Economie

Jeudi noir pour le groupe Alibaba : victime des pénalités du gouvernement chinois, son bénéfice s’écrase totalement

Longtemps considéré comme un modèle de réussite pour les entreprises chinoises, le groupe Alibaba, fondé par le fantasque Jack Ma, est le premier à subir la vindicte des autorités. Il a fait état ce jeudi d’un très fort ralentissement de son bénéfice au deuxième trimestre de son exercice décalé : un repli de 81% est observé. Pour la période de juillet à septembre, l’exercice décalé d’Alibaba s’élève en effet à 5,37 milliards de yuans (741,3 millions d’euros), contre 28,7 milliards de yuans un an plus tôt.

Il y a un an, le pouvoir communiste avait coupé les ailes du groupe privé, en stoppant la gigantesque entrée en Bourse de sa filiale de paiement Ant Group à Hong Kong, 48 heures avant l’événement. Présentée alors comme la plus grosse levée de fonds de tous les temps, l’opération aurait dû lui rapporter 27,4 milliards d’euros.

Le mois suivant, Alibaba était visé par une enquête pour entrave à la concurrence. Depuis, le groupe a été condamné au printemps à une amende de 2,3 milliards d’euros.

Les autorités chinoises ne se sont pas arrêtées là. Elles ont ensuite étendu leur durcissement réglementaire à d’autres secteurs lucratifs comme les cours de soutien privés, les livraison de repas, le divertissement ou les jeux vidéo. Des milliards de yuans de capitaux ont été perdus.

La bonne nouvelle pour l’entreprise est que son chiffre d’affaires, en revanche, est en hausse de 29 % sur un an, à 155 milliards de yuans (21,4 milliards d’euros).

Alibaba, qui s’est récemment installé à l’aéroport de Liège, dit s’attendre à une progression de ses ventes de l’ordre de 20 à 23 % cette année, tout en avertissant de « risques et incertitudes » qui pourraient pénaliser ses activités.

Un faux pas de la part de Paytm

Ces résultats trimestriels sont publiés le jour où Paytm, pionnier du paiement en ligne en Inde et dont Ant et Alibaba sont actionnaires, a plongé à la Bourse de Bombay lors de sa première journée de cotation.

Même si la start-up indienne a réalisé la plus grosse levée de fonds de l’histoire en Inde, les investisseurs se sont inquiétés de sa capacité à devenir rentable. Le titre a ainsi perdu jeudi plus de 25 % en quelques minutes.

Le faux pas de Paytm a fait perdre jeudi à Alibaba plus de 5 % à la Bourse de Hong Kong.

Une discrétion inhabituelle en cette période

Depuis un an, Jack Ma fait profil bas, après avoir critiqué publiquement le régulateur chinois. Une attitude qui semble avoir valu à son groupe d’être dans le viseur de Pékin.

Le quotidien hongkongais South China Morning Post (SCMP), propriété d’Alibaba, affirmait le mois dernier que Jack Ma était en Europe pour une série de réunions d’affaires. Ce premier déplacement à l’étranger laisse à penser que Jack Ma, qui a quitté en 2019 la direction d’Alibaba, ne fait pas l’objet de poursuites. En effet, dans le cadre d’enquêtes, la Chine empêche parfois certaines personnes de quitter le territoire.

Alibaba se fait également plus discret qu’à l’accoutumée, notamment pour sa Fête des célibataires, qui donne lieu à des réductions monstres en ligne. Lancée par Alibaba il y a une décennie, cet événement tombe chaque année le 11 novembre (11/11), en raison de la succession de « 1 » dans la date qui symbolise le célibat.

Pendant des années, ces soldes étaient accompagnées d’une intense campagne médiatique de la part d’Alibaba, avec la diffusion en direct sur un écran géant de l’évolution du montant des transactions réalisées sur ses plateformes.

Mais cette année, le 11 novembre, pas de tambours ni de trompettes. Les responsables d’Alibaba se sont gardés de commentaires triomphants.

De son côté, JD.com, le principal concurrent d’Alibaba en Chine, a annoncé jeudi 2,8 milliards de yuans de pertes trimestrielles (386,6 millions d’euros). La firme, qui n’a pas fourni d’explications, avait réalisé un an plus tôt 7,6 milliards de yuans de bénéfices.