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Justice : les principales dispositions d’un gigantesque projet de loi

Le projet de loi présenté par Nicole Belloubet vendredi 20 avril a été élaboré par la chancellerie à l’issue des cinq chantiers de la justice ouverts le 5 octobre. La principale surprise après le passage du texte au Conseil d’Etat est l’abandon du projet de parquet national antiterroriste. Alors que le Conseil d’Etat y a vu un « risque d’isolement des magistrats » doublé d’une « rigidité inutile pour adapter les effectifs » au gré de l’évolution du terrorisme, « une réflexion complémentaire » est nécessaire, dit-on à la chancellerie. En attendant, le procureur de Paris conserve cette compétence nationale. Voici l’essentiel des mesures qui figurent dans ce texte de 57 articles et quelque 80 pages.

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  • Les mesures budgétaires

Le budget de la justice devra croître de 24 % entre 2017 et 2022, à 8,3 milliards d’euros. Les emplois vacants seront comblés, et 6 500 créations nettes de poste sont programmées. 7 000 places de prison seront construites ainsi que 20 centres éducatifs fermés pour les mineurs.

  • La simplification de la procédure civile

Un acte de saisine unique, contre cinq actuellement, est créé. Les modes alternatifs de règlement des différends (conciliation de justice, médiation et procédure participative) sont encouragés au point de devenir un passage obligé avant de pouvoir saisir un juge. Les plates-formes de médiation en ligne sont encouragées et feront l’objet d’une certification. Le recours à un avocat deviendra obligatoire par exemple en matière d’expropriation ou de litiges douaniers.

Pour les divorces contentieux, l’audience préalable de conciliation devant le juge des affaires familiales est supprimée pour raccourcir les délais (vingt-sept mois). Les procédures de contrôle par le juge des tutelles des actes de gestion concernant des majeurs sont allégées. Le consentement à une procréation médicalement assistée avec donneur sera recueilli par le notaire et non par le juge, tout comme le changement de régime matrimonial.

Les procédures d’injonction à payer seront dématérialisées et centralisées auprès d’un seul tribunal. Une procédure sans audience pourra se dérouler avec l’accord des parties devant le tribunal pour les petits litiges. A titre expérimental, la révision des pensions alimentaires pourra être confiée aux directeurs des caisses d’allocation familiales afin d’éviter les mois de délai avec le juge.

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  • La simplification de la procédure pénale

Les victimes pourront porter plainte en ligne. Les officiers de police judiciaire n’auront plus besoin de renouveler leur habilitation en changeant de département. La garde à vue de vingt-quatre heures pourra être renouvelée une fois sans présentation de la personne au procureur. Les techniques spéciales d’enquête, comme la sonorisation et la captation de données informatiques, autorisées en matière de terrorisme et de criminalité organisée, pourront l’être pour tous les crimes. Le procureur pourra demander au juge des libertés et de la détention son accord pour des écoutes téléphoniques pour tous les délits passibles d’une peine de trois ans ou plus. Elles sont aujourd’hui circonscrites à la délinquance organisée. La visioconférence pour une audience de renouvellement de détention provisoire ne pourra plus être refusée par le détenu.

La composition pénale, qui permet au parquet de proposer une sanction en échange de l’extinction des poursuites, pourra être étendue à tous les délits. Une interdiction de séjour dans certains lieux pourra être prononcée pour six mois au plus. Des amendes forfaitaires sont créées pour l’usage de stupéfiant et la vente d’alcool à des mineurs. Un tribunal criminel composé de cinq juges sera expérimenté pour juger à la place de la cour d’assises les crimes punis de quinze ou vingt ans de prison.

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  • L’efficacité et le sens de la peine

Une nouvelle échelle des peines est instaurée de l’amende à la prison en passant par le stage obligatoire, le travail d’intérêt général ou la détention à domicile sous bracelet électronique. Les peines de prison de moins d’un mois sont bannies. De un à six mois, les peines s’effectueront en milieu ouvert ou sous bracelet électronique. De six mois à un an, elles pourront être aménagées par le juge d’application des peines, mais plus au-delà (elles sont aujourd’hui aménageables jusqu’à deux ans).

La contrainte pénale instaurée par Christiane Taubira disparaît, tandis que le sursis avec mise à l’épreuve est renforcé en sursis probatoire avec un suivi socio-éducatif individualisé. La libération sous contrainte deviendra la règle sauf décision contraire du juge, permettant à la personne condamnée de purger le dernier tiers de sa peine en dehors de la prison.

  • L’organisation judiciaire

Les 307 tribunaux d’instance sont fusionnés avec les tribunaux de grande instance (TGI). Mais le contentieux de proximité restera traité dans ces lieux de justice dans les villes sans TGI. Entre les TGI d’un même département, le contentieux pourra être réparti pour faciliter la création de chambres spécialisées. Une expérimentation sera lancée dans deux régions comprenant plusieurs cours d’appel, permettant le regroupement des certains contentieux civils dans une même cour.


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