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Paris : la fac de Tolbiac évacuée, des « centaines de milliers d’euros » de dégâts

Le blocage de l’université parisienne de Tolbiac, lieu emblématique de la mobilisation contre la réforme de l’accès à l’université, est terminé. Il a été levé vendredi, à l’issue d’une vaste opération de police lancée au petit matin.

Dans la tour de 22 étages, le coût des « dégradations » commises lors des trois semaines d’occupation du site universitaire parisien de Tolbiac s’élève à « plusieurs centaines de milliers d’euros », s’est offusqué le président de l’université Paris-I, dont dépend le site, évacué dans la matinée par la police. « Les experts ont déjà été mandatés pour réaliser un chiffrage précis des travaux nécessaires à la remise en état du site » Pierre-Mendès-France, a ajouté Georges Haddad. « En attendant, le centre Pierre-Mendès-France restera fermé jusqu’à nouvel ordre », a précisé le président de l’université, qui s’exprimait lors d’un point de presse à la Sorbonne. « Nous avions investi plus de 800 000 euros ces dernières années en travaux d’amélioration du site. Tout est à refaire », a-t-il aussi affirmé. « Les dégradations sont énormes. Elles vont coûter très cher à l’université et au contribuable », selon lui. « C’est l’argent de la nation qui a été gaspillé. »

Georges Haddad a évoqué des « dégradations de tous ordres : tags, dégradations du matériel pédagogique, de sécurité, portes détruites ». Tolbiac était devenu le lieu emblématique de la mobilisation contre la réforme gouvernementale de l’accès à la fac, accusée d’instaurer un système de sélection. « Désormais, le site Tolbiac sera repris par l’université, qui le fermera pour des raisons de sécurité et de remise en état suite aux dégradations des occupants », a de son côté indiqué le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb.

Une centaine de personnes évacuées

À 5 heures du matin, au moins une centaine de CRS ont pénétré sur le site Pierre Mendès-France, une tour occupée depuis le 26 mars, essuyant notamment des jets de bouteilles de verre et autres projectiles dans une ambiance très tendue, a constaté une journaliste de l’Agence France-Presse. Guettant une intervention policière, certains occupants se sont immédiatement retranchés à l’intérieur tandis que d’autres tentaient de s’enfuir en escaladant la grille, a constaté la journaliste de l’Agence France-Presse. L’opération a pris fin vers 6 heures, a annoncé la préfecture de police de Paris (PP) à l’Agence France-Presse, indiquant qu’une centaine de personnes avaient été évacuées dans le calme.

Seul un individu a été interpellé, pour outrage et rébellion. « On n’a pas fait acte de résistance », a confirmé à l’Agence France-Presse un des occupants, cagoulé. « Perso, je dormais pas. C’est venu comme ça, ils ont pas cherché à savoir qui faisait quoi, qui était qui, et il y a eu des violences, des intimidations » de la part de la police, a-t-il affirmé. « On est fatigués surtout parce qu’on était dans le stress de savoir à quel moment on allait être délogés. On a eu la réponse », a-t-il ajouté.

Vers 8 h 30, des CRS gardaient encore l’entrée du site, jonchée de déchets en tout genre : bouteilles de bière, tables, sacs-poubelle ou banderoles. Le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb a salué dans un communiqué « la réussite de cette opération dans un contexte d’intervention délicat ». « Désormais, le site Tolbiac sera repris par l’université qui le fermera pour des raisons de sécurité et de remise en état, suite aux dégradations des occupants », a-t-il ajouté.

La ministre de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal a, elle, jugé « très important que les choses puissent revenir à la normale ». « Ce site depuis maintenant quelques semaines était vraiment le lieu à la fois d’affrontements à l’extérieur et à l’intérieur », a-t-elle déclaré sur BFM TV, ajoutant que les prochains examens partiels ne s’y tiendraient « probablement » pas et devront être délocalisés.

« Un vrai capharnaüm »

L’intervention des forces de l’ordre avait été réclamée dès le 9 avril par Georges Haddad, président de l’université Paris-1 dont dépend Tolbiac, inquiet de la situation après la découverte de cocktails Molotov sur le site. Régissant à l’évacuation, Georges Haddad a fait part de son « immense soulagement », « heureux qu’il n’y ait eu aucun blessé », affirmant sur BFM TV qu’il comptait sur les forces de l’ordre pour « sécuriser le site » pendant la semaine de vacances qui débute lundi. Dans un premier temps, la préfecture de police n’avait accédé à sa demande de recourir à la force publique, invoquant une « appréciation technique ». Compte tenu de la « particularité topographique » du site, « c’est presque plus dangereux [d’intervenir] que de ne pas intervenir », avait expliqué dimanche Emmanuel Macron, lors de son interview sur BFMTV, RMC et Mediapart pour justifier la prudence de la préfecture.

Le syndicat UNI (classé à droite), qui avait déposé plusieurs recours en justice infructueux pour contraindre les forces de l’ordre à intervenir, a lui aussi salué l’évacuation tout en espérant que « des plaintes pénales » seraient déposées pour les « dégradations et les agressions » qui auraient accompagné cette occupation. Deuxième syndicat étudiant, l’Unef a en revanche condamné le recours à la force, symbole selon lui d’un « mépris » pour le mouvement étudiant. « Le gouvernement n’a répondu sur aucun point, aucun sujet de fond alors que ça fait des mois que les étudiants se mobilisent », a déclaré sur BFM TV sa présidente, Lilâ Le Bas.

Depuis plusieurs semaines, quatre universités sont totalement bloquées et une dizaine de sites (sur 400) perturbés pour protester contre la loi orientation et réussite des étudiants (ORE), accusée par ses détracteurs d’instaurer un système de « sélection » déguisée. Le 9 avril, des CRS étaient également intervenus à la faculté de Nanterre, autre point chaud, pour lever le blocage d’un bâtiment. À Montpellier, le tribunal administratif a ordonné mercredi aux occupants de l’université Paul-Valéry, bloquée depuis la mi-février, de « libérer les lieux sans délai », mais les forces de l’ordre ne sont pas encore intervenues.

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