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Christophe Castaner, maire identitaire de Forcalquier

Forcalquier, 5.000 habitants retirés de l’agitation urbaine dans les Alpes-de-Haute-Provence, à l’arrière du littoral méditerranéen. C’est dans cette commune bâtie vers le VIIe siècle sur un piton rocheux que Christophe Castaner, délégué général de La République En marche et secrétaire d’Etat aux Relations avec le Parlement, a exercé pendant seize ans son mandat de maire. « De loin l’expérience politique qui m’a le plus marqué, car directement connectée à l’action », explique ce socialiste devenu l’un des plus fidèles  lieutenants d’Emmanuel Macron .

C’est dans cette ancienne capitale moyenâgeuse du comté de Provence, dont il a raflé la mairie en 2001 (avant de décrocher la vice-présidence de la région Sud en 2004), que ce touche-à-tout (diplômé en droit international, il a été serveur, maçon, magasinier, chauffeur livreur et journaliste pigiste) a aussi expérimenté de nouvelles façons de vivre ensemble. « Etre maire, c’est construire de l’unité », exprime celui que beaucoup verraient à la tête de Marseille à l’occasion des prochaines échéances.

Interdit d’afficher

Dans « sa » ville, il expérimente, presque malgré lui. « J’étais poussé par le contexte : défendre le patrimoine local, écouter la contestation, construire un monde meilleur pour les jeunes… » Un 8 mai, les panneaux d’affichage sont détournés par des contestataires gauchistes qui manifestent contre le consumérisme. C’est une révélation. « Marx se trompait en affirmant qu’il fallait des élites pour gouverner le peuple. Il faut des acteurs qui portent la parole et l’aspiration d’un territoire. » Marqué par cet événement, « Casta », décide alors d’emboîter le pas de ses opposants et  d’interdire l’affichage publicitaire en ville .

C’est une première. Dans son délibéré du 11 mai 2011, la municipalité produit les bases d’une révolution qui a depuis gagné Grenoble : créer dans l’agglomération des « zones de publicité restreinte » réglementant l’affichage, les dispositifs scellés au sol, les abris voyageurs et même les enseignes murales. Incompréhension et colère des commerçants.

Puis, après les polémiques, la fierté d’être pionnier. « Le rapport au temps, au terrain, et la construction de l’acceptabilité sont des données essentielles en politique, exprime le nouveau chef de file de la majorité. Il faut savoir avancer avec le terrain et construire son raisonnement par rapport à l’acceptabilité. »

Ambitions territoriales

Pour expérimenter, Christophe Castaner s’entoure d’une équipe d’ingénieurs et de managers de territoire. Avec elle, il lève des fonds européens et transforme la cité. La vieille ville est rénovée, une Maison des métiers du livre voit le jour pour accueillir éditeurs, imprimeurs et graphistes, il décroche le label pôle d’excellence rurale, crée une Université européenne des senteurs et des saveurs dans un ancien couvent qui accueille un master et des visiteurs du monde entier, et obtient même le label pôle de compétitivité Parfums Arômes Senteurs pour son territoire. « Patrimoine, senteur, écriture… Nos actions ont puisé dans notre identité pour parler aux sens », résume l’ancien maire, qui est encore conseiller municipal.

Mais c’est surtout dans le domaine de l’environnement qu’il veut marquer le terrain. Dès 2003, la commune interdit aux agriculteurs d’utiliser le Gaucho et le Régent, puis supprime l’utilisation des produits phytosanitaires, généralise le bio dans les crèches et les cantines scolaires, installe un marché paysan et un Village vert, espace d’animation, de commerces et de bureau qui promeut le modèle de consommation responsable à Forcalquier. « Cette démarche a permis l’installation d’une trentaine de jeunes agriculteurs », revendique Christophe Castaner.

Des contestations locales

Pour les fixer, la commune est partenaire de Terre de Liens, une association qui oeuvre pour la préservation du foncier agricole. La convention signée avec la ville inclut un engagement moral « pour la protection de l’environnement en assurant la promotion de l’agriculture biologique », et une anticipation des besoins agricoles. Le dernier Plan local d’urbanisme, voté en décembre, consacre ainsi une part plus importante à l’agriculture et à la nature : 4.043 hectares en 2017 contre 3.920 dans le PLU de 2007. Mais l’opposition cingle : elle dénonce le déclassement de 2 hectares de terres agricoles pour permettre l’extension d’un supermarché, un serpent de mer datant du premier mandat de Christophe Castaner. En 2015, l’Union des commerçants et artisans de Forcalquier était parvenue à faire casser le PLU qui prévoyait déjà cette requalification.


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