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Le scandale des enfants espions au Royaume-Uni

Leur histoire aurait pu rester secrète et connue des seuls services de renseignement et de police britannique. Mais quand le Home Office, le ministère de l’intérieur britannique, propose de prolonger les services d’une brigade d’ espions un peu particulière, c’est la stupéfaction chez les députés. Des mineurs sont recrutés pour des opérations secrètes sous couverture contre des terroristes, des gangs et des trafiquants de drogue !

C’est une proposition du Home Office de prolonger de 1 à 4 mois la durée de mobilisation de ces jeunes « sources secrètes de renseignements humain » qui a mis au jour cette pratique.  Le gouvernement , qui voulait accélérer leur réenregistrement, pour s’assurer qu’ils ne courent aucun danger, autant physique que psychologique, se retrouve désormais à devoir défendre la pratique elle-même, après qu’un amendement a été déposé par l’opposition.

Dans la foulée de ces révélations, une commission d’enquête a également été mise sur pied par  la Chambre des lords pour « disposer d’éléments de compréhension clairs des objectifs des services de sécurité ».

Une amnistie qui dérange

La plupart du temps ces mineurs sont recrutés après avoir été arrêtés par les services de police. Et en échange d’une amnistie, ils doivent recueillir des informations sur le fonctionnement du gang pour lequel il travaille. Réseaux de prostitutions, trafiquants de drogue ou même des opérations antiterroriste, ces jeunes seraient utilisés dans « un éventail croissant de situations » d’après le rapport remis par la Chambre des lords.

Le ministre de l’Intérieur Ben Wallace, qui défend le dispositif, explique qu’« il peut être difficile de recueillir des preuves sur les gangs sans infiltrer leurs membres grâce aux mineurs CHIS (covert human intelligence sources, sources secrètes de renseignement). Les mineurs CHIS peuvent fournir aux enquêteurs un meilleur aperçu, par exemple, de la façon dont les jeunes communiquent entre eux dans les gangs ».

Les droits de l’enfant en question

Le rapport de la Chambre des lords donne cependant peu d’éléments pour évaluer l’ampleur du dispositif. Le nombre de mineurs participants est tenu secret, mais ils seraient plus de 2.300 à avoir été sous couverture en 2017. Les hauts fonctionnaires qui ont répondu aux questions des Lords ont précisé que certains pouvaient même être âgés de moins de 16 ans.

Le dispositif suscite un tollé dans la sphère politique et chez les associations de défense des droits humains qui tentent de faire avorter le dispositif. « Enrôler des enfants soldats dans les coins les plus sombres du maintien de l’ordre et les exposer intentionnellement à des réseaux terroristes, criminels ou d’abus sexuels – potentiellement sans l’accord de leurs parents – va directement à l’encontre des obligations du gouvernement en matière de droits de l’homme, qui place l’intérêt des enfants au coeur des décisions qui les affectent », dénonce Rosalind Comyn, responsable juridique de l’organisation Rights Watch.

Samir Touzani


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