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Ukraine : il y a un risque d’escalade du conflit, avec l’annonce des référendums d’annexion, pointe un ex-ambassadeur de France en Russie

La tenue de référendums d’annexion par la Russie organisés en urgence dans quatre régions d’Ukraine fait planer un risque d’escalade du conflit, a estimé mardi sur franceinfo le chercheur Jean de Gliniasty, directeur de recherche à l’Iris, ancien ambassadeur de France en Russie de 2009 à 2013.

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« Toute menace terrestre sur ces territoires sera considérée comme une menace existentielle pour la Russie« , assure Jean de Gliniasty. Selon lui, Vladimir Poutine « s’ôte toute capacité de négocier l’avenir de ces territoires ».

franceinfo : Est-ce qu’il y a un risque d’escalade avec l’organisation de ces référendums ?

Jean de Gliniasty : Oui. Parce qu’en faisant cela dans des conditions précipitées et en mettant en cause le peu de crédibilité qui restait de ces référendums, il y a le fait que ces référendums vont permettre à la Russie d’intégrer ces territoires. Cela veut dire que la Russie brûle ses vaisseaux. C’est-à-dire qu’elle ne peut plus revenir en arrière et qu’elle annonce, pour l’extérieur, qu’elle défendra ces territoires comme son propre territoire, avec tout ce que cela implique. Toute menace terrestre sur ces territoires sera considérée comme une menace existentielle pour la Russie.

Est-ce que Vladimir Poutine a choisi la fuite en avant ?

D’une certaine façon, oui. Parce qu’il s’ôte toute capacité de négocier l’avenir de ces territoires. Il n’y a plus de négociations possibles. Il y a un message pour l’extérieur, c’est-à-dire « ne touchez pas à ce que nous avons intégré dans notre territoire ». Ça, c’est pour l’extérieur. Et pour l’intérieur, il y a deux choses.

« Il y a d’abord le fait de rassurer les populations qui ont pris le parti de la Russie dans ces territoires. Ils craignent beaucoup une épuration, des difficultés avec les autorités ukrainiennes en cas de reconquête ukrainienne. Là, cela veut dire, « on ne vous lâchera pas ». Et c’est très important. »

Jean de Gliniasty, directeur de recherche à l’Iris

à franceinfo

Et en faisant cela, Poutine donne des gages à son extrême droite nationaliste. On a vu ces derniers temps, à la télévision et ailleurs, des déclarations qui accusent implicitement, parfois explicitement, Poutine d’être trop mou. Là, c’est un danger beaucoup plus important pour Poutine sur le plan de la politique intérieure que la gauche qui est quand même assez évanescente. Donc pour donner des gages à ces gens-là, Poutine dit, on va sécuriser, entre guillemets, les territoires que nous avons occupés.

Est-ce qu’il a les moyens de le faire sans passer par une mobilisation générale ?

La Douma a adopté à l’unanimité un certain nombre d’amendements au Code pénal pour, à la fois durcir les peines contre les déserteurs, et ensuite pour renforcer ce que l’on appelle l’état de guerre. Donc cela donne des marges de manœuvre à Poutine sans décréter la mobilisation générale. Donc, il y a des instruments qui permettent au pouvoir russe d’élargir ses capacités de recrutement, de prendre des mesures autoritaires. Tout cela serait une étape intermédiaire avant la mobilisation générale.


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