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L’assurance-chômage table sur un fort rebond de l’emploi

La réunion du bureau de l’Unédic jeudi après-midi avait une saveur particulière. L’examen des perspectives financières de moyen terme inscrit à l’ordre du jour intervenait à quelques heures d’une décision de justice cruciale pour l’avenir, à court terme celui-là, du régime d’assurance-chômage : le jugement en référé du Conseil d’Etat sur la demande formulée par presque tous les syndicats de suspendre la réforme des règles d’indemnisation , censées s’appliquer à compter du 1er juillet.

La publication en février d’un premier état des lieux avait montré l’impact de la crise sur les comptes , malgré les prévisions de croissance du PIB relativement optimistes retenues, +5,5 % en 2021 et +3,6 % en 2022, conformément au consensus des économistes d’alors. Changement de pied jeudi avec les dernières prévisions : le consensus n’a que très peu varié en quatre mois mais le tsunami sur l’emploi n’est plus d’actualité. Et la perspective d’un retour à l’équilibre refait surface.

« Sous l’effet conjugué de cette dynamique de l’emploi avec l’arrêt progressif des mesures d’urgence et de soutien à l’économie, la trajectoire de retour à l’équilibre du régime d’assurance chômage se dessine », résume le communiqué de l’Unédic, donnant au passage du grain à moudre à ceux, comme le patron du Medef , Geoffroy Roux de Bézieux, qui pensent que le pire a de bonnes chances d’être évité.

Pertes 2020 effacées

Précisément, l’association paritaire qui gère le régime d’assurance-chômage prévoit 126.000 créations nettes d’emploi cette année, alors qu’il attendait 230.000 suppressions de postes en février ! Pour 2022, l’orientation reste la même, positive, mais l’ampleur est revue à la baisse : +127.000 au lieu de +210.000. L’année suivante, l’emploi salarié augmenterait encore, de 109.000. Soit 362.000 emplois de plus en trois ans, de quoi plus qu’effacer le terrain perdu en 2020.

Côté comptes, le premier semestre est encore fortement marqué par les mesures d’urgence telle que l’activité partielle, dont l’Unedic finance le tiers. Elle s’attend donc à un déficit de 12 milliards d’euros cette année, 2 milliards de plus que prévu en février. Sous l’effet du « fort rebond » de l’économie anticipé dès le second semestre et de la sortie des mesures d’urgence, le trou diminuerait ensuite très fortement. Il se « cantonnerait » à hauteur de 2,4 milliards en 2022, soit 4 milliards de moins qu’attendu en février, et de 0,5 milliard (soit proche de l’équilibre) en 2023.

La dette de l’Unédic s’est envolée

Point important, ces prévisions sont fondées sur l’hypothèse d’une application au 1er juillet 2021 de la réforme qui porte avec elle d’importantes économies dans les dépenses d’allocations à partir de 2022. Une non-application totale ou partielle infléchirait la trajectoire financière, sans toutefois la remettre en cause, précise l’Unédic.

L’amélioration ne doit pas faire oublier qu’avec la crise, la dette de l’Unédic s’est envolée. Elle reste prévue aux alentours de 70 milliards fin 2023. Soit 30 milliards de plus que fin 2019, dont les deux-tiers imputés aux mesures d’urgence. A ce niveau stratosphérique, la Cour des comptes ne pouvait pas se priver d’un paragraphe dans son rapport publié en début de semaine .

Pas assez « contracyclique » pour la Cour des comptes

Ses auteurs ne se mouillent pas trop sur les mesures à prendre pour dégonfler la dette sachant, estiment-ils sans risque de se tromper, que la seule amélioration de la conjoncture n’y suffira pas. A peine ouvrent-ils la voie à une remise en cause du financement de Pôle emploi à qui le régime d’assurance-chômage verse chaque année 11 % de ses recettes de N-2. « Une charge de plus en plus lourde », pointent-ils. Autre piste timidement avancée : un « possible » transfert de dépenses vers l’Etat ou les départements « au titre de la solidarité ».

Le point le plus intéressant du rapport repose sur le fonctionnement général du régime, jugé insuffisamment contracyclique. « S’il doit être suffisamment protecteur pour les demandeurs d’emploi lorsque la conjoncture économique se dégrade, il doit aussi reconstituer ses capacités d’intervention dans les périodes où celle-ci s’améliore, afin d’éviter un endettement insoutenable », estime la Cour.

Ce sujet devrait logiquement figurer en bonne place dans la concertation que le ministère du Travail a promis d’engager avec les partenaires sociaux, mais qui n’a toujours pas démarré.


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