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Les fortes réserves de Pôle emploi face aux demandes des partenaires sociaux

Intensifier l’aide pour tout demandeur d’emploi au bout de quatre de mois de chômage : c’est l’une des demandes phares que les partenaires sociaux ont formulées à Pôle emploi dans le cadre de la négociation de sa convention d’objectifs pour les années 2019-2021. Une demande qui risque de rester lettre morte : y répondre signifie augmenter les effectifs de l’opérateur public à hauteur de 10.000 postes, soit 20 % de plus, peut-on lire dans les documents transmis aux syndicats et au patronat auxquels « Les Echos » ont eu accès.

« Même dans l’hypothèse où cette possibilité ne serait utilisée que par 10 % des demandeurs d’emploi, la charge serait de 1.000 équivalents temps plein annuel travaillé supplémentaires », selon l’opérateur public. Impossible, là encore, compte tenu des coupes dans les rangs imposées par le gouvernement (800 postes cette année, après 600 en 2018). Compte tenu également des obligations issues du plan pauvreté  : dégager 850 postes pour fournir d’ici à 2022 un accompagnement global à 200.000 personnes supplémentaires.

Un « pack de démarrage »

A fortiori, ajoute Pôle emploi, une « approche systématique d’intensification à l’issue d’une période de temps tiendrait insuffisamment compte de la spécificité de chaque situation ». L’opérateur ne ferme pas la porte à un renforcement de l’aide aux chômeurs, mais – fidèle à sa politique – pour « les moins autonomes » et à des « moments clefs », comme une sortie de formation ou une rupture de contrat pour les personnes en activité réduite par exemple.

Deux autres demandes des partenaires sociaux se voient opposer les mêmes arguments de moyens. Primo, établir le diagnostic des besoins et le projet professionnel du chômeur dans les deux semaines maximum qui suivent son inscription. Et secundo, démarrer l’accompagnement à travers le premier contact avec le conseiller référent au cours du premier mois.

L’opérateur public partage l’objectif d’une première prise en charge plus complète et plus personnalisée. Mais pas plus précoce. La solution, plaide-t-il, pourrait prendre la forme d’un « pack de démarrage » d’une ou deux demi-journées en présence du conseiller référent, si le chômeur exprime un besoin d’aide en s’inscrivant. Mais dans un délai comparable à celui de l’entretien de situation actuel, qui intervient en moyenne dans les vingt jours.

Détecter les signes de démobilisation

« Des délais plus courts […] impliqueraient de réaliser de 80.000 à 90.000 entretiens auprès de demandeurs d’emploi qui auraient retrouvé un emploi entre la deuxième et la troisième semaine d’inscription », argumente l’opérateur. Surtout, toutes les demandes d’indemnisation ne seraient pas traitées avant le premier entretien.

La solution passe aussi par un suivi en continu de la situation du demandeur d’emploi pour détecter, le cas échéant, des signes de démobilisation. Pôle emploi mise pour cela sur le journal de bord, une des nouveautés de la loi « Pour la liberté de choisir son avenir professionnel » . Inspirée du modèle danois, l’expérimentation consiste pour la personne à renseigner ses démarches de recherche d’emploi en s’actualisant.

C’est l’une des critiques récurrentes adressée à Pôle emploi : le délai d’accès en formation des chômeurs est passé en moyenne de 11 à 12,4 mois après inscription entre 2014 et 2017. Syndicats et patronat proposent de fixer une cible « ambitieuse » de quatre mois dès l’identification du besoin, y compris pour les chômeurs de longue durée. L’opérateur public est prêt à relever le défi, mais ne s’engage par sur un chiffre. L’identification du besoin étant souvent renseignée de façon rétrospective, il veut que le comptage parte de l’inscription. Il veut surtout limiter son engagement aux nouveaux inscrits. Un indicateur de délai d’entrée en formation universel pourrait engendrer des « effets pervers importants conduisant les agences à refuser des formations aux chômeurs de longue durée » pour éviter de le dégrader.


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