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Pénurie de carburant : quatre questions sur les réserves stratégiques de pétrole, déjà utilisées dans les Hauts-de-France

Les files pour faire le plein d’essence s’allongent. Pas moins de 15% des stations-service françaises étaient concernées par un manque d’un ou plusieurs carburants, vendredi 7 octobre, selon un chiffre cité par plusieurs ministres. Deux facteurs sont en cause dans ces problèmes d’approvisionnement : l’enseigne TotalEnergies est victime du succès d’une remise à la pompe – de 20 centimes d’euro par litre – et fait face à une grève dans ses raffineries et ses dépôts de carburants, dont plusieurs sont situés dans la région des Hauts-de-France, particulièrement touchée par les pénuries.

Le ministre délégué aux Transports, Clément Beaune, a annoncé vendredi sur LCI que les camions-citernes seraient exceptionnellement autorisés à circuler dimanche et que la France pourrait libérer « davantage » de stocks stratégiques pour apaiser la situation. En quoi consistent ces réserves ? Où se trouvent-elles ? Sont-elles suffisantes ? Eléments de réponse. 

Qui gère les réserves stratégiques de pétrole françaises ?

Depuis 1928, la loi française impose de disposer en permanence de trois mois de stocks pétroliers. Les organisations internationales (Union européenne, Agence internationale de l’énergie), auxquelles la France a ensuite adhéré, ont adopté le même type de précautions, explique La Revue de l’énergie. En France, ces réserves sont principalement gérées par la Société anonyme de gestion de stocks de sécurité (Sagess), créée en 1988, mais restent contrôlées par l’Etat, via le Comité professionnel des stocks stratégiques pétroliers (CPSSP), qui regroupe acteurs privés et publics. 

Ces réserves sont importantes car le pétrole consommé en France, fourni par huit raffineries, est quasiment intégralement importé. Au total, 18 millions de tonnes de carburant et de pétrole sont stockés sur le territoire, ce qui correspond donc à trois mois de consommation. 

Où sont-elles situées sur le territoire ?

Selon les chiffres de 2018 communiqués sur le site de la Sagess, ces réserves sont réparties sur 89 sites de stockage : 80 dépôts commerciaux, les huit raffineries et le site de Manosque (Alpes-de-Haute-Provence), composé de 30 cavités salines en sous-sol. Comme le précisait en juin le ministère de la Transition énergétique dans un communiqué consacré à la chaîne pétrolière, « la répartition des capacités de stockage sur le territoire métropolitain n’est pas homogène » et « les régions Normandie et Paca représentent à elles seules 48% des capacités de stockage nationale »

La France a déjà eu recours à son stock stratégique de pétrole à plusieurs reprises. En 2016, elle avait utilisé l’équivalent de trois jours de réserves, au plus fort d’une contestation sociale qui avait provoqué un blocage important des raffineries françaises, rappelle France 24.

Quels stocks ont été utilisés pour l’instant ? 

Pour compenser la mise à l’arrêt d’un des quatre dépôts alimentant les stations-service des Hauts-de-France, les autorités ont levé des stocks stratégiques présents dans les trois autres dépôts en activité de la région, explique dans un communiqué la préfecture du Nord. « Les prochains approvisionnements et la mise à disposition des stocks stratégiques devraient détendre la situation pour les jours qui viennent », assure-t-elle. 

« Il ne s’agit pas d’une situation de pénurie de carburant, mais bien de difficultés de distribution, principalement en gazole, fortement utilisé au profit des activités économiques », précise la préfecture. Il a été demandé aux opérateurs pétroliers de « privilégier la distribution de carburant aux secteurs économiques (transports routiers, agriculture, pêche) et de transport de personnes ». Les automobilistes sont appelés à faire preuve de « civisme » et le stockage de carburant avec des jerricans ou des bidons est interdit.

En cas de dégradation de la situation, le préfet « procédera à des réquisitions visant à imposer par arrêté préfectoral à certaines stations essence, jusqu’alors ouvertes au grand public, de n’approvisionner en carburant que les véhicules prioritaires (forces de sécurité, secours, santé…) ».

Est-ce suffisant pour faire face aux problèmes d’approvisionnement ? 

Xavier Bertrand, président LR de la région Hauts-de-France, a déploré jeudi que le gouvernement n’ait pas libéré des stocks stratégiques de carburant « au niveau national ». « Chez nous, il y a 32% des stations » qui ont des problèmes d’approvisionnement, notamment « parce que beaucoup d’étrangers viennent faire leur plein », a-t-il affirmé sur franceinfo, plaidant pour « la réquisition ou la menace de la réquisition pour libérer les stocks ». Xavier Bertrand s’est également alarmé de la situation dans une lettre à l’exécutif : « Je demande au gouvernement de remédier rapidement à cette situation afin que des services publics essentiels, comme les transports scolaires et routiers, puissent circuler. » 

Parallèlement aux stocks stratégiques, le gouvernement a recours à l’importation. La ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, a mis en avant le renfort des « approvisionnements pétroliers depuis la Belgique »« Dès la semaine prochaine, ça ira mieux, le temps que le carburant arrive notamment du Benelux [Belgique, Pays-Bas et Luxembourg]« , a confirmé vendredi sur franceinfo Olivia Grégoire, ministre déléguée au Commerce. « On n’est pas en pénurie, puisqu’on a des plans B que sont l’importation de produits », qui a été « renforcée », appuie auprès de l’AFP Francis Pousse, président des stations-service et énergies nouvelles au sein du syndicat professionnel Mobiliance. 


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