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Les exosquelettes entrent timidement dans les usines

Iron Man, Robocop, Avatar… Hollywood raffole des exosquelettes. A son tour, l’industrie commence à tester ces solutions destinées à assister, soutenir ou prêter main-forte à l’homme au travail. Rien à voir donc avec les costumes d’Avengers. Concrètement, un exosquelette industriel peut accompagner l’opérateur en posture assise, debout, accroupie, penchée sur une table de drapage, les bras en l’air, l’aider à porter des sacs de ciment, des pièces mécaniques, un outil… Ils sont encore le plus souvent « passifs », c’est-à-dire sans moteurs ni batteries et fonctionnant par retour d’effort de ressorts et d’élastiques. Selon Claude Gimenez, qui suit ce dossier chez Airbus, ces modèles « passifs » couvrent 60 % des besoins. Les modèles «actifs », ou motorisés sont encore en phase expérimentale. 

Points de vigilance

« Nous visons des équipements qui se mettent en une minute et qui s’enlèvent en moins de 30 secondes », mentionne Benoît Sagot-Duvauroux, responsable de la marque Gobio. « La règle est de ne pas excéder 10 % du poids de celui qui le porte. » Selon cet expert, la notion d’acceptabilité est également essentielle. L’homme « augmenté » ou « préservé » doit se sentir valorisé et non pas la risée de ses collègues.

Anticipant l’émergence potentielle du marché, l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) a rédigé plusieurs publications sur les bonnes questions à se poser et les points de vigilance liés aux exosquelettes. « Cela exige une démarche structurée, une définition des besoins et de l’adéquation entre l’appareil, l’opérateur et la spécificité de sa tache », note Laurent Kerangueven, ergonome à l’INRS. 

Customisation

Le CEA List, à Saclay s’y est intéressé très tôt à des fins militaires, médicales mais aussi industrielles. Le laboratoire travaille en particulier, avec un abattoir des Pays de la Loire et la société RB3D, sur un exosquelette renforçant les membres supérieurs de l’opérateur chargé de découper des pièces de bovins, là ou un cobot suffit pour les carcasses de porc. « Le marché se développe au fur et à mesure des cas d’usage, la partie customisation est donc encore assez poussée », mentionne Philippe Watteau, directeur des partenariats industriel au CEA Tech qui prédit l’arrivée de modèles de plus en plus génériques, aptes à une plus grande diversité de tâches en faisant appel aux technologies de l’intelligence artificielle.

Prix à la baisse

Les pistes explorées par le CEA List tendent donc vers une meilleure compréhension, par les exosquelettes, de leur environnement avec des algorithmes de détection d’intention, d’apprentissage de gestes pour des mouvements plus fluides. « Le but est que la personne sente de moins en moins qu’elle est habillée de cet exosquelette », poursuit Philippe Watteau qui croit fermement à un développement du marché.

Selon l’expert, les prix ont été divisés par trois en cinq ans. les maladies de types TMS et la souffrance au travail en général sont de moins en moins acceptées. Le cabinet de conseil stratégique ABI Research estime à plus de 100.000 appareils le marché annuel à l’horizon 2025. On en est encore loin mais, déjà, le sujet mobilise de nombreux acteurs tels les français Gobio, RB3D, BMR, Ortaer, Comau ou, à l’étranger, Ekso, Levitate, Skelex ou Labeo. Les grands groupes industriels testent, explorent ou tentent d’adapter à leurs besoins ces solutions.  L’heure n’est pas encore au déploiement de masse

Exosquelette ou cobot ?

Certains se montrent sceptiques sur un tel essor. C’est le cas Alexis Girin, responsable de l’équipe cobotique à l’Institue de recherche technologique (IRT) Jules Verne. « Le concept général de l’usine du futur est de recentrer l’homme sur des tâches à forte valeur ajoutée faisant appel à son intelligence et à son adaptabilité et non pas à sa force et à son endurance », soutient et expert.

Selon lui, il est donc absurde d’équiper huit heures par jour un opérateur d’un exosquelette intégral coûteux pour une tâche qui ne représente que 15 à 20 % de son temps de travail. « Mieux vaut dans ce cas utiliser un cobot avec équilibreur de charge », dit-il, s’amusant de voir Sigourney Weaver, dans « Alien 2 », équipée d’un exosquelette hypersophistiqué pour « porter des caisses ».

Vidéo – Un exosquelette face au handicap


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