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Pourquoi l’activité des hôpitaux va décélérer

Alors que le projet de loi de financement de la Sécurité sociale affiche un objectif de croissance des dépenses hospitalières de 2,4 % pour 2019, en hausse par rapport à 2018, le cabinet Roland Berger publie une étude commandée par la Fédération de l’hospitalisation privée, qui intéressera tous les acteurs du secteur. Elle plaide pour que le gouvernement augmente de 1 % par an les prix remboursés aux établissements publics et privés pendant trois ans. Depuis 2014, ils n’ont cessé de diminuer.

« Les baisses de tarifs hospitaliers des dernières années ont permis d’ajuster de façon simpliste l’évolution des dépenses, argumente Patrice Biecheler, associé au sein du cabinet. Mais nous pensons que le pilotage uniquement par les prix n’est pas suffisant ; il faut regarder les volumes d’activité. »

Un « effet de saturation »

Ces volumes progressent beaucoup moins vite qu’avant. Le ralentissement de l’activité hospitalière en 2017 a pris tout le monde de court. Selon Patrice Biecheler, qui a compilé les chiffres des cliniques, du ministère et obtenu des données inédites de l’Assurance-maladie, la tendance en 2018 est une croissance de 0,6 %, alors que le volume de séjours a augmenté de 1,3 % par an en moyenne de 2014 à 2017. La progression devrait se stabiliser autour de 0,6 % par an au cours des prochaines années, prévoit Roland Berger.

A cela plusieurs raisons. D’abord, un « effet de saturation » : pour certaines pathologies, le gros des malades a déjà été traité, le pic des dépenses est donc passé. Cela a été spectaculaire dans le cas des traitements innovants contre l’hépatite C. Mais cela vaut aussi pour la chirurgie de la cataracte ou du canal carpien (douleurs articulaires). Par ailleurs, les hospitalisations sans nuitée se développent et les patients cancéreux peuvent prendre leur chimiothérapie par voie orale, à la maison.

Des réhospitalisations limitées

Puis les nouvelles thérapies ou méthodes opératoires permettent de limiter les réhospitalisations : la chirurgie bariatrique fait chuter les séjours pour des maladies en lien avec l’obésité ; l’élimination de l’hépatite C empêche des cancers du foie et des cirrhoses, la lutte contre le tabac et la démocratisation des statines réduisent les accidents vasculaires… Enfin, la baisse de la natalité réduit les séjours dans les maternités, surtout dans le secteur privé.

« Quand on compare les tarifs français aux tarifs européens, la France est toujours en bas du panier », souligne Patrice Biecheler : elle est 150 % moins chère que l’Espagne pour les endoscopies digestives, 71 % à 141 % moins chère que les Pays-Bas ou l’Allemagne pour les prothèses de genou. Un coup de pouce serait d’autant plus nécessaire, selon Roland Berger, que les personnels hospitaliers sont démoralisés, voire en burn-out, après des années de restrictions. Et que l’inflation repart à la hausse.

« Les mesures du plan santé telles que les réorganisations territoriales ou la digitalisation ne produiront des effets que dans cinq à dix ans. En attendant, nous estimons qu’augmenter de 1 % par an les tarifs permettrait d’éviter les défections de médecins, la grogne sociale et les défaillances de cliniques », plaide le consultant. Rendez-vous en mars, quand le gouvernement fixera les tarifs 2019 des établissements.


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