Côte d’Ivoire: au Discop, les séries francophones ont la cote
Le Discop, le marché africain de l’audiovisuel, ouvrait ses portes ce lundi 28 mai à Abidjan. Lors de ce grand rendez-vous des professionnels du petit écran, l’objectif est de mettre en contact des acheteurs et des producteurs de contenu. Sur le continent, le potentiel est immense. Finie la domination des telenovelas d’Amérique du Sud ; ces dix dernières années, les pays francophones se sont mis à produire leur propre contenu télévisé.
Taxi tigui, Ma famille, Les bobodioufs, ces dernières années la liste des séries made in Afrique francophone n’a cessé de s’allonger. Avec plus de 2 200 chaînes de télévision qui diffusent par satellite sur le continent, l’appétit pour l’Afrique grandit. Pas étonnant quand on sait que 150 millions de personnes sur le continent parlent français et sont en attente de contenus qui leur ressemblent.
Petit à petit, le marché se structure. Le Discop en est la preuve : ce quatrième rendez-vous depuis 2015 réunit plus de 700 participants de 70 pays. Alexandre Rideau, à la tête de Keewu production depuis 2012 au Sénégal, parle de boom du secteur. « Il y a beaucoup de gens qui s’y mettent et de très bons projets qui se montent à Abidjan, Bamako et Dakar », explique celui qui a déjà produit six séries. « Cette nouvelle génération de séries qui sont en train d’arriver sur les écrans devrait encourager les diffuseurs et les annonceurs à investir plus et amorcer une pompe qui permette d’avoir plus d’argent dans le secteur », avance-t-il.
Le financement, un enjeu majeur
Car la difficulté de trouver des solutions pour financer une production de qualité en Afrique francophone reste un enjeu majeur. « Une chaîne africaine pré-achètera une série de 20 mn à 1 000 euros, estime Alexandre Rideau. Une télévision panafricaine basée à l’étranger 3 000 euros. Des tarifs inenvisageables en Europe. Dans ce contexte financier difficile, les producteurs sont des héros au quotidien ».
Résultat, sans procédures simplifiées et avec des Etats africains dont les budgets sont souvent trop restreints pour investir dans des émissions de qualités, les sources de financement se trouvent encore trop souvent à l’étranger. TV5 Monde, par exemple, investit 1 million d’euros par an dans la production de séries africaines.
Pour le réalisateur et producteur malien Toumani Sangaré, cette dépendance de la production africaine aux financements étrangers est compliquée à gérer. « Il y a la distance, mais aussi souvent une coproduction Nord-Sud qui s’installe et donc un déséquilibre, une dépendance financière des productions africaines qui est compliquée à gérer », indique-t-il. Toumani Sangaré est parvenu à sortir de cette dépendance en finançant sa série Taxi tigui exclusivement avec des entreprises privées maliennes via la publicité ou du référencement de produit.
Le tremplin Internet
Pour contourner ce problème d’argent, de plus en plus de réalisateurs se servent d’Internet comme un tremplin pour être repérés. C’est le cas de la Marocaine Sonia Terrab, réalisatrice d’une web-série destinée à libérer la parole des femmes. « Avec Internet, le buzz a été énorme, explique-t-elle. On a parlé de nous un peu partout dans le monde. Ça donne des arguments et des outils pour aller chercher des coproducteurs à l’étranger pour financer le film et une saison 2 ». La jeune Marocaine prévoit donc de tourner un documentaire sur cette question de parole des femmes. Le Discop à Abidjan est un outil supplémentaire pour aider les réalisateurs à trouver des financements.
Reste une autre limite de ce jeune secteur économique : la difficulté de trouver les compétences sur le continent africain. « Dès qu’on commence à multiplier les tournages, on s’aperçoit qu’il y a un manque de compétences en termes de techniciens, d’auteurs, de réalisateurs, de chefs costumiers, de machinistes, toutes les compétences manquent !, analyse le producteur Alexandre Rideau. Il y a un énorme besoin de formation et ça, c’est central pour que cette industrie se mette en place. »
Ces dix dernières années, des écoles de cinéma se sont créées à Marrakech, Dakar, mais aussi Abidjan. De quatre, elles sont passées à une dizaine en Afrique. De quoi à terme créer une véritable industrie, espèrent les producteurs africains .
Continuer à lire sur le site France Info