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« Un album pour faire danser » : André Minvielle de retour avec un disque festif et un concert à Paris

Six ans après l’album 1 Time, et après diverses collaborations dans l’intervalle, André Minvielle, vocaliste poétique, virtuose et facétieux, est de retour avec l’album Ti’bal tribal (« petit bal » tribal), sorti en août dernier. Ce disque propose une suite de captations live, « témoignages sonores de dix ans de bals effrénés » que Minvielle a retrouvés dans « ses affaires, d’ordinateurs en disques durs », pendant le confinement de 2020, explique-t-il dans le texte de présentation.

Les enregistrements assemblés dans Ti’bal Tribal semblent n’en faire qu’un. Une parade effervescente et joyeuse illustrant l’éclectisme du trio que l’artiste occitan, à la fois chanteur et percussionniste, a formé en 2008 avec sa fille Juliette Minvielle (chant, claviers) et son ami de plus de 40 ans Fernand « Nino » Ferrer (basse). À leurs côtés, quelques invités, comparses d’un soir ou de toujours, du fidèle Bernard Lubat aux jazzmen du trio Journal Intime, s’invitent à la fête. Le répertoire fourmille de pièces que l’on connaît ou reconnaît : chansons signées Minvielle, collaborations avec son ami accordéoniste Marc Perrone, adaptations de morceaux de Caetano Veloso, Mingus, Ellington ou Django Reinhardt, plus une reprise du standard Besame Mucho et un chant traditionnel. Minvielle aime bien poser sa griffe gasconne sur l’œuvre des autres : ces dernières années, il a revisité Nougaro avec Babx et Thomas de Pourquery (un splendide spectacle devenu disque), ainsi que Prévert avec le groupe Papanosh.

Après quelques dates en région l’été dernier, le trio d’André Minvielle, renforcé par le saxophoniste de jazz Christophe Monniot – également invité sur le disque – présente Tri’bal tribal au public parisien jeudi 24 novembre au Bal Blomet. Le poète occitan nous parle de cet album live.

Franceinfo Culture : Quelle était votre envie, votre idée-phare, en concevant cet album avec différents extraits de concerts ?
André Minvielle : Je souhaitais faire quelque chose où l’on soit en relation avec les danseurs. Quand on joue en studio, c’est très bien, mais il n’y a pas les danseurs devant… La frénésie qui se crée ne peut surgir qu’en direct. La musique qui en découle est porteuse de cette énergie qu’on ne trouve pas forcément dans un studio d’enregistrement. C’est vraiment la relation avec les danseurs que j’ai voulu mettre en avant dans ce disque.

Les danseurs, c’est bien le public ? On devine que dans votre esprit, il est totalement mis à contribution pour le spectacle et la performance…
C’est ça. Quand on fait de la musique de bal, c’est pour faire danser, sinon ce n’est pas la peine ! Et mon but, c’est aussi que ce soit intergénérationnel, que les gens se mélangent. L’énergie que l’on trouve dans ce disque est due au fait qu’il y a des gens devant, qui dansent avec nous, qui sont complémentaires de la musique qui se joue. Ce qui ne sera pas possible au Bal Blomet car c’est un bal assis ! [il rit] Mais la direction s’est débrouillée pour laisser un espace pour quelques danseurs.

Le répertoire est très éclectique en termes de genres musicaux, de langues, de rythmes…
À l’époque, j’avais appelé ce trio le Bal de tous les accents. Mon plaisir dans ce projet, c’est d’être batteur et chanteur en même temps, et que je joue des rythmes qui n’ont pas les mêmes accents. Un cha-cha-cha, une biguine… Je combine ma voix avec la grosse caisse, la batterie, avec mes gestes.

Vous avez élaboré ce projet discographique live pendant le confinement du printemps 2020…
Oui. J’ai écouté beaucoup de bals qu’on avait faits. Je pensais : « Si les gens ont le Covid, qu’ils ne peuvent pas sortir, si on est tous chez soi, alors on met le disque à fond dans la maison et on danse. S’il ne doit rester que ça… » D’ailleurs, j’ai eu un retour de Louis Sclavis [illustre clarinettiste de jazz] qui m’a dit qu’il avait passé mon disque et qu’il s’était retrouvé tout seul à danser à la véranda ! [il rit] Ce disque est fait pour ça : qu’on fasse la fête chez soi si on ne peut pas sortir. Quand le Covid nous est tombé dessus, franchement, je ne comprenais pas… Je me disais : « On ne peut plus s’approcher…? » C’était assez effrayant d’entendre ça. En plus, on nous disait que nous [les artistes], on n’était pas essentiels. On n’est peut-être pas essentiel mais on fait beaucoup réfléchir. Quand on a repris les concerts, il fallait voir comment les gens étaient heureux de renouer avec quelque chose qui n’est pas essentiel mais vital. La musique, le rythme, les chants, ça ouvre des espaces, c’est de la syntaxe, c’est comme la littérature.

Est-ce que vous avez grandi baigné dans l’esprit de bal ?
J’ai été un enfant, au bas de la scène, en train de bader, de ressentir l’énergie musicale devant moi… Je me souviens d’un saxophone baryton dans un orchestre à deux pas de moi, j’étais en bas, je prenais toute cette énergie. Je me disais qu’un jour, je voudrais être au-dessus, pas en-dessous de la scène ! À envoyer cette énergie, avoir un répondant en bas, avec les gens qui sautent en l’air, qui dansent en couple, c’est beau ! Plus tard, j’ai pensé que la musique de bal était une musique « évolutionnaire ». Il n’y a pas de révolution, c’est juste qu’on remet en jeu des choses qui appartiennent à notre mémoire commune : mémoire gestuelle, du corps, de toutes ces choses qui s’actionnent quand on va danser.

Présentez-nous le groupe au centre de ce projet.
Il y a ma fille Juliette, qui vole par ailleurs de ses propres ailes, elle fait un solo piano-voix et elle a monté un répertoire magnifique. Au départ, elle voulait jouer du piano mais elle avait la hantise du public. Je lui avais proposé de nous rejoindre, mon copain Nino et moi, afin qu’elle s’habitue à la scène, au public. Je lui avais dit : « Au ti’bal, les gens ne sont pas là pour te regarder jouer mais pour danser. » On ne s’occuper qu’à faire danser ! La base de tout, c’est d’être irrésistible. C’est pas compliqué ! [il rit] Il y a mon copain Fernand « Nino » Ferrer qu’on appelle « le vrai » ! Je le connais depuis 1979. Il s’appelle vraiment Ferrer alors que Nino Ferrer s’appelait Ferrari. Au Bal Blomet, notre invité est Christophe Monniot. Ce musicien, quand on lui dit « Tu veux faire un bal avec nous », il a le regard d’un enfant à qui on propose une glace au chocolat. Ils sont rares dans ce genre. Ce que Monniot aime, c’est la belle énergie qui sort de ce qu’on joue ensemble. Il est connu dans le jazz. Pour lui, le bal, c’est une façon de se libérer des contraintes d’être dans une certaine compétition. Avec nous, il s’éclate, il s’éparpille, il fait plaisir à voir. Et à entendre, surtout.

André Minvielle et son trio en concert à Paris, Ti’bal Tribal
Jeudi 24 novembre 2022, le Bal Blomet, 20h
Invité : Christophe Monniot (saxophone)


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