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Présidentielle au Brésil : comment le lobby évangéliste s’est installé au cœur du pouvoir

Ses fils le nomment « 01 », expression militaire qui signifie le leader. Ses partisans voient en lui le sauveur de la nation. Ses détracteurs, eux, n’hésitent pas à le traiter de « pourriture« . Le président brésilien Jair Bolsonaro, candidat à sa propre succession, ne laisse personne indifférent et pour cause. Clivant, maniant l’art de la provocation et de l’outrance à l’envi, cet homme politique d’extrême droite n’a cessé de choquer depuis son élection en 2018, avec des discours provocateurs sur la dictature, les femmes, l’homosexualité, les armes à feu ou encore la pandémie. Il a fracturé comme jamais un Brésil déjà très fragile et réveillé ses vieux démons.  

Alors que le premier tour de l’élection présidentielle se tient dimanche 2 octobre, un documentaire, intitulé Jair Bolsonaro, un autre Brésil, réalisé par Laetitia Rossi et Ingrid Piponiot, diffusé à 20h55 sur France 5, retrace le parcours de cet ancien militaire sorti de nulle part, mais qui n’est pas arrivé au pouvoir par hasard. Adepte d’une droite dure et désinhibée, fustigeant sans relâche la pressecontribuant à la destruction des institutions publiques garantissant les droits des autochtones et les droits socio-environnementaux, il a su séduire les élites comme les pauvres grâce en grande partie au lobby évangélique.

En 2018, « Bolsonaro est perçu comme un homme conservateur, témoigne le journaliste Bruno Meyerfeld, auteur du livre Cauchemar brésilien. Un candidat qui porte un discours contre le mariage pour les couples de même sexe, contre l’avortement, pour la foi, la religion, etc. C’est un catholique de naissance mais qui a été baptisé dans les eaux du Jourdain en Israël par un pasteur évangélique et qui, du coup, a réussi à porter ce discours dans un pays très conservateur. » 

Un discours relayé par les pasteurs évangéliques les plus riches et puissants du pays. Après avoir joué un rôle majeur dans l’élection de Jair Bolsonaro en 2018, en appelant leurs 65 millions de fidèles à aller voter pour lui, certains évangélistes ont été remerciés en étant nommé à des postes de choix au gouvernement.

Le puissant lobby évangélique

C’est le cas de Damares Alves, Avocate et pasteure, qui fut de janvier 2019 à mars 2022 ministre de la Femme, de la Famille et des Droits de l’homme. Elle est connue dans tout le pays pour ses propos ultra-conservateurs, et plus particulièrement pour ses prises de position concernant la défense des thérapies de conversion destinées aux homosexuels. Une pratique interdite au Brésil, que le lobby évangélique tente de faire légaliser.

Plus inquiétant encore, la présence d’un pasteur à la tête du ministère de l’Education. « Aujourd’hui, l’éducation brésilienne fait face à une ingérence politique sur des sujets techniques, s’inquiète la sociologue Flavia Rios dans le film. Le gouvernement adapte notamment les manuels scolaires ou les questions du baccalauréat. »

Surtout, les élèves peuvent dénoncer leur professeur (grâce à un numéro d’urgence) s’ils considèrent que les sujets abordés en classe sont trop idéologiques selon les critères du gouvernement. (…) Le professeur est devenu un ennemi de l’Etat. »

Flavia Rios, sociologue

dans « Jair Bolsonaro, un autre Brésil »

Mais le soutien sans faille affiché ces quatre dernières années par les évangélistes commence à s’étioler. Des voix dissonantes de certains membres importants de l’Eglise ont commencé à se faire entendre durant cette nouvelle campagne électorale, considérant que Jair Bolsonaro n’avait rien fait pour les Brésiliens les plus pauvres.

Le documentaire Jair Bolsonaro, un autre Brésil réalisé par Laetitia Rossi et Ingrid Piponiot est diffusé à 20h55 sur France 5, dimanche 2 octobre.


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