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Cinq livres à lire en cas de coupure du courant

Que faire d’agréable pendant un black-out ? Lire à la frontale, à la bougie ou à la lampe à huile, des livres qui parlent de coupure de courant ! Voici une petite sélection.

Les coupures de courant menacent et l’anxiété grandit. Que va-t-on faire sans électricité ? Et si on en profitait pour se couler sous un plaid bien au chaud, devant un bon feu pour les plus chanceux, à la chaleureuse lueur des bougies pour les autres, pour rencontrer des personnages qui sont plus ou moins dans la même situation. Après tout, nous ne serons, au pire, privés d’électricité que pendant deux heures maximum, selon les dires du gouvernement. Voici un petite sélection de romans qui ont pour point commun… un black-out 

Un classique : Ravage de René Barjavel (Folio)

En 1943, René Barjavel met en scène un monde semblable au nôtre, les mêmes futilités, la même hiérarchie factice entre ceux qui possèdent et ceux qui n’ont pas. Sauf que l’être humain est allé plus loin en s’aliénant totalement à la fée électricité. Il ne se déplace plus, ne mange plus qu’alimenté par ce que la science et la technologie ont créé. Et même la mort a été en quelque sorte annihilée : les disparus trônent dans une pièce centrale chez leurs héritiers, congelés dans des simulacres de vie. Seul un bastion de résistance subsiste au sud, où quelques sceptiques préfèrent encore se fier à la l’agriculture et à l’élevage. Mais un jour, le courant s’arrête. Personne ne sait pourquoi ni comment. Privée de nourriture, d’eau, d’air, de moyens de locomotion, livrée à la famine, aux maladies, à la lutte pour la survie, l’Humanité court à sa perte. Ravage nous entraîne dans une course folle à la suite de quelques survivants, menés par un homme d’origine paysanne, à la reconquête d’un monde archaïque. Le pire peut-être sont les leçons qu’ils tireront de ce désastre.

Comme toute dystopie, Ravage projette les conséquences de nos travers dans un monde futuriste. Des mondes qui apparaissent redoutablement vraisemblables les années passant. Celui imaginé en pleine Seconde Guerre mondiale par Barjavel prend réalité en 2052. À l’heure où l’Europe est menacée de coupures de courant, un récit à dévorer en toute conscience.

Extrait : « L’éminent président de l’Académie des Sciences, M. Le professeur Portin, vient de communiquer à la docte Assemblée le résultat de ses travaux sur les causes des troubles électriques qui se sont manifestés l’hiver dernier, plus exactement le 23 décembre 2051 et le 5 janvier 2052 […] Après six mois de recherches […] il en était arrivé à la conclusion suivante : cette crise l’électricité […] était due à une recrudescence des taches solaires. Les taches solaires, ajouta le distingué savant, sont également la cause de l’accroissement notable de température que le globe subit depuis plusieurs années, et de l’exceptionnelle vague de chaleur dont le monde entier souffre depuis le mois d’avril. »

Une nouvelle : La coupure électrique de Marine Stouppou (Edilivre)

Des avions qui tombent du ciel, des trains qui déraillent et la panique d’une population privée de téléphones portables pour appeler au secours. « C’était comme si la coupure avait décidé de remettre les choses en place et de stopper toutes les nouvelles technologies […] Je me croyais dans un film ».

Lou-Ann et sa famille fuient vers le nord, à la campagne. À Flowery, les réfugiés s’adaptent. Aux enfants, on n’enseigne plus les maths et les langues mais l’entraide et la survie. Tout un tas d’interdits sont décrétés. Lou-Ann et son ami Mike décident d’en braver un, celui de sortir du village voir au-dehors. Une décision qui aura un prix très lourd.

Dans cette nouvelle d’une cinquantaine de pages, on se retrouve brutalement plongés dans un monde où la peur a engendré des réflexes classiques chez l’humain. Faudra-t-il un zest de magie pour échapper à ce cauchemar ?

Extrait : « Cette nuit-là, même un sourd aurait compris que la fin était proche, que le cycle de toute une vie disparaîtrait à jamais. Cette nuit-là, j’avais huit ans et la foudre déclencha une coupure électrique ».

Un roman « feel good » : Blackout à New York (Nathan)

Pendant la pandémie de Covid, « le monde a été mis en pause, et nous avons tous eu le sentiment de traverser une panne  métaphorique, de tâtonner dans le noir ». En réaction, six autrices noires de littérature Young Adult, Dhonielle Clayton, Tiffany D. Jackson, Nic Stone, Nicola Yoon, Angie Thomas et Ashley Woodfolk, décident d’unir leur plume et d’écrire un roman choral pour pallier un manque soulevé par la nièce de l’une d’elles : « Pourquoi les jeunes filles noires n’ont jamais de grandes histoires d’amour » dans les romans ?

