A la Une

REPORTAGE. Changement climatique : « Le riz ne pousse pas » avec la sécheresse en Chine, inquiétudes sur la sécurité alimentaire

Au nord de la province chinoise du Jiangxi, dans le bassin du fleuve Yangtze, un paysan de 67 ans se déplace au milieu de ses rizières. Après 49 jours consécutifs sans précipitation, pourtant en pleine saison des pluies, la terre est devenue dure comme un roc. « La récolte de cette année n’est pas bonne… Les épis sont vides et les grains de riz ne se forment pas à cause de l’absence de pluie, souffle-t-il. Regardezla terre est très sècheelle est fissurée de partout. » 

>> Canicule, sécheresse… « Qui a encore le luxe de ne pas s’inquiéter ? » : le chercheur François Gemenne a répondu à vos questions sur cet été suffocant

Dans la parcelle voisine, même constat : « Depuis deux mois et demi, il n’y a pas eu de pluie du tout. Le riz ne pousse pas », souffle un  « Par rapport à une année normale, la production de riz sera réduite de deux tiers, estime un autre paysan, Wang Xigong. À ce stade de l’été, c’est trop tard pour rattraper les pertes. Il n’y a pas de remède. »

Chaque année, les agriculteurs chinois découvrent un peu plus les effets du réchauffement climatique. Pour Xu Yinlong, chercheur au sein de l’Académie des sciences agricoles de Pékin, la prise de conscience s’opère lentement : « Dans la zone de Yangtze, les paysans sont habitués à avoir beaucoup de précipitations. Le travail de lutte contre la sécheresse va devoir être renforcé à l’avenir, avec la construction de nouvelles installations hydrauliques, de nouveaux canaux pour transporter l’eau vers les champs et la construction de stations de pompage pour améliorer l’arrosage au goutte à goutte. »

« L’agriculture chinoise est confrontée à une transition inédite. La capacité à résister à la sécheresse est encore insuffisante. »

Xu Yinlong, chercheur à l’Académie des sciences agricoles de Pékin

à franceinfo

Rizières, champs de coton, de lotus… Partout, les réserves d’eau sont au plus bas. Les paysans tentent de faire face, avec de petits moyens. « Cette année, nous avons acheté une petit pompe qui irrigue nos champs, mais c’est insuffisant pour atteindre les terres qui sont plus haut, explique Huang Fangming, agricultrice. Les cultures sont déjà mortes de soif. Les rizières sont mortes. »

Une question préoccupe les autorités : avec l’évolution du climat, la Chine va-t-elle pouvoir continuer à nourrir son 1,4 milliard d’habitants ? C’est une vraie inquiétude pour le chercheur Xu Yinlong. « La sécurité alimentaire de la Chine est une question que l’on surveille en permanence parce que, déjà en temps normal, les ressources agricoles sont insuffisantes pour nourrir tous les habitants, explique le spécialiste. Avec le changement climatique, c’est une problématique qui va devenir encore plus urgente. Il faut trouver de nouvelles terres, notamment dans le nord et l’ouest du pays. Ces régions étaient auparavant trop froides pour être cultivées. Mais, grâce au réchauffement, ces terres vont devenir cultivables », estime le spécialiste. 

Un agriculteur chinois s'inquiète de la sécheresse, en septembre 2022. (SEBASTIEN BERRIOT / RADIO FRANCE)

Un agriculteur chinois s'inquiète de la sécheresse, en septembre 2022. (SEBASTIEN BERRIOT / RADIO FRANCE)

La situation met le gouvernement chinois sous pression. En plus des dégâts alimentaires, le risque est également social dans les campagnes chinoises où le réchauffement fait fondre les revenus des paysans. « Mon mari est handicapé. Si nous ne cultivons pas les champs, nous n’avons pas d’autre moyen pour gagner notre vie », s’inquiète une agricultrice.

« Comment gagner ma vie ? Comment puis-je trouver un autre emploi à mon âge ? Les années précédentes, je pouvais cultiver, vendre le riz et le coton pour me nourrir. Cette année, c’est impossible. »

Un agriculteur chinois

à franceinfo

Face au niveau du fleuve Yangtze, qui a encore baissé cet été dans des proportions jusqu’ici jamais atteintes, les paysans du Jiangxi sont très pessimistes pour les années à venir. Le fleuve alimente toutes les cultures du bassin. « Si ça continue, je pense que beaucoup de rizières vont être abandonnées, déplore un homme. Comment est-il possible que nous ne soyons pas inquiets ? »

En Chine, l’agriculture en péril face au réchauffement climatique : reportage de Sébastien Berriot

écouter


Continuer à lire sur le site France Info