Air France : qui osera succéder à Jean-Marc Janaillac ?

Démission vendredi, conseil d’administration samedi, la gouvernance d’Air France-KLM a rapidement réagi après l’annonce par Jean-Marc Janaillac, PDG du groupe, de son départ. Le conseil d’administration, qui compte dix-neuf membres, dont trois représentent l’État français, a pris acte de la démission consécutive au rejet par les salariés d’un accord salarial. L’instance a toutefois demandé à Jean-Marc Janaillac d’assurer l’intérim jusqu’à la prochaine échéance d’Air France-KLM, l’assemblée générale des actionnaires qui aura lieu le 15 mai.
Les membres du conseil d’administration ont « réaffirmé leur soutien entier et total à Jean-Marc Janaillac. Ils déplorent la situation qui conduit au départ d’un président qui a permis au groupe de poursuivre une stratégie de croissance et d’améliorer sa performance financière », est-il indiqué dans un communiqué. En clair, on ne change pas de stratégie dans l’immédiat. Et chaque jour de grève coûte 25 millions d’euros ! Les affaires courantes d’Air France sont gérées par le directeur général Franck Terner. Pieter Elbers dirige KLM, basée à Amsterdam, où les salariés ont fait part de leur mécontentement face aux grèves à répétition de la compagnie sœur et au départ du PDG. Il faut savoir que le conseil d’administration d’Air France-KLM a lieu une fois sur deux aux Pays-Bas.
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Un recrutement complexe
À l’issue de l’AG dirigée par le président sortant, qui se tiendra à la grande arche de la Défense, un conseil d’administration se réunira. Il « annoncera une solution de gouvernance de transition ». Mais deux mois seront-ils suffisants d’ici à la trêve estivale pour recruter en externe un nouveau président ? Les candidats ne se bousculent pas au portillon. D’autant que le futur PDG ne dirigera « pas vraiment » l’entreprise : certaines catégories de personnel, les pilotes en particulier, ont la haute main sur la stratégie industrielle du groupe, que ce soit sur les moyens de production (avions) ou sur la politique commerciale (réseau).
De plus, le processus de recrutement est complexe. Il passe par un comité de nomination et de gouvernance, émanation du conseil d’administration. Il examine les candidatures, peut en solliciter et les propose ensuite au conseil d’administration, qui élit un président, avant que ce choix ne soit ratifié par l’assemblée générale des actionnaires. C’est Anne-Marie Idrac, cooptée en novembre 2017 en qualité de nouvelle administratrice indépendante, qui préside le comité de nomination et de gouvernance. Cette énarque, qui fut ministre sous Juppé et Fillon et a dirigé la RATP, est actuellement au conseil d’administration franco-chinois de l’aéroport de Toulouse.
Les candidats évoqués
Quel est le poids de l’État français dans ce type de nomination ? À ce jour, il ne possède plus que 14,30 % du capital, mais reste le premier actionnaire devant Delta Airlines (8,80 %) et China Eastern Airlines (8,80 %), le flottant représentant près de 64 %. Mais il dispose statutairement d’un double droit de vote au conseil. Si cela ne permet pas de proposer directement une candidature, cela lui permet de s’opposer à l’arrivée d’un prétendant qui n’aurait pas eu l’aval de Matignon.
Des noms commencent à circuler. En interne, les candidatures de Franck Terner, actuel directeur général, ou de Frédéric Gagey, ex-directeur général et aujourd’hui directeur financier, seraient trop marquées par les conflits sociaux récents.
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Aujourd’hui, on évoque le nom de Fabrice Brégier. Il y a trois ans, avant l’arrivée de Jean-Marc Janaillac, l’homme qui dirigeait alors la branche avions civils d’Airbus avait été sollicité. Mais il semble que, face au salaire annuel d’Airbus qui se chiffre en millions, l’offre d’Air France-KLM n’ait pas été à la hauteur. Selon le comité de rémunération d’Air France-KLM, « la rémunération fixe annuelle de M. Jean-Marc Janaillac en sa qualité de président-directeur général est fixée à 600 000 euros (inchangée pour la huitième année consécutive) ». C’est bien en dessous des 4,5 millions annuels perçus en moyenne par les dirigeants des entreprises du CAC 40.
La nomination d’un patron néerlandais paraît exclue. En effet, c’est Air France qui a pris le contrôle de KLM, et non l’inverse, même si la société néerlandaise amène de meilleurs résultats financiers. Un dirigeant étranger serait très mal accueilli par les salariés français.
La piste Lionel Guérin
Si la nomination d’un énarque ou d’un polytechnicien est contournable, le profil de Lionel Guérin, PDG de Hop !, la filiale régionale d’Air France jusqu’à la fin 2016, pourrait convenir à la situation. Dans sa carrière, il a exercé à peu près tous les grands métiers du transport aérien. Ingénieur de maintenance, pilote de ligne à Air France, créateur des compagnies Airlinair puis Transavia, il avait déjà été pressenti lors des nominations d’Alexandre de Juniac et de Jean-Marc Janaillac au poste de PDG.
Son atout maître aujourd’hui reste sa bonne image de marque chez les pilotes qui respectent sa compétence. Récemment, Lionel Guérin tentait de fédérer les « petites » compagnies (Air Caraïbes, Corsair, Aigle Azur, XL Airways, etc.) pour créer un deuxième pôle français.
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