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La Cour des comptes tire les leçons des privatisations des aéroports de Toulouse, Nice et Lyon

Privatisation d’un aéroport, mode d’emploi : tel pourrait être le sous-titre du rapport de la Cour des comptes relatif au « processus de privatisation des aéroports de Toulouse, Lyon et Nice », rendu public mardi. Trois ans après la cession de 49,9 % du capital de Toulouse-Blagnac au  consortium chinois Symbiose  et deux ans après  la cession de 60 % des parts de Aéroports de Lyon et Aéroports de Nice-Côte d’Azur à des consortiums menés respectivement par Vinci et le groupe italien Atlantia, les magistrats de la rue Cambon dressent un premier bilan contrasté de ces trois opérations. Un rapport qui tombe à pic, alors que le Parlement vient de voter la loi autorisant le gouvernement à engager  la privatisation d’Aéroports de Paris  en 2019.

Un bilan globalement positif

Même si les rapporteurs se gardent de prendre position sur le principe, ce premier constat paraît plutôt encourageant pour les partisans de la privatisation des aéroports. Les ventes des parts de l’Etat à Toulouse, Lyon et Nice, ont rapporté plus que prévu (2,06 milliards d’euros au total) et « n’ont pas été suivies d’inflexions majeures dans la gestion des sociétés et leurs orientations stratégiques », estiment les auteurs du rapport.

Contrairement aux craintes des compagnies aériennes, ces privatisations « ne se sont pas non plus traduites par un renchérissement des coûts ». Au contraire. En 2018, Toulouse-Blagnac a même pu baisser ses redevances de 2,5 %, la hausse du trafic, passé de 7,47 millions de passagers en 2014 à 9,21 millions en 2017, ayant dépassé les prévisions.

VIDEO. Est-ce le grand retour des privatisations en France ?

Des erreurs commises à Toulouse

Cependant, davantage qu’un véritable bilan économique, le rapport de la Cour des comptes a surtout pour vocation de tirer les enseignements des processus de privatisation, afin d’éviter la répétition de certaines erreurs. Pour ses rapporteurs, l’exemple à ne pas reproduire est celui de Toulouse-Blagnac, dont la cession au consortium chinois a suscité une longue controverse.

« Le processus choisi a révélé de graves insuffisances », estiment les rapporteurs, qui pointent du doigt l’absence d’expérience aéroportuaire et le manque de transparence financière du consortium Symbiose constitué par le groupe public chinois Shandong Hi-Speed Group (51 %) et le fonds d’investissement hongkongais Friedmann Pacific.

Un processus inachevé

A l’époque, l’appel d’offres concocté par l’Agence des participations de l’Etat (APE) ne mentionnait même pas, parmi les critères de recevabilité des candidatures, une expérience significative dans la gestion d’un grand aéroport. L’APE craignait qu’un tel critère limite le nombre des candidats et le produit de la vente. Au final, l’Etat a dû se résoudre à conserver 10 % du capital de l’aéroport de Toulouse-Blagnac, qu’il aurait théoriquement dû céder à Symbiose en 2018, afin d’apaiser les craintes des élus locaux.

Droits de trafic pour Emirates

Cette erreur, ainsi que le manque de transparence financière, fut néanmoins corrigée pour les privatisations de Lyon et Nice, auxquelles le rapport de la Cour des comptes accorde un satisfecit. Même si là encore, l’objectif financier de l’Etat l’a emporté sur les autres considérations. Le rapport de la Cour des comptes nous apprend ainsi que le ministère de l’Economie de l’époque a fait pression pour que soient accordés à  Emirates des droits de trafic additionnels sur Lyon et Nice, afin de rendre la mariée plus belle.

Vers la « double caisse » à Lyon et Nice

Et c’est aussi Bercy qui a décidé d’imposer le principe d’une évolution vers le système dit de « double caisse » à Lyon et à Nice, toujours pour la même raison. Contrairement à la « caisse unique », la « double caisse » permet au gestionnaire de l’aéroport de séparer les recettes aéronautiques tirées des redevances des recettes annexes tirées des commerces, parkings et actifs immobiliers. Ce qui est plus avantageux pour le propriétaire de l’aéroport mais qui ne fait pas  l’affaire des compagnies aériennes . Ces dernières préféreraient en effet que ces recettes annexes contribuent à financer les services aéronautiques et à réduire les redevances.


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