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« GlobeTrotter », le pari gagnant de clipser une trottinette à un fauteuil roulant

22 novembre 2021

« GlobeTrotter », le pari gagnant de clipser une trottinette à un fauteuil roulant

La société Omni Community a inventé un système universel pour clipser une trottinette sur un fauteuil roulant. Découvrez l’histoire de Charlotte Alaux et de son « GlobeTrotter ».

    L’inventivité bat son plein dans le domaine des mobilités douces. On connaît déjà les « rollers », les patins à roulettes et les « skate-boards ». La bonne vieille bicyclette a donné naissance à divers rejetons tous adoptés par les uns et les autres (VAE, tricycles, vélos-cargos…). Les gyropodes, les « hoverboards » et les « monowheels » ont promu de nouvelles formes de translation. Sans oublier, bien sûr les nombreuses trottinettes traçant leurs sillons sur le bitume urbain.

    Autant de moyens de déplacement dont nous pourrions penser que les personnes « à mobilité réduite », comme les personnes en fauteuil roulant, ne peuvent utiliser. Et pourtant ! Attardons-nous sur la trottinette.

    Franchir toutes les difficultés de la ville

    Connaissez-vous le « GlobeTrotter » ? C’est le nom de la fixation qui permet de clipser-déclipser en un seul clic, une trottinette à un fauteuil roulant. Une solution technique mise au point par la société Omni Communitydont Charlotte Alaux est la confondatrice. Après seulement 8 mois de commercialisation, 350 personnes l’utilisent pour tous leurs déplacements quotidiens.

    Finis les efforts ingrats, la manette suffit pour avancer et franchir toutes les difficultés de la ville : les côtes, les pavés, les franchissements de trottoir, les plaques d’égout, tout est avalé d’un tour de roue d’un seul. Reste juste la joie de rouler et de goûter à la sensation des déplacements.

    Faire bouger les choses

    Comment cette idée a pu faire florès et suivre l’engouement des trottinettes de nos jours ? Charlotte a aujourd’hui 30 ans. Elle se souvient. « Je suis en fauteuil depuis l’âge de 4 ans. Et quand j’étais petite, j’étais hyper-frustrée de ne pas pouvoir faire du vélo comme mes amis et ma famille. »

    Ses grand-parents lui achètent alors un tricycle que l’on peut mouvoir avec les bras. « Mais je me suis vite aperçue que je n’y arriverais pas. Il était trop lourd et je n’arrivais pas à le faire avancer avec les bras. Et cette frustration m’a suivie en grandissant. »

    D’autant que les moindres déplacements, que les personnes valides ont l’habitude d’exécuter rapidement et sans difficulté, s’avèrent être un véritable parcours du combattant : « il y a plein d’obstacles dont on ne se rend pas compte quand on est valide : les trottoirs à franchir, les plaques d’égouts, les zones pavées, et les côtes… Tous les trajets sont deux fois plus longs et surtout plus fatiguants. Les épaules en prennent un coup. » Des obstacles physiques mais aussi sociaux qui sont autant de freins à l’épanouissement des personnes en mobilité réduite et leur intégration dans la société.

    Photo de Charlotte et l'un des membres de son équipe recevant la distinction du lauréat du Concours Lépine

    Charlotte décide alors de faire bouger les choses. Il y a trois ans, en 2018, elle rencontre ses quatre associés, tous ingénieurs. Robin, Sulivan, Noé et Mathieu œuvrent dans la recherche de solutions pour faciliter la mobilité des personnes en mobilité réduite. Le « Club des cinq » se met au travail.

    Leurs camps de base seront deux incubateurs : « Station F», campus de « start-up » de la Halle Freyssinet et l‘École des Arts et métiers à Paris, cocons idéaux pour faire éclore leurs idées. « On a passé 2 ans en R&D. On a prototypé pleins de choses. Et un jour, ils m’ont proposé d’utiliser une trottinette électrique. »

    Les premiers tours de roues effacent son scepticisme de départ. « Dès le début, c’était déjà incroyable au niveau des sensations, ça a apporté énormément d’émotions. »  Une madeleine. « Forcément, ça m’a ramenée à mon enfance et à la frustration que j’avais connue toute petite. »

    La solution est testée par une cinquantaine de personnes, dont des enfants, qui tous confirment les sensations ressenties par Charlotte. Mais surtout, ça permettait d’aborder toutes les difficultés du quotidien avec facilité.

    « On s’est dit « OK », il faut qu’on monte notre société pour qu’il y ait un maximum de gens qui puissent bénéficier de cette solution », se remémore Charlotte. Omni Community voit le jour.

    Un produit abordable et inclusif

    Car, pour Omni Community, le « GlobeTrotter » doit être abordable. Tout le monde doit pouvoir y prétendre. Pour un prix entre 1 300 et 2 000 euros selon le modèle de trottinette, la solution est environ quatre à cinq fois moins chère que les fauteuils motorisés spécialisés.

    Le « GlobeTrotter », c’est aussi le gain de l’autonomie et de la liberté. Des mots qui reviennent souvent dans la bouche des utilisateurs de ce fauteuil « augmenté » qui leur ouvre de nouvelles perspectives :

    • Bénédicte est libre de sortir et d’aller humer l’air en se rendant dans son jardin favori sans avoir besoin de solliciter une personne à une heure précise. Le «  GlobeTrotter » l’a rendue plus autonome.
    • Nicolas, lui, est propriétaire d’une boutique. Il ne s’y rendait que deux ou trois fois maximum dans la semaine en raison des difficultés de trajets. Aujourd’hui, il peut s’y rendre tous les jours sans efforts.

    Tous les témoignages vont tous dans le même sens. Tous ont conquis une nouvelle liberté grâce à un surcroît d’autonomie.

    Changer le regard sur le handicap

    Outre l’épanouissement personnel, le « GlobeTrotter » permet surtout une intégration réelle des personnes à mobilité réduite qui « comme tout le monde » peuvent aussi faire de la trottinette. Aujourd’hui en France, 1,4 million de personnes sont en fauteuil roulant. Si l’on décompte les personnes trop âgées ou trop jeunes, 800 000 personnes pourraient utiliser cette solution. Elles sont 54 millions dans le monde. Objectif à court terme : équiper 500 000 personnes en France.

    « Avec mon fauteuil-trottinette, je suis comme tout le monde. Je roule sur la piste cyclable et quand je double les cyclistes, il y a des interactions. Certains m’ont même dit qu’ils essayeraient bien un fauteuil comme le mien pour voir comment ça fait ! C’est ça qu’on aime, c’est ça qu’on a envie d’entendre. En fait, les différences sont nivelées. On est au même niveau que tout le monde. »

    Chez Omni, « l’inclusivité c’est hyper-important, c’est partager la même chose que tout le monde, avoir accès aux mêmes choses. Le regard sur le handicap a changé », nous livre Charlotte

    Charlotte et le « GlobeTrotter », c’est l’histoire de ce que peut produire la force du dépassement, la résilience, l’inventivité et l’envie de vivre. « Quand on est en situation de handicap, il faut tout le temps s’adapter. C’est le mot d’ordre et c’est vraiment aussi la définition de ce projet-là, chez Omni, de trouver des solutions pour « hacker » ce qui existe et s’adapter à son environnement et profiter de la vie quoi qu’il arrive », résume Charlotte.

    Une histoire qui est loin d’avoir écrit sa dernière page puisque le « GlobeTrotter » a été récompensée du Grand prix du concours Lépine 2021.


    Source
    Auteur: Gouvernement.fr