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Des imams prônent l’union nationale pour vaincre la radicalisation

La virulente tribune dénonçant « un nouvel antisémitisme » et appelant à expurger certains passages du Coran a provoqué de vives réactions de responsables musulmans. Certains, comme le recteur de la Grande Mosquée de Paris, ne décolèrent pas. Dalil Boubakeur a dénoncé, lundi 23 avril, un « procès injuste et délirant d’antisémitisme » qui risque de « dresser les communautés religieuses entre elles ». D’autres jouent l’apaisement et en appellent à l’union nationale pour surmonter une situation « de plus en plus intenable ».

Dans une tribune publiée mardi 24 avril dans Le Monde, une trentaine d’imams et de théologiens expriment d’emblée leur « compassion » aux victimes d’actes terroristes et antisémites qui ont frappé « aveuglément » la France. « Indignés, nous le sommes en tant que Français touchés par ce terrorisme ignoble qui nous menace tous », poursuivent les signataires.

Ils opposent une majorité – « les musulmans paisibles » – à une minorité de « criminels » qui ont confisqué la religion musulmane. À ceux-là, ils rappellent la définition théologique du terme « martyr » : « Celui qui subit injustement ou subitement la mort, et non celui qui la recherche et la provoque. » Une définition qu’ils accompagnent aussitôt d’un exemple. « Le vrai sacrifice est de se donner pour les autres, comme l’a fait notre héros national, le colonel Arnaud Beltrame », écrit le collectif qui comprend les imams de Bordeaux, Nice ou Strasbourg.

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« Situation cancéreuse »

Cette « jeunesse ignorante, perturbée et désœuvrée » n’est cependant pas seule responsable de cette « situation cancéreuse ». Certains imams eux-mêmes les auraient guidés vers cette voie, reconnaît le texte. « Beaucoup d’imams ne réalisent pas encore les dégâts que pourraient provoquer leurs discours à cause d’un déphasage par rapport à notre société et à notre époque, et dont ils n’estiment pas les effets psychologiques nocifs sur des esprits vulnérables », alertent-ils, avant de les appeler à prôner « l’apaisement » et la « sérénité ».

Mais cette introspection ne doit pas être l’apanage de la communauté musulmane, préviennent les signataires de la tribune. Les citoyens, et surtout la classe intellectuelle et politique, doivent savoir faire preuve de discernement. « Ces pratiques criminelles revendiquées au nom de l’islam pourraient justement confirmer des clichés bien gravés dans les esprits », écrivent-ils. Et de s’indigner : « Certains y ont déjà vu une occasion attendue pour incriminer toute une religion. Ils n’hésitent plus à avancer en public et dans les médias que c’est le Coran lui-même qui appelle au meurtre. »

Une tribune d’une « violence inouïe »

Une référence directe à la tribune parue le 21 avril dans Le Parisien dénonçant « un nouvel antisémitisme ». Signée par 300 personnalités – dont Sarkozy, Valls, Wauquiez et Depardieu –, elle cible en premier lieu l’antisémitisme qui sévit dans les quartiers populaires sous l’effet d’un islam identitaire, voire radical. Les signataires demandant « que les versets du Coran appelant au meurtre et au châtiment des juifs, des chrétiens et des incroyants soient frappés de caducité par les autorités théologiques, comme le furent les incohérences de la Bible et l’antisémitisme catholique aboli par [le concile] Vatican II, afin qu’aucun croyant ne puisse s’appuyer sur un texte sacré pour commettre un crime ».

« Cette idée funeste est d’une violence inouïe. Elle laisserait entendre que le musulman ne peut être pacifique que s’il s’éloigne de sa religion : un musulman positif, totalement sécularisé », s’emportent les 30 imams dans Le Monde. Ils y voient le signe d’une « ignorance néfaste ». Car ni leur travail « quotidien » dans leur mosquée, ni une éventuelle refonte du Coran ne suffira mettre à l’abri contre « d’autres crimes au nom de l’islam ».

Selon eux, le phénomène d’attrait vers l’idéologie de l’État islamique est le signe d’un mal bien plus profond. Il a mis en lumière « une délinquance séculière qui passe brutalement à une délinquance religieuse ». « Rien au fond n’a changé dans la vie de cette jeunesse, réfractaire à toute institution, y compris religieuse, parce que perçue à ses yeux comme procédant du système, celui des dominants. ». Selon ce collectif, la « radicalité ou radicalisation doit être combattue intelligemment par tous les concernés, des politiques aux imams en passant par la famille, l’école, le sécuritaire… Que chacun assume sa part de responsabilité », assurent les signataires.


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