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Uber, Deliveroo : vers un statut spécial pour les indépendants

Une charte de protection sociale contre l’assurance de ne pas avoir à ferrailler devant le juge : c’est, en substance, le « contrat » qui va être proposé aux plates-formes Internet de type Uber ou Deliveroo cette semaine à l’occasion de l’examen en séance plénière à l’Assemblée nationale du projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » . Un amendement déposé par la majorité va leur proposer de coucher noir sur blanc leurs engagements vis-à-vis de leurs travailleurs et écarter ainsi le risque de se voir imposer de les embaucher.

Présenté par l’un des rapporteurs du texte, le député En marche Aurélien Taché (Val-d’Oise), cet amendement risque de faire parler de lui puisqu’il pose les jalons d’un « statut » des travailleurs de plates-formes, entre la quasi-no man’s land actuel et la convention collective des salariés. « La réforme pose la base de l’universalité des droits. Cet amendement est un marqueur idéologique clair de la vision sociale du macronisme », déclare-t-il aux « Echos », estimant qu’il peut créer 1 million d’emplois supplémentaire.

Enjeux de protection sociale

L’importance qu’ont pris les plate-formes Internet est allée de pair avec les enjeux de protection sociale des travailleurs qui délivrent les services, dont une partie exercent dans une relation de quasi-dépendance (on en compte 1 million en France, autoentrepreneurs pour la plupart). Plusieurs affaires ont défrayé la chronique, comme à Londres avec Uber. Avec, en toile de fond pour les plates-formes, la crainte qu’un tribunal ne requalifie le contrat de prestation en contrat de travail.

La loi El Khomri a jeté les bases d’une protection de ces travailleurs indépendants mais l’exécutif a fait le constat que son application est restée quasi lettre morte. Après des mois d’une négociation difficile, le ministère du Travail a atterri sur un modèle, unique au monde estime-t-il, de double protection.

Pas de lien de subordination juridique

Protection du travailleur d’abord, puisque l’amendement stipule qu’une plate-forme « peut établir » une charte de responsabilité sociale couvrant les conditions d’exercice des prestations (garantie de non-exclusivité, revenu décent, prévention, conditions de rupture…) En échange de quoi, le modèle économique de la plate-forme est sécurisé juridiquement puisque l’établissement et le respect de cette charte « ne peuvent caractériser l’existence d’un lien de subordination juridique ».

La majorité va plus loin puisqu’au-delà d’un certain seuil de chiffre d’affaires, le compte personnel de formation (CPF) du travailleur sera abondé comme celui d’un salarié (500 euros par an avec un plafond de 5.000 euros). « Les plates-formes permettent d’accéder à un travail à  des publics qui en sont souvent éloignés mais l’idée est bien de ne pas faire cela toute sa vie », explique-t-on au sein du ministère du Travail.

Les tenants d’une contribution chômage imposée aux plates-formes en seront donc pour leurs frais en revanche. Le texte en reste à la mise en place d’une  allocation forfaitaire et limitée dans le temps payée par l’impôt et obéissant à des critères précis d’éligibilité pour les autres indépendants.

Reste la question des accidents du travail qui pourrait donner lieu à un autre amendement pour revoir ce que prévoit la loi El Khomri, jugée inapplicable.


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