EconomiePME - Régions

Textiles : les Salons passés de mode cherchent la martingale

En septembre, à l’approche de la  Fashion Week , Paris est en effervescence. Toute la planète mode défile dans la capitale, d’un Salon de prêt-à-porter à l’autre, en attendant les podiums de la haute couture à partir du 25. Oui, mais voilà : depuis plusieurs années, la fréquentation de ces grands-messes de  l’industrie textile décline. Certains événements ont dû baisser le rideau : Capsule, The Box, Paris sur Mode… Les grandes manoeuvres en cours chez deux grands organisateurs de la place, WSN Développement et Tranoï, trahissent une grande fébrilité et l’urgence de réinventer un format passé de mode.

Les Salons textiles subissent de plein fouet  la crise de l’habillement , dont la part dans la consommation des ménages a reculé de 14 % en valeur entre 2007 et 2016. L’Institut français de la mode a encore mesuré un recul du chiffre d’affaires des distributeurs (environ 28 milliards d’euros) de 2,3 % depuis le début de l’année. Et même 3,4 % pour les seuls magasins physiques. Le commerce de détail souffre, à commencer par les indépendants multimarques, « dont la moitié auraient disparu en quinze ans », selon Frédéric Maus, directeur de WSN, l’organisateur de Who’s Next et Première Classe. Or ce sont eux les visiteurs et acheteurs des Salons, en quête du dressing idéal – et non les grandes enseignes avec leurs magasins en propre ou en franchise.

Ils ne seraient plus que 20.000 en France : encore 60 % en nombre de pas-de-porte selon Les Echos de la franchise, mais beaucoup moins en valeur face aux géants de l’habillement. Et leur équilibre est de plus en plus menacé par l’e-commerce vestimentaire, qui atteint désormais 16,5 % du marché (+ 6,1 % en 2017).

De 2 à 4 collections par an

« Trop de marques, moins de clients : les Salons sont pris dans un effet ciseaux, estime Patricia Romatet de l’IFM, qui les oblige à une remise en cause globale de leur modèle. » C’est la ruée sur le digital. WSN a débauché en janvier Frédéric Maus, responsable du développement de la marketplace de La Redoute. Et avec un temps de retard sur des pure players B to B anglo-saxons, Joor ou NewBlack, on voit fleurir des plates-formes marchandes chez Playtime (Salon de mode enfant), Tranoï et Première Vision, pour capter les acheteurs du 1er janvier au 31 décembre, et non plus quelques journées par an.

Le calendrier de la mode ne correspond plus à celui des Salons biannuels, restés calqués sur un ancien patron. «  Avant, il y avait deux collections par an, l’été et l’hiver. Aujourd’hui, avec les précollections qui se généralisent, on n’est pas loin de quatre. Des marques comme  Chanel sont même arrivées à neuf  », explique Gilles Lasbordes, de Première Vision, leader mondial de l’amont de la mode (tissus et composants).

Instagram

Certaines marques feraient désormais l’essentiel de leur chiffre d’affaires avec ces précollections. Chez Tranoï, qui leur avait consacré le premier rendez-vous dédié (Preview, en 2013), on a tergiversé et finalement opté pour un Salon mixte durant la semaine de l’homme, en agrégeant au vestiaire masculin (l’hiver en janvier, l’été en juin) des précollections femme, «  destinées à arriver en boutique avant les soldes, avec une meilleure valeur ajoutée pour les magasins ».

Chez Eurovet, organisateur de Salons  lingerie et d’articles de sport, on a une autre stratégie : se rapprocher du grand public. Sa filiale Sportair a racheté Like That, agence événementielle annecienne, organisatrice de shows dans les stations de ski. «  Mais on peine à trouver nos synergies, reconnaît Mathieu Kurtz. Car il serait malvenu d’ouvrir le salon B to B aux consommateurs : on ne pourrait présenter les produits de l’année suivante aux particuliers alors que les boutiques ont encore en stock tous ceux de l’année en cours.  » Côté  maillots de bai n, le Salon Unique ouvrira un espace grand public en juillet 2019, mais séparé du pré carré professionnel.

« Trop longtemps, les Salons ont vivoté en se rachetant les uns les autres , regrette Frédéric Maus. C’était facile tant qu’il n’y avait qu’eux pour faire se rencontre les créateurs et les acheteurs : ils pouvaient représenter 80 à 100 % du chiffre d’affaires des marques.  » Mais ce temps est révolu : Internet a court-circuité leur monopole, et aujourd’hui des jeunes marques naissent sur Instagram ! Tous les acteurs se démènent donc pour retrouver leur place au centre du jeu : digitalisation, diversification, séduction, promesse de valeur ajoutée, ou comment se rendre de nouveau indispensables…


Continuer à lire sur le site d’origine