Selon le dernier décompte du ministère de l’Enseignement supérieur, quatre universités sont entièrement bloquées ou fermées : Jean-Jaurès (Le Mirail) à Toulouse, Paul-Valéry à Montpellier, Rennes-2 et Paris-8. Onze autres sites sont perturbés ou bloqués. La situation fluctue de jour en jour. « Il y a très peu d’universités qui sont occupées », a déclaré Emmanuel Macron lors de son interview télévisée à TF1. « Qu’il y ait du débat, c’est une très bonne chose », a-t-il estimé. « Je constate quand même que, dans beaucoup d’universités occupées, ce ne sont pas des étudiants, mais des agitateurs professionnels, les professionnels du désordre », qui sont à l’initiative des blocages. Emmanuel Macron avait déjà fustigé mercredi « des mobilisations violentes qui cherchent la convergence des luttes ».

À l’université Paul-Valéry de Montpellier, bloquée depuis la mi-février, personnel et enseignants ont fait face jeudi aux étudiants opposés à la loi Vidal dans une ambiance houleuse. Les examens dématérialisés – via la plateforme numérique Moodle – qui étaient prévus « sont suspendus » après le « sabotage » mercredi de la salle des serveurs, a annoncé le président de l’université. À Marseille, pour la première fois depuis le début du mouvement, la faculté des sciences était totalement bloquée jeudi matin par des étudiants qui empêchaient toute entrée dans l’université. « Les étudiants ont annoncé un blocage pour 24 heures, jusqu’à vendredi matin », a indiqué à l’AFP la doyenne de la faculté Saint-Charles, Laurence Mouret.

À Nanterre, une assemblée générale a voté de nouveau le blocage de la fac jusqu’à mardi prochain. Les déclarations du chef de l’État ne les ont pas empêchés d’appeler à une validation du second trimestre avec une moyenne de 15/20 pour tous. Enfin à Nantes, environ 500 étudiants et lycéens ont manifesté jeudi dans le centre-ville.

Les présidents ont un travail extrêmement difficile à faire.

Sur France Culture, la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, s’est expliquée sur l’irruption des CRS dans les universités : « Ce sont les responsables des lieux d’université qui estiment la dangerosité de ce qui est en train de se dérouler et qui donc normalement doivent exercer le devoir de police, maintenir l’ordre public et lorsqu’ils ne se sentent plus en mesure de le faire, lorsqu’ils estiment qu’il peut y avoir des risques, ils font appel aux forces de l’ordre. Les présidents ont un travail extrêmement difficile à faire, ajouté Frédérique Vidal, et ils sont sous une pression extrême parce que des débats dans les universités, on sait faire, des assemblées générales, on sait faire, par contre, on a rarement vu des étudiants qui veulent bloquer les examens d’autres étudiants », a-t-elle ajouté.


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