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Commerçants face aux « gilets jaunes » : « On a absorbé le choc, mais jusqu’à quand ? »

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Colas Michard, propriétaire de la boutique de chaussures Michard-Ardillier, à Bordeaux, le 10 janvier.

Colas Michard, propriétaire de la boutique de chaussures Michard-Ardillier, à Bordeaux, le 10 janvier. Ugo Amez pour Le Monde

Aux tout premiers jours des soldes, les rues de Bordeaux grouillent de badauds avides de bonnes affaires. Nombreux sont ceux qui ont bravé le froid pour faire leurs achats et profiter de remises. Pour les commerçants, la situation n’est pourtant pas au beau fixe. Malgré un début de soldes prometteur, ils sont à nouveau inquiets à la veille du prochain samedi de mobilisation des « gilets jaunes ». « Nous avons déjà perdu 50 000 euros de nos ventes. Normalement, le premier samedi des soldes est le jour où nous réalisons notre plus gros chiffre de l’année. Mais face aux derniers samedis et surtout aux violences qui ont marqué les manifestations, qu’en sera-t-il vraiment ? », déplore Colas Michard, propriétaire de la boutique Michard-Ardillier.

Cette institution de la chaussure est une affaire familiale depuis 1978. Le fils de 37 ans a racheté la boutique à son père fin 2017. Depuis, il tente de maintenir le cap. Lors des derniers événements, il a fermé le temps que le cortège passe, tout en exfiltrant les clients par la galerie marchande située à l’arrière du magasin. Mais là, c’en est trop. « Jusqu’ici, grâce à notre trésorerie, on a absorbé le choc. Mais jusqu’à quand ? » Samedi 12 janvier, il jonglera avec les horaires du personnel pour tenter de couvrir ses charges. « J’ai modifié le planning de mes employés pour qu’ils commencent plus tôt et terminent à 18 heures. Car je sais que je fermerai sûrement plus tôt », se désespère-t-il. Des dizaines de clients l’appellent depuis mercredi pour s’assurer que le magasin sera bien ouvert dimanche.

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A quelques rues de là, Claire s’affaire pour mettre en valeur ses dernières promotions. Son Serendipity, « cabinet de convivialité », est niché entre le cours Alsace-Lorraine et le cours Victor-Hugo. Une belle devanture rouge, concoctée avec soin, située en plein milieu des scènes de violences des derniers samedis. Ouvert en 2017, elle tente de maintenir son affaire à flot. « Dans le fond, ce mouvement populaire pourrait nous servir, je comprends leurs revendications, que je partage en tant qu’entrepreneure. Mais la façon de faire n’est pas adaptée. » Seule à tenir son magasin, elle a vécu quelques frayeurs en voyant des manifestants courir dans le quartier, les yeux rougis : « Je ne peux pas me permettre de fermer, mais honnêtement, le samedi, je viens travailler avec appréhension. » Qui dit petit commerce, dit faible trésorerie. « Je passe mes commandes avec des pincettes, de peur de ne pouvoir gérer mes fonds. Le climat global est déjà anxiogène, ce n’est pas évident de travailler dans ces conditions », déplore cette jeune femme passionnée.


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