Ile-de-France

Accueil des réfugiés afghans : quelle marge de manœuvre pour les collectivités ?

La mobilisation n’a pas tardé. Dès le début de l’évacuation d’Afghans au départ de l’aéroport de Kaboul, suite à la reprise du pays et de la prise de la capitale afghane par les Talibans le 15 août 2021, de nombreux maires à travers l’Hexagone (Lyon, Grenoble, Strasbourg, Clermont-Ferrand, Besançon…) ont proposé d’accueillir des réfugiés sur leur commune.

Organiser localement l’accueil des réfugiés

Les élus franciliens ne sont pas en reste. Ils sont nombreux à s’être manifestés via les réseaux sociaux, par voie de presse ou de tribune, à l’image des maires communistes de Bagneux, Malakoff et Gennevilliers dans les Hauts-de-Seine, de Grigny dans l’Essonne, de Mitry-Mory en Seine et Marne ou de Vitry-sur-Seine dans le Val-de-Marne.

Dans les Yvelines, Navid Hussain-Zaidi, conseiller municipal d’opposition de la commune d’Epône, a été à l’initiative d’une tribune, le 17 août, appelant « les élus à se mobiliser pour un peuple qui est en train de vivre un basculement terrifiant ». « Localement, nous pouvons organiser l’accueil des réfugiés. En tant qu’élus, nous sommes disponibles pour aider et accompagner ces citoyens qui quittent leur pays non par envie mais par peur d’un avenir où règne le chaos », peut-on lire dans ce texte signé par une soixantaine d’élus des Yvelines, dont les maires de Limay, Coignières, Trappes et Magny-les-Hameaux, et deux conseillères régionales, Ghislaine Sénée et Dieynaba Diop, toutes les deux élues sur la liste de Julien Bayou, « Le rassemblement pour l’écologie et la solidarité ».

Navid Hussain-Zaidi, conseiller municipal à Epône (Yvelines), est à l’initiative d’une tribune signée par une soixantaine d’élus yvelinois prêts à organiser localement l’accueil des réfugiés afghans. © DR

Dieynaba Diop, par ailleurs adjointe au maire des Mureaux, va d’ailleurs « présenter un vœu lors de la prochaine séance du conseil régional afin que la Région accueille des réfugiés », indique Navid Hussain-Zaidi. Sans grande chance que cela aboutisse, Valérie Pécresse, la présidente de la Région, s’étant déclarée opposée à un « accueil inconditionnel » des réfugiés, plaidant plutôt pour un accueil dans les pays voisins de l’Afghanistan.

« Au-delà de ces signatures, nous avons lancé un appel aux associations pour qu’une fois ces réfugiés présents dans nos villes, on se remonte les manches et nous puissions les accueillir », poursuit-il, citant l’exemple du maire de Magny-les-Hameaux, Bertrand Houillon, qui a proposé à la préfecture des Yvelines d’accueillir des réfugiés sur sa commune. Une proposition restée pour l’heure sans réponse.

Accueil organisé par les services de l’Etat

En effet, « l’accueil est organisé au niveau interministériel et national, coordonné par la délégation interministérielle à l’accueil et à l’intégration des réfugiés (Diair), précise-t-on à l’association France terre d’asile. Au départ l’accueil se fait en Ile-de-France car les réfugiés arrivent à Roissy, avant pour certains d’être transférés dans d’autres régions car il n’y a pas suffisamment de places en région parisienne. Mais pour l’instant, les collectivités territoriales ne sont pas directement impliquées. Leur mobilisation pourra intervenir dans un deuxième temps après la phase de transition en hôtels et en centre d’hébergement temporaire pour demandeurs d’asile, en particulier pour faciliter la scolarisation des enfants et accompagner les réfugiés dans les démarches à plus long terme, notamment pour l’accès au logement ».

« Il y a de nombreux maires volontaristes prêts à accueillir les réfugiés sauf que la décision et la régulation relèvent de l’État », confirme Luc Carvounas, maire (PS) d’Alfortville (Val-de-Marne) et président depuis décembre 2020 de l’Union nationale des centres communaux et intercommunaux d’action sociale (Unccas), représentant les élus communaux et intercommunaux en charge des affaires sociales et leur CCAS/CIAS. « Tous les Afghans arrivés [ces dernières semaines] sur le territoire présents dans les collectivités sont orientés par l’État », poursuit Luc Carvounas. C’est le cas de la centaine de ceux hébergés temporairement dans un hôtel de Charenton-le-Pont, à la demande de la préfecture du Val-de-Marne.

Luc Carvounas. © Jgp

Le maire d’Alfortville regrette qu’il n’y ait pas, en la matière, une plus grande coordination avec les services de l’État : « il faudrait que ces derniers mettent en place un fichier des villes qui se sont déclarées prêtent à accueillir des réfugiés ». Et d’évoquer le cas de 2015, lorsque l’image du corps sans vie du petit Aylan, enfant syrien échoué sur une plage turque, avait provoqué un immense élan de solidarité à l’égard des réfugiés syriens : « j’avais spontanément isolé trois appartements, sauf que l’on n’a jamais vu les familles… », raconte l’édile val-de-marnais.

Luc Carvounas indique avoir, en tant que président de l’Unccas, proposé aux préfets Alain Régnier, délégué interministériel à l’accueil et à l’intégration des réfugiés, et Sylvain Mathieu, délégué interministériel à l’hébergement et à l’accès au logement, de mettre en place une liste de villes prêtes à accueillir des réfugiés. Sans retour pour l’heure. « Nous ne sommes pas suffisamment intégrés au dispositif, déplore-t-il. J’aimerais que l’on apprenne à travailler ensemble, État et collectivités territoriales, sur ces questions de solidarité. Il est en effet dommage que ces possibilités d’accueil ne soient pas étudiées. Il faudrait au contraire profiter de cette manne que représentent les maires et leurs collectivités ».

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Author: Emmanuelle Chaudieu