Santé : les opticiens vont payer l’addition du reste à charge zéro
Mardi, les trois syndicats d’opticiens ont claqué la porte du ministère de la Santé. La énième réunion de travail organisée par la direction de la Sécurité sociale pour mettre en place le reste à charge zéro sur les lunettes a tourné au vinaigre. « On nous a parlé de montures plafonnées à 25 euros, c’est-à-dire encore moins que le tarif actuel de 30 euros pour les bénéficiaires de la couverture maladie universelle ! », dénonce Véronique Bazillaud, du syndicat des centres d’optique mutualistes, le Synom.
« Cette réforme n’est pas financée »
« Pour financer la promesse présidentielle d’un reste à charge zéro pour les prothèses dentaires, auditives et les lunettes, on cherche à faire des économies sur l’optique, sans prendre en compte nos propositions, alors que nous étions disposés à mettre en avant nos petits prix », regrette Véronique Bazillaud. « On va transférer de l’ordre de 1 milliard d’euros de remboursements à la charge exclusive de notre profession, parce que cette réforme n’est pas financée », proteste Alain Gerbel, de la Fédération nationale des opticiens de France.
« Ils vont perdre et nous allons gagner, confie un assureur complémentaire compatissant. Sauf à fermer la moitié des magasins d’optique, il faudrait réfléchir à un accompagnement de la filière, ou bien à des délégations de tâches. »
A l’inverse, Marc Simoncini, le fondateur de la start-up Sensee, qui vend des lunettes via Internet, applaudit des deux mains. Un plafonnement des prix à 70 euros pour les lunettes à verres unifocaux, 140 euros en multifocal et 170 euros pour les verres progressifs a été évoqué mardi. « Ca va dans le bon sens, notre offre tient dans ce panier. Il faut garder l’argent des mutuelles pour de vrais soins, comme l’ont fait la plupart des pays européens », affirme-t-il.
Labellisation des opticiens
La concertation a commencé il y a quatre mois et doit durer jusqu’en mai, avec une nomenclature rénovée des équipements, de nouveaux plafonds pour les prix et les remboursements, et une révision des obligations réglementaires des contrats « responsables » d’assurance complémentaire. Emmanuel Macron va probablement présenter le résultat de ces travaux devant le congrès de la Mutualité française, du 13 au 15 juin.
En l’état actuel des discussions, le panier de soins à reste à charge zéro représenterait autour de 20 % des achats de lunettes en volume, à demande inchangée. C’est peu par rapport au poids que pèserait le « panier zéro » pour les audioprothèses (65 % des volumes) et pour les soins dentaires (46 %). Il n’y aurait pas de catégorie « reste à charge modéré », contrairement à ce qui se prépare pour le dentaire et l’audioprothèse : le reste du marché, 80 % des ventes de lunettes, serait donc à tarifs libres.
Mais plus l’offre zéro sera alléchante et l’offre libre mal remboursée, plus les clients se dirigeront vers le panier gratuit. D’un côté, l’Assurance-maladie pourrait passer d’un taux de prise en charge de 4 % du prix des lunettes à 10 %-15 % dans le cadre du reste à charge zéro. De l’autre côté, elle ne rembourserait plus que quelques centimes sur les lunettes à tarifs libres. Quant aux complémentaires, leurs plafonds de remboursement chuteraient de 30 % sur cette classe de produits. Enfin, une labellisation des opticiens serait mise en place, avec pour critère un pourcentage d’un quart des ventes en reste à charge zéro.
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