Elections en Turquie : Erdogan en tête d’après des résultats partiels, l’opposition conteste

Dans un bureau de vote d’Ankara, le 24 juin.

Plus de 56 millions d’électeurs turcs étaient appelés aux urnes jusqu’à 16 heures dimanche 24 juin pour les élections présidentielle et législatives. Le chef de l’Etat, Recep Tayyip Erdogan, brigue un nouveau mandat après quinze ans de règne sans partage. Les résultats seront connus en début de soirée et l’opposition dénonce des tentatives de fraude.

Ce double scrutin marque le passage en Turquie d’un système parlementaire à un régime hyperprésidentiel souhaité par M. Erdogan et validé lors d’un référendum en 2017. Mais face à une économie qui se dégrade ces derniers mois, le chef de l’Etat turc, qui avait choisi de convoquer ces élections dix-neuf mois avant la date prévue, est en difficulté.

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  • Le président Erdogan en tête après le dépouillement des deux tiers des bulletins

D’après l’agence de presse étatique Anadolu, le président sortant Erdogan serait en tête de l’élection présidentielle avec 55,5 % des voix au premier tour après que les deux tiers des bulletins de vote ont été dépouillés. Mais ces résultats sont à prendre avec des pincettes. Les premiers chiffres proviennent des zones rurales de la Turquie où M. Erdogan et l’AKP sont historiquement forts.

Le parti Républicain du peuple (CHP, le principal d’opposition turc, de centre gauche), qui avait envoyé des représentants dans la plupart des 180 000 bureaux de vote, a assuré au Monde en début de soirée que les résultats diffusés par l’agence de presse Anadolu étaient faux, et ne correspondaient pas aux décomptes faits par les représentants des partis d’opposition.

Selon le CHP, à 20 heures (heure d’Ankara, 19 heures à Paris), 52 % des votes pour la présidentielle étaient dépouillés et 50 % pour les législatives. Selon leurs chiffres, Recep Tayyip Erdogan aurait reçu 47 % des voix à ce moment là, et Muharrem Ince, le candidat du CHP, 40 %. Le député du CHP Bülent Tezcan dénonce « une manipulation grossière » de l’agence Anadolu qui transmet des résultats « irréels », selon lui.

  • Le parti prokurde HDP à l’Assemblée ?

A Diyarbakir, les responsables du parti prokurde HDP estiment que le seuil des 10 % lui permettant d’entrer à l’Assemblée est acquis. Reste à savoir s’il auront réussi alors que leur appareil partisan est affaibli à capitaliser sur la colère d’une large partie de l’électorat kurde contre le pouvoir pour améliorer leur score des élections de novembre 2015.

Haro Paylan, candidat de la liste HDP à Diyarbakir s’attend à un score entre 11 et 12 % dans le meilleur des cas. La perspective de voir M. Erdogan élu au premier tour suscite en revanche une déception sensible. Dans les rues, autour du siège local du Parti pro-kurde, les manifestations de joie se poursuivent dans l’attente des résultats définitifs et de la confirmation du score qui permettra au HDP de rester au Parlement.

  • L’opposition dénonce des tentatives de fraude

Le principal rival de M. Erdogan, Muharrem Ince, dimanche à Ankara.

Au cours de la journée électorale, le CHP a dénoncé des tentatives de fraude. « De nombreuses plaintes nous sont parvenues », surtout de la province de Sanliurfa (sud-est), a déclaré le porte-parole du CHP (social-démocrate), Bülent Tezcan, lors d’une conférence de presse au siège de son parti à Ankara. « Nos amis sont intervenus au moment où c’est arrivé », a-t-il ajouté.

Il a énuméré plusieurs exemples de tentatives de bourrage d’urnes, avec notamment une urne comptant déjà une centaine de bulletins de vote, tous pour l’alliance dominée par le parti au pouvoir AKP (islamo-conservateur) de M. Erdogan, avant même l’ouverture des bureaux. Il a également diffusé une vidéo, qu’il affirme avoir authentifiée, d’un homme affirmant qu’il y avait plus de bulletins que d’électeurs déjà passés dans un bureau de vote à Suruç.

Le procureur public de Sanliurfa, dont dépend Suruç, a annoncé avoir ouvert une enquête sur ces accusations et quatre personnes ont été arrêtées, selon l’agence de presse étatique Anatolie. Craignant des fraudes, en particulier dans le sud-est à majorité kurde, opposants et ONG ont mobilisé plusieurs centaines de milliers d’observateurs pour surveiller les urnes. « Dans la région, il y a eu des assauts, des menaces pour arrêter nos observateurs », a affirmé M. Tezcan.

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