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Coupe du monde 2022 : troisième Coupe du monde ratée de suite pour l’Espagne, victime de son propre plan de jeu

Impressionnante lors du match d’ouverture contre le Costa Rica, l’Espagne a été éliminée par le Maroc en huitièmes de finale (0-0, 0-3 t.a.b.) au terme d’un match où elle a multiplié les passes sans être dangereuse.

À Doha, le tiki-taka est une boîte de nuit plutôt branchée proche du stade 974 et le restera. L’Espagne, longtemps adepte de ce style de jeu qui lui a permis de remporter deux Euros et une Coupe du monde au tournant des années 2010, en a perdu les clés. Pour la troisième fois consécutive, la Roja vient de rater une Coupe du monde : après une élimination en phase de groupes en 2014 et une contre la Russie aux tirs au but en huitièmes de finale de l’édition 2018, elle s’est inclinée de la même manière face au Maroc, mardi 6 décembre à Doha (0-0, 0-3 t.a.b.).

Contre le Maroc comme lors des deux derniers matchs, l’Espagne a fait face à ses propres limites. La mise en bouche contre le Costa Rica (7-0), aussi savoureuse qu’éphémère, n’a été que l’arbre qui cache la forêt. Comme la victoire contre la Slovaquie à l’Euro 2021 lors de la phase de groupes (5-0), qui avait relancé l’intérêt pour la sélection espagnole. Depuis plusieurs années, le plan de jeu est le même : conserver le ballon jusqu’à l’indigestion et mettre du mouvement pour tenter de trouver la faille dans la défense adverse.

Contre le Maroc, les Espagnols ont terminé avec près de 77% de possession et un total impressionnant de plus de 1 000 passes tentées. Le résultat ? Aucun but et un seul tir cadré. « On s’est sentis supérieurs« , a eu beau expliquer Ferran Torres en zone mixte après le match, l’impression globale est que la Roja aurait pu jouer mardi contre les Marocains pendant des heures sur la pelouse du stade de la Cité de l’éducation, sans jamais réussir à marquer. Contre l’Allemagne (1-1) et le Japon (1-2), les Espagnols ont senti la même impuissance.

Pas mauvais perdant et après avoir souhaité « bonne chance pour la suite » au Maroc, Luis Enrique s’est félicité de la performance de ses joueurs après l’élimination : « Je sais comment le football fonctionne et nous n’avions pas assez d’espace dans les intervalles. Je suis satisfait de mon équipe qui a représenté mon plan de jeu. » Pourtant, malgré un schéma bien rôdé et les propos du sélectionneur espagnol, la prestation de la Roja n’a enthousiasmé personne.

Il manque à cette équipe un attaquant capable de faire des différences dans les trente derniers mètres adverses. Dani Olmo a su le faire par moments pendant ce Mondial et Nico Williams, auteur d’une entrée intéressante face au Maroc, a peut-être ce profil. Mais l’Espagne ne peut pas compter sur un profil comme celui de Kylian Mbappé, celui d’un détonateur capable de réveiller une équipe offensive qui manque parfois cruellement de mouvement et multiplie les passes sans intention.

Quand l’adversaire s’appelle le Maroc et qu’il possède une défense aussi solide, la marche devient trop haute pour la Roja. Ce qui est également flagrant avec cette équipe espagnole, c’est qu’elle n’a pas de plan B. « On joue toujours de la même manière, du début à la fin mais parfois on n’arrive pas à marquer de but« , assurait Marcos Llorente en zone mixte, sans voir le problème. Quand elle ne parvient pas à trouver l’ouverture, l’attaque espagnole continue de se casser les dents pendant plus de 120 minutes sur la défense adverse.

Depuis le début du Mondial, les équipes les plus impressionnantes sont celles qui sont capables d’alterner entre phases de possession, attaques placées et transitions rapides vers l’avant. L’équipe de France ou le Brésil en sont capables, mais pas l’Espagne. Et comme la plupart des équipes sont désormais capables de tenir physiquement sans avoir le ballon, le plan de jeu de la Roja semble tout simplement daté.

De sorte que l’Espagne se trouve face à un mur : elle n’a plus gagné le moindre match à élimination directe à l’Euro ou en Coupe du monde, sans passer par les prolongations, depuis l’Euro 2012 qu’elle avait gagné. Sur ses 14 derniers matchs dans une grande compétition internationale, elle n’en a remporté que trois à l’issue des 90 minutes réglementaires. Insuffisant pour une sélection qui vise bien mieux que cela.

C’est ce que constate ce journaliste espagnol, qui frappe de colère son ordinateur en tribunes de presse, à l’issue de la rencontre. Ce que réalise également Aymeric Laporte, le défenseur français naturalisé espagnol, en larmes et inconsolable au milieu de la pelouse de la Cité de l’éducation après l’élimination, lui qui affirmait pourtant à L’Equipe la semaine dernière : « Notre jeu est un exemple, nous jouons très bien au football » [article payant]. « Tristes et évidemment déçus« , selon Luis Enrique, les Espagnols vont prendre leur avion du retour dès demain matin. Pour régner à nouveau sur le football mondial, ils vont devoir patienter. Et surtout se réinventer.


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