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Prélèvement à la source : ce qui va vraiment changer pour la trésorerie des ménages

A quatre mois de la transition vers l’impôt à la source,  les doutes de l’exécutif sur cette réforme engagée depuis trois ans se confirment. En déplacement à Helsinki, le président de la République a déclaré qu’il  attendait des « réponses précises » avant de décider si le prélèvement à la source de l’impôt entrerait en vigueur au 1er janvier 2019 comme prévu. « J’ai plutôt l’intention de conduire cette réforme à son terme, mais j’ai demandé aux ministres compétents de répondre à toutes les questions qui se posent encore, avant de donner une directive finale », a dit Emmanuel Macron, lors d’une conférence de presse.

Ce flottement a ouvert une nouvelle brèche dans laquelle l’opposition s’est empressée de s’engouffrer. Le président des Républicains (LR), Laurent Wauquiez, a demandé à l’exécutif de renoncer au prélèvement à la source. Outre la complexité pour les entreprises, le leader de l’opposition a critiqué l’impact négatif sur la trésorerie des Français. « Le prélèvement à la source ne sera pas bon pour les ménages, parce que ça veut dire que ce sont les Français qui vont faire l’avance de trésorerie pour l’Etat, ce qui est quand même un comble », a-t-il déclaré.

Qu’en est-il exactement ? Pour comprendre l’impact de cette mesure sur la trésorerie des ménages, il faut se pencher sur l’étude d’impact publiée lors du vote sur le projet de loi à l’automne 2016. Ce document explique que la réforme « affectera le profil de trésorerie de l’Etat », et donc celui des contribuables, mais identifie des effets positifs et négatifs. En clair, la réponse varie en fonction de la période de l’année et de la situation des contribuables.

Les ménages à revenus stables sans crédit d’impôt

Dans le cas le plus simple, et relativement théorique, où les revenus du ménage sont stables et qu’il ne perçoit pas de crédit d’impôt, les contribuables seront gagnants en termes de trésorerie. Actuellement, les ménages au tiers provisionnel paient la totalité de leur impôt en septembre. Les foyers mensualisés le font en octobre (sauf régularisation de fin d’année). Avec le prélèvement à la source, les contribuables paieront chaque mois un douzième de leur impôt jusqu’en décembre. Ils avanceront donc moins d’argent à l’Etat que dans la situation actuelle. En outre les foyers mensualisés payaient jusque-là au milieu du mois, alors que ce sera désormais le cas en fin de mois, avec la perception du salaire.

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 Différents cas de figure selon la nature du crédit d’impôt

Le raisonnement se complique si l’on prend en compte les crédits d’impôts. Pour des raisons budgétaires,  le taux de prélèvement à la source appliqué au salaire net ne peut pas tenir compte des crédits d’impôts (sans quoi le taux retenu pour janvier 2019 aurait dû retenir les dépenses engagées en 2017 et 2018). L’Etat va donc devoir verser aux contribuables en 2019 le crédit d’impôt correspondant aux dépenses engagées en 2017 et déclarées au printemps 2018. Lors du vote du projet de loi, une distinction a été faite entre les crédits d’impôts récurrents (emploi à domicile, garde d’enfants) et non récurrents (investissement locatif, transition énergétique).

Pour les premiers, un acompte de 30 % sera versé en janvier. Pour les seconds, la totalité sera restituée en septembre.  L’audit de l’Inspection générale des finances, réalisé il y a un an , montre que même en l’absence d’acompte, la moitié des foyers percevant un crédit d’impôt emploi à domicile ou garde d’enfants sont gagnants en trésorerie, car l’étalement du paiement de l’impôt sur douze mois compense l’effet défavorable lié au fait que le crédit d’impôt n’est pas intégré dans le taux de prélèvement.

En fait, tout dépend si le montant du crédit d’impôt est élevé ou non par rapport à l’impôt payé. S’il est supérieur à 70 % de l’impôt payé, le ménage sera perdant en trésorerie, même avec l’acompte. Pour les crédits d’impôts ponctuels, les effets seront négatifs dès que le crédit d’impôt sera supérieur à 17 % de l’impôt dû.

 Effets variables selon l’évolution des revenus

Le prélèvement à la source aura également des répercussions sur la trésorerie des ménages d’une année sur l’autre. Les effets dépendront de l’évolution des revenus ou de la situation familiale du foyer. En cas d’augmentation de salaire, le ménage paiera plus d’impôts en début d’année, mais la régularisation sera moins importante en septembre. En cas de forte baisse de revenus, cela évitera au contraire au contribuable d’avancer de l’argent à l’Etat, avant d’obtenir une restitution.

En toute logique, le prélèvement à la source devrait réduire les régularisations de fin d’année, même si elles existeront encore. Certains contribuables avanceront moins d’argent à l’Etat, mais l’inverse est vrai : l’Etat avancera moins d’argent à d’autres contribuables.


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