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Festival de Cannes 2021 : le sulfureux « Benedetta » de Paul Verhoeven met le feu sur la Croisette

Benedetta est inspiré d’un fait historique de l’Italie du XVIIe siècle qui a conduit au bûcher la mère supérieure d’un couvent pour saphisme. Le film met en perspective la religion, la condition féminine et la sexualité, des sujets récurrents du sulfureux réalisateur Paul Verhoeven. Habité par l’interprétation de Virginie Efira, Charlotte Rampling et Lambert Wilson, le film embrase la Croisette. Il sort en salles ce vendredi 9 à partir de 19h, en même temps que sa projection officielle à Cannes.

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France 3

Entrée au couvent en 1599 à neuf ans, en pleine épidémie de peste en Italie, Benedetta Carlini, issue d’une riche famille toscane, est prise de crises mystiques et devient une des sœurs les plus influentes. Quand arrive une jeune novice, celle-ci la séduit et l’entraîne dans des jeux interdits. Benedetta continue à avoir des visions et reçoit les stigmates du Christ. Jusqu’à ce que le Nonce (évêque ambassadeur du Saint-Siège) se rende sur place, averti des « déviances » de la none, incrédule à ses miracles.

Paul Verhoeven avait déjà tâté du film historique avec La Chair et le sang (1985) qui se déroulait à la Renaissance, et Black Book (2006) situé durant l’Occupation des Pays-Bas, son pays natal. Le cinéaste, dont la filmographie néerlandaise relève du cinéma d’auteur (Le Quatrième homme, 1983), est devenu un réalisateur de blockbusters américains avec Robocop (1987), Total Recall (1990) ou Basic Instinct (1992). De retour en Europe, Verhoeven est revenu à une veine plus « auteuriste », dont le film Elle (2016) a été récompensé dans de nombreux festivals. Avec Benedetta, il réalise une synthèse des thèmes majeurs qui hantent ses films.

Histoire de couvent, Benedetta renvoie à l’univers de Gautier de Coinci, bénédictin et premier poète-musicien du XIIe siècle, qui conta nombre d’anecdotes croustillantes sur les moeurs monacales. Le fait divers du couvent de Pescia, qui lui est postérieur, rappelle l’affaire de Loudin (1632-34) où toutes les Ursulines de la ville se dirent envoûtées par des démons, avec nombre de démonstrations saphiques. Aldous Huxley en tira un célèbre ouvrage (Les Diables de Loudun, 1952) et Ken Russell son meilleur long métrage (Les Diables, 1971). C’est dire si le sujet fascine. L’affaire de Pescia, contemporaine à celle de la cité poitevine, est moins connue, sans diableries, mais entretient avec elle de nombreuses similitudes.

Charlotte Rampling et Virginie Efira dans "Benedetta" de Paul Verhoeven (2020). (GUY FERRANDIS / PATHE)

Charlotte Rampling et Virginie Efira dans "Benedetta" de Paul Verhoeven (2020). (GUY FERRANDIS / PATHE)

Paul Verhoeven se détache du satanisme, ce qui donne à son film un caractère plus sociétal. Il traite ainsi de front les thèmes contemporains de « l’amour d’en-face », de la foi, des excès fondamentalistes et de leur emprise sur les populations, alors que la grande peste (1347-1690) fait écho à la pandémie actuelle (le film a pourtant été tourné avant). Le mysticisme et les stigmates christiques étaient déjà présents dans Le Quatrième homme, et les portraits de femmes sont  innombrables dans la filmographie du réalisateur. La crudité est l’image de marque du « Hollandais violent » qui filme sans détour les corps en extase ou torturés, ce qui lui vaut l’attribut de provocateur. Dans le rôle de Benedetta, Virginie Efira brigue le prix d’interprétation, une récompense majeure qui lui offirait une belle reconnaissance. Charlotte Rampling est remarquable en mère supérieure digne et suspicieuse, pendant que Lambert Wilson déploie une vindicte tout en pugnacité.

Le Néerlandais prend du recule pour raconter cette invraisemblable histoire, en lui injectant un humour au second degrés auquel le public a été sensible, riant à plusieurs reprises, et allant jusqu’à applaudir pendant la projection. Si à la sortie,  les festivaliers étaient partagés, personne n’a quitté la salle malgré la mise en scène dérangeante.  

En raison de l’époque féodale du film, son sujet sulfureux, sa sensualité et sa violence graphique, le nouveau Verhoeven est la suite logique de La Chair et le sang, son dernier long métrage tourné en Europe avant sa période américaine. Benedetta boucle une boucle qui serait le condensé d’un auteur créatif et reconnaissable entre tous, et qui signe une de ses œuvres majeures.

L'affiche de "Benedetta" de Paul Verhoeven (2020). (PATHE DISTRIBUTION)

L'affiche de "Benedetta" de Paul Verhoeven (2020). (PATHE DISTRIBUTION)

Genre : Drame historique
Réalisateur : Paul Verhoeven
Acteurs : Virginie Efira, Charlotte Rampling, Daphne Patakia, Lambert Wilson, 
Pays : Pays-Bas / France
Durée : 2h11
Sortie : 9 juillet  2021
Distributeur : Pathé Distribution

Interdit aux moins de 12 ans

Synopsis : Au XVIIe siècle, alors que la peste se propage en Italie, la très jeune Benedetta Carlini rejoint le couvent de Pescia en Toscane. Dès son plus jeune âge, Benedetta est capable de faire des miracles et sa présence au sein de sa nouvelle communauté va changer bien des choses dans la vie des soeurs.


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