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L’Etat poussé à céder le plein contrôle d’ADP

L’Etat devra céder la totalité de ses 50,6 % dans Aéroports de Paris… ou il devra se passer de très gros candidats potentiels et d’un prix maximal. C’est le message qu’ont fait passer de gros investisseurs à la puissance publique, en vue de la  privatisation d’ADP.

Martin Vial, le commissaire aux participations de l’Etat, a encore dit la semaine dernière vouloir garder toutes les options ouvertes : une vente par blocs avec ou sans l’Etat minoritaire, ou la cession de l’intégralité du contrôle à un investisseur. « Nous recevons beaucoup de marques d’intérêt d’investisseurs industriels et financiers. Nous souhaitons que cette intensité concurrentielle se maintienne jusqu’au bout », a t-il déclaré. Tous les investisseurs ne pourront cependant pas lancer une OPA sur l’intégralité d’ADP, valorisé en Bourse plus de 18 milliards d’euros.

Droits de gouvernance

Candidat de longue date, déjà équipé de cinq banques d’affaires (Morgan Stanley, Lazard, Perella Weinberg, Société Générale et Nomura), le premier d’entre eux et le mieux placé avec 8 % du capital, Vinci l’a indiqué publiquement. « Si le capital est découpé en petits morceaux, cela ne nous intéressera pas puisque nous avons vocation à contrôler ou du moins à en avoir la perspective […]. Par ailleurs, dans cinquante ans, nous serons toujours là alors que les fonds d’infrastructures ne restent guère au-delà de quinze ans », a déclaré son dirigeant Xavier Huillard, dans le magazine « Paris Match ».

Il est loin d’être le seul. Selon nos informations, les australiens IFM Investors (82 milliards de dollars d’actifs sous gestion) et Macquarie (399 milliards de dollars) ont transmis un message similaire, ainsi que l’américain Global Infrastructure Partners (51 milliards de dollars). « Nous n’irons pas sur un processus minoritaire, dit l’un d’entre eux. Nous investirons si nous avons des droits dans la gouvernance et sur la façon dont est gérée la société et la façon dont sont déployés les investissements. Si c’est pour entrer en minoritaire, même avec une option sur une prise de contrôle ultérieure via une OPA, il y a le risque que Vinci prenne le contrôle à court ou moyen terme ».

Martin Vial, le commissaire aux participations de l’Etat, a écarté vendredi les critiques de la Cour des comptes sur les privatisations des aéroports, notamment Toulouse : « Le rapport donne un satisfecit sur les opérations menées pour les aéroports de Nice et Lyon et sur ADP le cahier des charges sera encore renforcé ». Le Trésor et l’APE n’entendent donc pas suivre l’une des exigences de la Cour d’engager la procédure d’autorisation des investissements étrangers avant même le choix de l’acquéreur. « Une notification préalable est proprement impraticable. Eliminer un candidat qui aurait notifié et été jugé recevable entraînerait un risque de contentieux considérable », fait-on savoir du côté de la puissance publique.

Le sérieux de la candidature du groupe français est, de fait, dans toutes les têtes, d’autant que le ministre des Finances a adressé un message  peu avenant aux fonds étrangers , en prévenant qu’il rejetterait  toute prise de contrôle par une « puissance étrangère » .

S’il écarte ces gros candidats, l’Etat risque de se priver d’une part de la plus-value potentielle. Et ce, bien que les candidats prêts à investir en minoritaires ou à constituer des consortiums ne manquent pas.

Des incertitudes qui pèsent sur les candidats

Le marché évoque les noms d’Allianz, Axa IM, CNP, des fonds souverains QIA et Adia, des canadiens CPPIB, CSP, CDPQ, le fonds d’infrastructure de KKR, ainsi que l’espagnol Ferrovial. Selon des sources, Ardian pourrait également être candidat, sur le même schéma que sur l’aéroport de Lyon avec des acteurs locaux. Les députés ont en effet adopté un amendement à la loi pacte qui permettra aux collectivités d’Ile-de-France et de l’Oise d’entrer au capital d’ADP.

Une option qui satisferait un grand nombre de candidats serait une cession de blocs, assortie d’une période de blocage à l’issue de laquelle ils auraient la possibilité de lancer une OPA sur l’ensemble d’ADP. Mais certains, là encore, sont circonspects. Elle pourrait avantager des actionnaires actuels.

Ventes parallèles

D’autres veulent croire que l’Etat peut ne pas choisir et satisfaire tous les investisseurs : « L’APE peut très bien mener un dialogue compétitif. En clair, demander aux candidats de formuler des marques d’intérêts sur une ou plusieurs des options, et conduire une présélection sur deux schémas en parallèle, majoritaire et minoritaire, puis choisir le mieux disant », indique un banquier. Un choix, jugé pour l’heure possible mais encore trop complexe techniquement par l’Etat.


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