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Qu’est-ce que le « dividende salarié » défendu par le gouvernement ?

Pour contrer les effets de l’inflation, le gouvernement fait le pari du « dividende salarié ». « Quand il y a une augmentation du dividende chez les actionnaires, il doit y avoir la même chose pour les salariés », a résumé le président de la République, fin octobre, lors de sa participation à l’émission « L’Evènement » sur France 2. Lors de la campagne électorale, en 2020, Emmanuel Macron préconisait déjà (PDF) un dispositif obligatoire « de partage des profits dans les entreprises qui versent des dividendes ». Sans réussir, jusqu’ici, à susciter l’enthousiasme des partenaires sociaux.

Le gouvernement tente, depuis, de relancer l’idée. « Le meilleur partage de la valeur doit être le grand chantier de la majorité », a plaidé le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, dans un entretien au Parisien, samedi 5 novembre. « Le dividende salarié, c’est le profit pour tous. » Le locataire de Bercy entend ainsi organiser une convention sur cette question, début 2023, en présence « d’économistes, de chefs d’entreprise, de salariés » et « de groupes d’opposition ».

Le ministre du Travail, Olivier Dussopt, avait déjà expliqué sur franceinfo que le gouvernement prendrait « ses responsabilités », si aucun accord n’était trouvé après « trois ou quatre mois ». Ce qui ouvre la voie à un éventuel projet de loi. Reste à savoir sur quelles bases. Dans son programme électoral, le président-candidat mentionnait trois options : la participation, l’intéressement et la prime Macron.

La participation, mécanisme de redistribution des bénéfices, est déjà obligatoire pour les entreprises de plus de 50 salariés. Elle accorde des primes dont le montant est fixé par un accord et ne peut dépasser 30 852 euros. L’intéressement, quant à lui, est un plan d’épargne salariale, qui dépend des résultats de l’entreprise et n’est pas obligatoire. Enfin, la prime de partage de la valeur (communément appelée « prime Macron ») permet à l’employeur de verser une prime défiscalisée à ses salariés.

Dans Le Parisien, Bruno Le Maire n’a pas précisé les contours de ce « dividende salarié », qui devront être définis l’an prochain. En revanche, ce mécanisme contraignant, appliqué à l’ensemble des PME, imposerait aux entreprises de reverser une part de leur résultat net aux salariés, si elles comptent verser des dividendes aux actionnaires. La proposition est notamment portée par Thibault Lanxade, ancien vice-président du Medef et auteur d’un rapport, en 2019, sur le partage de la valeur entre l’entreprise et les salariés. « Sur la forme, le dividende salarié me paraît essentiel », a réagi Audrey Louail, présidente de CroissancePlus, un réseau qui regroupe plus de 500 entrepreneurs, sur franceinfo.

Mais le patronat voit aujourd’hui d’un mauvais œil cette proposition, dénonçant un mélange des genres. « C’est une très mauvaise expression qui entretient la confusion entre capital et travail », s’oppose Eric Chevée, vice-président à la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), dans les colonnes du Parisien. « Les dividendes viennent rémunérer une prise de risque. Et le concept fait fi de la réalité d’une PME. » Toujours dans le quotidien francilien, le Medef dénonce « une confusion sur la nature de la contribution et de la prise de risque des salariés et des actionnaires dans la création de valeur par l’entreprise ».

La proposition ne séduit pas davantage les syndicats, qui souhaitent avant tout une revalorisation des salaires. Le leader de la CGT, Philippe Martinez, notamment, réclame plutôt une hausse du smic et une indexation des salaires sur l’inflation. Et plusieurs syndicats de la fonction publique ont également demandé une revalorisation du point d’indice. « Notre option n’est pas de remplacer les salaires par des primes », a commenté pour sa part Luc Mathieu, secrétaire national de la CFDT, dans Le Parisien.

>> Quatre questions sur l’indexation des salaires sur l’inflation

L’option d’une indexation des salaires, toutefois, a été exclue par l’Elysée. Lors de son passage sur France 2, Emmanuel Macron a catégoriquement rejeté cette éventualité, car il estime qu’une telle mesure détruirait « des centaines de milliers d’emploi ». « Augmenter automatiquement tous les salaires sur l’inflation, c’est augmenter d’autant tous les prix, sans fin », a commenté pour sa part Bruno Le Maire, estimant qu’il n’y aurait que « des perdants » dans cette logique inflationniste.


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