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Climat: Greta Thunberg à Davos, Antonio Guterres charge les majors pétrolières

De retour dans la station de ski suisse à l’occasion du Forum économique mondial, la jeune militante suédoise Greta Thunberg doit notamment débattre avec le directeur général de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Le « grand mensonge » des pétroliers sur le climat doit être puni comme pour le tabac, exhorte de son côté le chef de l’ONU, qui multiplie les sorties alarmantes sur le réchauffement planétaire.

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« Traiter la crise climatique comme une crise » : c’est l’intitulé de la « conversation » organisée à 11h15 (10h15 GMT) en marge de la réunion du Forum économique mondial cette semaine dans la station de ski suisse, et à laquelle participe la Suédoise avec l’Équatorienne d’Amazonie Helena Gualinga, l’Ougandaise Vanessa Nakate et l’Allemande Luisa Neubauer.

Au menu de la discussion, à laquelle est également invité le directeur général de l’AIE, Fatih Birol : « La question de savoir si les gouvernements et les entreprises répondent de manière adéquate à la crise climatique, l’état de la transition vers les énergies propres, les appels à arrêter les nouveaux investissements dans les énergies fossiles, et ce qui doit être fait pour limiter le réchauffement de la planète à 1,5 degré », détaillent les organisateurs.

Les quatre jeunes militantes arrivent à Davos avec une pétition lancée cette semaine et réclamant l’arrêt par les multinationales de l’exploitation des énergies fossiles. Le texte avait réuni plus de 870 000 signatures mercredi soir.

« La maison brûle »

« Il faut que le pétrole reste en terre », avait indiqué plus tôt cette semaine Helena Gualinga dans un entretien avec l’AFP. « Nous venons d’endroits différents dans le monde, mais nous avons la même proposition. C’est un appel à dire « il y en a marre ! », marre parce que nous l’avons dit plusieurs fois, nous avons besoin d’une action urgente. »

« Si vous n’agissez pas immédiatement, soyez prévenus que des citoyens du monde entier envisageront des actions légales pour vous mettre face à vos responsabilités. Et nous continuerons à manifester en grand nombre dans les rues », proclame la pétition, qui copie l’apparence d’une mise en demeure judiciaire.

Ce n’est pas la première fois que Greta Thunberg vient à Davos pendant la réunion du Forum économique mondial. L’édition 2020 avait notamment été marquée par ses passes d’armes avec le président américain Donald Trump.

Il est temps de « paniquer » parce que « la maison brûle », martelait-elle déjà à l’époque.

Plus tôt cette semaine, elle était allée soutenir des manifestants qui s’opposaient à l’extension d’une mine de charbon, à Lützerath, dans l’ouest de l’Allemagne.

À lire aussi : Manifestations anti-charbon en Allemagne: clap de fin à Lützerath

Cette initiative lui a valu quelques heures de garde à vue mardi, selon une source policière. « La protection du climat n’est pas un crime », avait-elle tweeté ensuite. L’ancien vice-président américain et militant écologiste Al Gore s’est dit, mercredi, « en accord » avec son combat.

Greta Thunberg est emmenée par les forces de l'ordre, à Lützerath (Allemagne), le 17 janvier 2023.
Greta Thunberg est emmenée par les forces de l’ordre, à Lützerath (Allemagne), le 17 janvier 2023. REUTERS – WOLFGANG RATTAY

Guterres veut des sanctions contre les majors pétrolières

Le climat est un sujet phare à la réunion de Davos cette année. Mercredi, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a déjà appelé à poursuivre les majors pétrolières, comme les cigarettiers l’ont été, pour avoir caché pendant des années les informations dont elles disposaient sur le réchauffement climatique.

« Certains producteurs d’énergies fossiles étaient parfaitement conscients dans les années 1970 que leur produit phare allait faire brûler la planète », a-t-il affirmé dans un discours. « Mais, comme l’industrie du tabac, ils ont fait peu de cas de leur propre science », a-t-il ajouté en déduisant que « certains géants pétroliers ont colporté le grand mensonge ».

Dès les années 1980, la compagnie pétrolière américaine ExxonMobil disposait de prédictions sur le réchauffement climatique d’une justesse remarquable, réalisées par ses propres scientifiques, et qui se sont révélées être précisément ce qui s’est produit plusieurs décennies plus tard, a confirmé une étude parue jeudi dans la prestigieuse revue Science.

Or l’entreprise a, pendant des années, publiquement jeté le doute sur l’état des connaissances scientifiques en la matière, a également souligné cette publication.

Après la parution dans la revue Science, un porte-parole d’ExxonMobil a déclaré à l’AFP que « cette question » avait « fait plusieurs fois surface ces dernières années », ajoutant qu’« à chaque fois, notre réponse est la même : ceux qui évoquent ce qu' »Exxon savait » ont faux dans leurs conclusions ».

Selon Antonio Guterres, « les responsables doivent être poursuivis » comme les cigarettiers l’ont été. Une référence aux 246 milliards de dollars que les géants du tabac aux États-Unis avaient accepté de payer en 1998 à 46 États sur une période de 25 ans, afin de couvrir les coûts engagés pour soigner d’anciens fumeurs. « Aujourd’hui, les producteurs de combustibles fossiles et ceux qui les soutiennent continuent de se battre pour accroître la production, tout en sachant pertinemment que leur modèle économique est incompatible avec la survie de l’humanité. »

Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres à Davos, le 18 janvier 2023.
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres à Davos, le 18 janvier 2023. REUTERS – ARND WIEGMANN

« Je n’ai pas des scientifiques du climat chez TotalEnergies »

Depuis plusieurs années déjà, le groupe ExxonMobil est accusé d’avoir eu un double discours sur le réchauffement du climat provoqué par les immenses quantités de gaz à effet de serre rejetées par l’humanité dans l’atmosphère, notamment via la combustion de charbon et de pétrole pour produire de l’énergie.

Interrogé sur le sujet par la chaîne française BFM Business à Davos, le patron du géant français des hydrocarbures TotalEnergies, Patrick Pouyanné, a affirmé que son groupe ne « savait rien du tout ». « Moi, je n’ai pas des scientifiques du climat chez TotalEnergies », a-t-il dit.

« La première chose que j’aimerais voir maintenant serait les entreprises du secteur pétrolier et gazier rejoindre les autres groupes exerçant une activité critique, dont beaucoup travaillent ici de manière diligente pour tenter de régler la crise climatique », a déclaré à l’AFP l’envoyé spécial des États-Unis sur le changement climatique, John Kerry.

L’ancien vice-président américain et militant pour le climat Al Gore, également présent en Suisse, s’est montré plus direct : « Les industries du pétrole, du gaz et du charbon combattent bec et ongles toute législation en faveur du climat au niveau national, régional, local, et municipal » et utilisent « leur influence politique et leur fortune pour empêcher les progrès », a-t-il accusé.

Jeudi dernier, l’Organisation météorologique mondiale a confirmé que les huit dernières années avaient été les plus chaudes jamais enregistrées.

(Avec AFP)


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