EconomieIndustrie - Services

Les plus vieux baobabs d’Afrique meurent les uns après les autres

Environ 432 ans av. J-C, à l’époque de Socrate et de Périclès, « Panke » naissait dans ce qui est aujourd’hui appelé le Zimbabwe. Au fur et à mesure de sa lente pousse dans cette région aride, l’Empire romain s’est étendu puis effondré, le Moyen-Âge a donné naissance à Charlemagne et à Jeanne d’Arc, l’homme a inventé l’imprimerie, l’ampoule électrique, puis les voitures… Enfin, en 2011, Panke s’est effondré.

Le baobab le plus vieux d’Afrique, âgé de 2.450 ans, n’est pas seul de son espèce à s’être éteint subitement. Une étude  parue dans la revue « Nature Plants » rapporte que 9 des 13 plus vieux et 5 des 6 plus gros baobabs sont morts au cours des douze dernières années.

« Il est choquant et spectaculaire d’assister au cours de notre vie à la disparition de tant d’arbres d’âges millénaires », souligne le coauteur de l’étude, Adrian Patrut de l’université Babes-Bolyai en Roumanie.

Des arbres creux dotés de multiples troncs

Les baobabs, appelés « arbres à palabres » et sacrés dans de nombreuses cultures, sont une des silhouettes les plus emblématiques des savanes arides. Contrairement aux arbres classiques, il est difficile d’estimer leur âge par dendrochronologie, c’est-à-dire en analysant les anneaux de leur tronc.

Tout au long de sa vie, le baobab va en effet produire de nouveaux troncs, là où d’autres espèces produisent des branches. Ces tiges ou troncs, souvent d’âges divers, fusionnent ensuite ensemble. Cela forme une grande cavité entre les différents troncs.

« La cavité d’un vieux baobab du Zimbabwe est si grande que près de 40 personnes peuvent s’y abriter », souligne le site internet du parc national Kruger en Afrique du Sud. Ils ont déjà été utilisés comme magasin, comme prison ou plus simplement comme arrêt de bus.

Le « Platland Baobab » en Afrique du Sud, plus connu sous le nom de « Platland Baobab », a d’ailleurs longtemps abrité un bar et une cave à vin. Plus gros baobab du monde avec un tronc de plus de dix mètres de diamètre et un volume total de bois de 501 m3, il a accueilli jusqu’à une soixantaine de personnes à la fois.

Une situation « d’une ampleur sans précédent »

C’est grâce à la datation au carbone, en analysant des échantillons de différentes parties de l’arbre, que les scientifiques ont pu estimer l’âge des baobabs – qu’ils soient morts ou vivants – lors de cette étude.

Entre 2005 et 2017, Adrian Patrut et ses collègues ont étudié tous les plus grands (et donc généralement les plus vieux) baobabs d’Afrique, plus de 60 en tout. Leur quête les a amenés au Zimbabwe, en Afrique du Sud, en Namibie, au Mozambique, au Bostwana et en Zambie.

« Avant de commencer nos recherches, nous avions été informés de l’effondrement du baobab Grootboom en Namibie mais nous pensions que c’était un événement isolé », rapporte Adrian Patrut.

Les chercheurs ont découvert cette situation « d’une ampleur sans précédent » presque par hasard : ils étudiaient la structure de ces arbres pour percer le secret de leurs incroyables mensurations et de leur longévité record.

Parmi les victimes, trois monstres symboliques : Panke, donc, originaire du Zimbabwe (2450 ans), l’arbre de Platland, qui abritait son bar mythique (1100 ans) et le célèbre « Chapman » du Botswana, sur lequel Livingstone grava ses initiales, classé monument national (1400 ans).

La faute au dérèglement climatique ?

Les raisons de cette hécatombe parmi ces arbres millénaires ne sont pas encore claires. Les chercheurs évoquent le dérèglement climatique comme cause possible cause. « Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, les grands baobabs d’Afrique australe ont commencé à mourir, mais depuis 10 à 15 ans, leur disparition a rapidement augmenté à cause des températures très élevées et de la sécheresse », avance Adrian Patrut.

« Ces décès n’ont pas été causés par une épidémie », affirment les auteurs qui suggèrent que le changement climatique pourrait affecter la capacité du baobab à survivre dans son habitat même si « d’autres recherches seront nécessaires pour soutenir ou réfuter cette hypothèse ».

Il ne faut pas oublier, remarque Adrian Patrut, que « la région dans laquelle les baobabs millénaires sont morts est l’une de celles où le réchauffement est le plus rapide en Afrique ».


Continuer à lire sur le site d’origine