Amoeba envisage de quitter la France pour sauver son biocide

Le coup est très dur pour Amoeba : le comité européen des produits biocides a émis, le 26 avril, un avis négatif sur l’homologation de Willaertia magna C2c Maky, l’amibe tueuse de bactéries développée par la société depuis 2010. Sanction immédiate de la Bourse : le titre de la société de biotechnologies lyonnaise a fait un plongeon de 77 %, à une valorisation de 33 millions d’euros, mercredi. Comment l’entreprise peut-elle rebondir ? Avec sa solution, baptisée « Biomeba », qui est une alternative biologique aux traitements chimiques pour éliminer les risques de contamination bactérienne dans l’eau, elle visait le marché des tours de refroidissement, où prolifèrent notamment les souches de légionelles.
Si la Commission européenne, qui doit statuer en octobre, suivait l’avis du comité qu’elle n’a pas contredit jusque-là, la société déposerait « une demande d’annulation ». Mais son PDG, Fabrice Plasson, annonce d’ores et déjà « soumettre une nouvelle demande d’homologation auprès d’un autre Etat membre », repartant ainsi pour un processus réglementaire de trois ans. La Belgique, la Suède, les Pays-Bas et l’Allemagne se seraient montrés plus favorables que la France, rapporteure du dossier, qui a relayé des réticences formulées par l’Anses en mars 2017.
« Mais c’est une stratégie de long terme, car c’est presque un retour à zéro », estime Pierre Antoine Chazal, analyste chez Bryan, Garnier & Co. En revanche, la demande d’homologation déposée par la société aux Etats-Unis lui paraît une piste « plus crédible dans l’immédiat ». La décision finale de l’Environmental Protection Agency (EPA) est attendue à partir d’octobre, laissant espérer un début de commercialisation en 2019. Fabrice Plasson estime cette marche « plus facile » à franchir du fait d’une requête formulée différemment, « pour un spectre plus large ».
Contradiction avec les propos de Nicolas Hulot
Autre levier pour surmonter la crise : Amoeba va accélérer le développement des applications agricoles, destinant sa solution à la viticulture pour la lutte contre le mildiou. Mais la société ira faire valider le procédé dans un autre pays européen que la France, dont Fabrice Plasson dénonce « un incompréhensible manque de soutien. C’est en contradiction totale avec les propos du ministre Nicolas Hulot sur les innovations biologiques ». Et de rappeler « l’archaïsme du traitement de l’eau : chimique, au chlore, inchangé depuis… 1914 ».
Dans l’immédiat, Amoeba va devoir trouver de l’argent frais pour financer le contentieux qui s’annonce, ainsi que les nouvelles procédures d’homologation. Elle ne peut plus compter pour l’instant sur le prêt de la BEI de 20 millions d’euros, dont elle a reçu une première tranche de 5 millions l’an dernier, la suite du versement étant conditionnée à cet agrément.
Déménagement aux Etats-Unis
L’entreprise, qui emploie quarante salariés près de Lyon et six au Canada, à Montréal, dispose d’une trésorerie – 10 millions d’euros à fin 2017 – « lui garantissant la continuité d’exploitation jusqu’en décembre prochain », affirme son PDG. Mais la restructuration semble inévitable et le dirigeant envisage un déménagement sans retour pour les Etats-Unis : « L’usine de Chassieu ne sert plus à rien. » Rappelons qu’ Amoeba avait investi 8 millions en 2016 dans cet outil industriel, qu’elle s’apprêtait à agrandir . « L’histoire ne s’arrête pas là, estime Pierre Antoine Chazal. Nouveaux territoires, nouveaux produits, il y a encore des catalyseurs à déclencher. Le signal américain sera déterminant. »
Date de création : 2010
Président : Fabrice Plasson
Effectif : 46 personnes
Secteur : biotechnologies
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