Vous l’aurez compris, on parle donc d’amour dans Blackout à New York. D’abord, d’amour pour « The Big Apple », qui continue à palpiter malgré une coupure de courant qui jette ses habitants dans la rue. Mais aussi d’amour avec un grand A. À la façon de Love actually, suivez les aventures de Tammy, Kareem, Tremaine, Jacorey, Nella, Jocelyn, Tristan, Lana, Kayla, Jazmyn, Tre Shauwn, Micah, Grace et Seymour. Tous sont liés d’une façon ou d’une autre, tous ont le même but, rejoindre une « block party » à Brooklyn et tous se cherchent, aux prises, sans le savoir, avec la parabole du bateau de Thésée (futurs bacheliers, essayez donc de le recaser à l’épreuve de philo !). Coup de foudre, amours plurielles, amours gays ou lesbiennes, amitiés qui évoluent… Un roman feel good qui rappelle combien l’amour peut prendre différentes formes mais joue toujours selon ses propres lois.

Extrait : « Certaines histoires se racontent dans le noir. Il y a celles qui font peur, où le personnage est poursuivi dans les bois. Les policiers, où un groupe de suspects se retrouve pris au piège. Mais les histoires d’amour aussi peuvent briller lorsque les lumières sont éteintes. »

Un roman français : Les jours suivants de Caroline Sers (Calmann-Levy)

Sans doute le roman le plus introspectif de cette sélection tant il est, en partie, plausible. Parfois, au cours de votre lecture, vous vous surprendrez à vérifier que l’électricité fonctionne encore ou, si le courant est coupé, à vous projeter dans une situation similaire à celle que vivent nos protagonistes. Le personnage principal s’appelle Pierre. C’est un citadin qui s’est réfugié à la campagne après un burn-out, un néorural comme on les appelle aujourd’hui. Petit à petit, il s’est resociabilisé autour du café associatif du village, s’y est fait des amis. Quand un jour, plus de courant. Les heures passent, puis les jours, les semaines… L’isolement choisi devient subi. « Comment passer ce temps qui d’ordinaire était avalé par le travail, les écrans, les courses ? »

Au cœur de ce roman, la psyché des uns et des autres. Au-delà de la nécessité, nourriture, chauffage, mobilité…, la survie ne passe-t-elle pas par les autres, même pour les plus solitaires d’entre nous ?

Extrait :  » On est dans un vrai roman, je vous préviens ! Ce qui cause tous ces problèmes, c’est un piratage de grande ampleur auquel personne ne sait comment répondre. »

Un polar : Black-out de Marc Elsberg

Puisqu’on parle de piratage… En une vingtaine de minutes un vendredi, tout le réseau électrique européen tombe : l’Italie en premier puis la Suède, la Norvège, la Finlande, la Suisse, le Danemark, la France, l’Autriche, la Slovénie, la Croatie, la Serbie, la Pologne, la République tchèque, la Hongrie, l’Allemagne… D’un seul coup, la signalisation s’éteint, provoquant des carambolages mortels. Des gens se retrouvent coincés dans les métros, les ascenseurs. Et l’horreur ne fait que commencer. Suivront 12 jours d’enfer où les dirigeants des pays tenteront de sauver ceux qui peuvent l’être de la famine, du froid, du manque d’eau, des fuites radioactives des centrales dont les systèmes de refroidissement des réacteurs tombent un à un… Des catastrophes en série causées par un piratage monstre mis au jour par Piero Manzano, un hacker italien. Ennemis ou alliés… Il se lancera avec Interpol dans une course effrénée pour traquer les cyberterroristes qui ont déjà sur la conscience des millions de victimes.

Le cauchemar prend réalité tant ce thriller est proche du scénario qui se joue actuellement en raison de la libéralisation du marché de l’électricité, les terroristes en moins. Au point que l’auteur autrichien rappelle en postface que le livre est une fiction même s’il a obtenu le prix allemand du livre scientifique le plus captivant en 2012 et qu’il est régulièrement convié comme expert par de très nombreux organismes politiques internationaux. « Si ‘Black-out’, en plus de quelques heures captivantes, pouvait vous transmettre quelques connaissances ou n’être qu’une petite incitation à réfléchir, je m’en réjouirais », écrit-il.

Extrait : « Imaginez-vous le réseau électrique comme la circulation sanguine d’un être humain, expliqua Bädersdorf. Avec une différence toutefois : il n’y a pas un mais plusieurs cœurs. Il s’agit des centrales. Depuis celles-là, le courant est réparti dans tout le pays comme le sang dans le corps. [..] Pour conserver sa stabilité au réseau, la fréquence doit être constante. Comparons ça avec la pression sanguine chez l’homme. Si elle devient trop haute, ou trop basse, on tombe dans les pommes. C’est ce qui s’est passé avec le réseau électrique. »

Bonnes lectures !


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