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Harry, de l’ancien rebelle au prince moderne

C’était hier. Le prince Harry était l’enfant terrible de la famille royale britannique. Les gaffes, les erreurs de jugement, les cuites et les escarmouches avec les paparazzis ne cessaient de défrayer la chronique. L’épisode de la publication d’une photographie le montrant en uniforme nazi lors d’une fête costumée, les blagues racistes, la consommation de joints et les accusations de tricherie aux examens avaient fait du deuxième fils du prince Charles et de la princesse Diana la coqueluche des tabloïds, friands de ses frasques.

Aujourd’hui, il ne manque plus à Harry, 33 ans, qu’un vitrail et une auréole. Le mariage, le 19 mai à Windsor, entre le sixième dans la ligne de succession et l’actrice américaine Meghan Markle marque le renouveau d’un prince à la popularité stratosphérique. Le pion central de la machine Windsor répond à la double attente du public : le sens du devoir et le patriotisme d’un côté ; la modernité et l’excentricité de l’autre.

Le roux des Spencer

L’auteur de ces lignes a eu la chance de rencontrer Harry lors des Invictus Games. Nous avions longuement parlé de la grande manifestation sportive internationale dédiée aux militaires handicapés qu’il a créée en 2014. Le costume sportif mais strict, les cheveux courts, le maintien droit, la poignée de main décidée et les jambes raides révèlent l’officier de l’armée en tenue civile. Mais lorsqu’il parle d’une voix étonnamment douce, avec cette diction distinguée, avec parfois ces hésitations de langage très caractéristiques de la gentry britannique, c’est un Windsor pur sucre, parbleu ! Cet extraverti donne toute la mesure de sa personnalité décontractée et surtout de son humour, « cette vertu britannique qui n’est donnée qu’aux classes aisées », comme l’écrivait George Bernard Shaw.

T204 016.jpg © Tim Graham / Tim Graham Photo Library/Getty Images

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La princesse Diana et ses fils William et Harry à Kensingon Palace.

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Quand Henry Charles Albert David voit le jour, le 15 septembre 1984, à l’hôpital londonien de St Mary’s, le couple princier est déjà en crise. « Je ne sais pas comment Charles et moi sommes arrivés à faire Harry, mais nous avons réussi », confie Diana. À l’écouter, quand le prince Charles rend visite au nouveau-né, il ne cache pas sa déception : « Mon Dieu, c’est un garçon, et il est rouquin par-dessus le marché. » L’héritier au trône souhaitait une fille. Son épouse ne lui pardonnera jamais cette remarque désobligeante. C’est le roux des Spencer, la famille de la princesse. Contrairement à ce qu’affirment les mauvaises langues, Harry est bel et bien le fils de Charles, et non pas de James Hewitt, l’amant de sa mère qui a rencontré la princesse de Galles en mai 1986, soit vingt mois après la naissance.

Petite terreur

L’univers des deux jeunes princes s’écroule lors de l’annonce de la séparation en 1992. L’effet sur William, le plus âgé, est dramatique. Le gamin heureux et espiègle se transforme en un adolescent introverti, triste, méfiant. Harry, lui, est trop jeune pour saisir ce qui se passe. Les enfants sont écartelés entre les deux parents, en guerre pour leur affection. La mort de leur mère, le 30 août 1997 à Paris, dans un accident de voiture après une course-poursuite avec des paparazzis à moto, bouleverse leur existence. Tandis que William se renferme davantage, Harry, âgé de treize ans, se transforme en petite terreur. Il se soûle et fume des joints.

En septembre 1998, Harry suit les traces de son frère en s’inscrivant à Eton, la crème de la crème des écoles secondaires privées. En 2003, le prince passe l’équivalent anglais du bac, qu’il obtient de justesse.

Depuis la mort de Diana, les deux frères sont plus inséparables que jamais. Pourtant, sur le sujet de l’officialisation de la relation entre Charles et Camilla, le duo a des avis divergents. A priori, l’aîné aurait dû accepter plus facilement la maîtresse de son père que le cadet. Dans la réalité, c’est l’inverse qui s’est produit. Harry a moins de difficultés à tourner la page. Il persuade William d’accepter leur future belle-mère. Le plus jeune se réjouit de voir son père enfin apaisé quand le couple se marie en 2005.

« Cornet Wales »

AUSTRALIA-BRITAIN-ROYALS-HARRY-ARMY © CPL OLIVER CARTER / AUSTRALIAN DEFENCE / AFP

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Le prince Harry, « Cornet Wales » (Capitaine Wales), lors d’un entraînement militaire en Australie. 

© CPL OLIVER CARTER / AUSTRALIAN DEFENCE / AFP

Comment expliquer la réinvention de ce « loser » ? C’est l’armée et sa participation à la guerre en Afghanistan qui l’ont mûri. L’envoi à deux reprises en Afghanistan de « Cornet Wales » (sous-lieutenant Wales), où le prince participe aux combats contre les talibans, l’a indéniablement transformé.

Même s’il a peu de chances de régner, Harry fait aujourd’hui partie du premier cercle royal aux côtés d’Elizabeth II, du duc d’Édimbourg, du prince Charles et du prince William. Parallèlement à ses devoirs de représentation du souverain, Harry poursuit l’action humanitaire de sa mère. L’intéressé a the right touch, alliant commisération et respect. Son charisme fait des miracles quand il s’agit de lever des fonds lors des galas payants en l’honneur de la lutte contre les mines antipersonnel, l’aide aux enfants atteints du sida en Afrique ou la reconversion des soldats blessés dans la vie civile.

SIPAUSA31434965_000001 © WP#ECAF/WENN.COM/SIPA

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Le prince Harry et Meghan Markle lors des Invictus Games à Toronto en septembre 2017.  

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La renaissance de Harry s’explique aussi par sa popularité auprès de la gent féminine. Et Meghan Markle, sa fiancée et future épouse, est américaine, divorcée et métisse. Le nouveau membre du clan Windsor a un teint délicat qui lui permettra de porter des couleurs affirmées et tranchantes. Celles de l’Union Jack par exemple.


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