Olivier Dussopt : « La suppression complète de la taxe d’habitation sera surtout financée par des économies »

Olivier Dussopt, ancien député PS d’Ardèche et maire d’Annonay entre 2008 et 2017, a rejoint Bercy en novembre sous la férule de Gérard Darmanin. Il suit en particulier la réforme de la fonction publique, celle de la fiscalité locale et gère également la contractualisation financière avec les collectivités locales.
L’année 2017 a été une année plutôt positive. D’après les dernières remontées comptables, les dépenses de fonctionnement ont augmenté de 1 % par rapport à 2016 et les recettes réelles de 1,4 %, donc il n’y a plus l’effet de ciseaux, alors même que les dotations de l’Etat ont baissé l’an dernier de 2,7 milliards d’euros. Les dépenses d’équipement ont augmenté, elles, de 7 %, à l’exception de celles des départements qui reculent de 1,5 %. Enfin, le solde des collectivités auprès du Trésor public s’établit à 41,5 milliards d’euros, contre 37,9 milliards en 2016 : l’excédent de financement s’améliore. Les efforts de gestion des élus locaux ont payé et doivent être reconnus. C’est encourageant pour l’objectif de maîtrise à 1,2 % de la progression des dépenses de fonctionnement.
Je suis moi-même un élu local et j’ai eu à connaître (notamment dans mes fonctions de maire de 2008 à 2017) le gel, puis la baisse des dotations depuis des années et il y avait déjà les pressions que vous évoquez. Mais croyez-moi, c’est plus simple de les affronter avec une stabilité des dotations. Je tiens aussi à rappeler que nous avons choisi ce chiffre au regard de l’évolution moyenne des dépenses des dernières années.
Les concours de l’Etat sont passés de 47,8 à 48,1 milliards d’euros en loi de finances pour 2018, soit 300 millions d’euros d’augmentation, auxquels il faut rajouter une centaine de millions d’euros suite à notre récente décision de non-minoration de la DCRTP des intercommunalités. Des communes voient néanmoins leurs dotations 2018 baisser comme cela s’est toujours vu, sous l’effet de la baisse de leur population ou de la hausse des mécanismes de péréquation ainsi que de leur éligibilité ou non à ceux-ci. Mais au final, 53 % des communes constatent une hausse de leurs dotations et 2 à 3 % une stabilité. Dans 86 départements enfin, le solde versé est positif.
Grâce à l’amélioration de leur résultat en section de fonctionnement, les élus locaux auront trois choix dans les années à venir : baisser la pression fiscale ; diminuer l’endettement de leur collectivité ou financer leurs investissements. L’élu local que je suis est très respectueux du principe de libre administration des collectivités et de leur autonomie de décision.
Cet engagement du président de la République est mis en oeuvre sur trois ans, à compter de cette année, pour 80 % des Français. Pour les 20 % restant, la suppression est aussi actée, car cela n’aurait pas de sens de maintenir cet impôt. Il reste à fixer le calendrier.
Le calendrier de la réforme reste à préciser.
D’ici à 2020, elles sont parfaitement compensées par le système des dégrèvements, le plus protecteur qui soit. Il s’agit de définir des ressources justes et pérennes pour la suite, et nous nous donnons jusqu’à la fin de l’année, voire jusqu’au début de l’année prochaine, pour aboutir. J’attends le rapport de la mission Richard-Bur pour la mi-mai, qui sera suivi d’une concertation avec les associations d’élus dans le cadre de la Conférence nationale des territoires.
Trois pistes sont le plus souvent évoquées. D’abord la réaffectation d’impôts locaux, comme la taxe sur le foncier bâti qui serait entièrement dévolue au bloc local, avec la nécessité de le compenser pour les départements, via la CSG ou la TVA par exemple.
Deuxième piste, l’affectation au bloc local d’une fraction d’un impôt national, comme la TVA ou l’impôt sur le revenu.
Enfin, certains préconisent une contribution résidentielle locale au titre des services publics, afin de garder un lien direct avec les administrés. Cette option est clairement écartée puisque le gouvernement a fixé une ligne rouge : il n’y aura pas de création d’un nouvel impôt ou d’un nouveau prélèvement, ni d’accentuation de la pression fiscale.
L’engagement de suppression ne porte que sur la résidence principale. Pour les résidences secondaires, nous pouvons soit maintenir la taxe d’habitation, soit la transformer en surtaxe foncière. Les deux options sont sur la table. Nous devons aussi trouver des solutions pour que les dispositifs arrimés aujourd’hui à la taxe d’habitation, comme la redevance audiovisuelle ou la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, puissent continuer d’être prélevées.
Je le répète : il n’y aura pas de nouvel impôt, ni de hausse de la fiscalité, au contraire. Cet effort sera surtout financé par des économies.
Il ne faut pas se précipiter. Commençons par achever cette refonte de la fiscalité locale. Le principe de la révision des valeurs est une demande forte des élus locaux qui peut avoir du sens, mais nous avons pu mesurer la complexité du dossier avec sa mise en oeuvre pour les locaux professionnels, étalée sur dix ans. Pour les locaux d’habitation, l’expérimentation menée dans cinq départements souligne une complexité encore plus grande. La réforme devra donc en tout état de cause être étalée sur une très longue période.
Nous sommes déjà parvenus à un accord sur le montant minimal annuel du reste à charge des allocations individuelles de solidarité (RSA, etc.) qu’il faut financer, autour de 600 millions d’euros. Le gouvernement a proposé de créer une nouvelle contribution de l’Etat pendant trois ans à hauteur de 200 millions d’euros au moins. Elle offrirait plus de pérennité que le fonds d’urgence voté chaque année depuis 9 ans pour un montant moyen de 140 millions d’euros.
Nous proposons aussi d’augmenter le fonds de péréquation entre les départements qui perçoivent beaucoup de DMTO et ceux qui en ont peu. Pour rappel, les DMTO ont augmenté de plus de 16 % en 2017, mais leur répartition est très inégale. Reste à déterminer la nouvelle clé de répartition de ce fonds.
Les départements ont salué l’engagement du président de la République à reprendre la responsabilité de la période entre le moment où le jeune se présente au département et celui de son identification comme mineur ou majeur. Nous partageons aussi la volonté d’harmoniser les méthodes d’identification des mineurs entre départements. Il subsiste des discussions sur l’impact de l’augmentation de l’arrivée de ces mineurs sur les aides sociales à l’enfance.
Concernant les AIS et les mineurs étrangers isolés, le Premier ministre est personnellement très engagé pour sortir les départements des aides d’urgence. Et j’ai bon espoir que l’on trouve un accord avant l’été avec les départements.
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