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Guerre en Ukraine : pourquoi la Russie tente-t-elle « désespérément » de conquérir la ville de Soledar

Située à une dizaine de kilomètres de Bakhmout, dans la région de Donetsk, Soledar fait face à des assauts de plus en plus intenses menés notamment par des mercenaires du groupe russe Wagner.

C’est l’un des points chauds en Ukraine en ce début d’année 2023. Dans l’est du pays, au cœur de la région de Donetsk, la ville de Soledar est l’un des objectifs principaux des forces russes après des mois de tentatives de conquête infructueuses. Dans son adresse quotidienne du 9 janvier, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a alerté sur l’intensité croissante des combats autour de cette bourgade pilonnée par la Russie. « L’ennemi a effectué une nouvelle tentative désespérée de conquérir Soledar, a-t-il déclaré. Les combattants [ukrainiens] résistent à de nouveaux assauts, encore plus violents. »

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Tout comme la ville de Bakhmout, située à environ 15 km de là, Soledar fait les frais de la doctrine de guerre russe. Des bombardements de grande ampleur y ont ravagé immeubles et infrastructures, et « plus aucun mur ne tient debout », a décrit Volodymyr Zelensky lundi soir. Entre les bombes, ce sont des combattants d’un genre particulier qui tentent de capturer la ville : des mercenaires de la milice Wagner, parmi les « meilleurs » de la société militaire privée, selon Kiev.

La conquête de Soledar fait partie d’une opération plus large de prise de contrôle de la région de Donetsk, que des séparatistes prorusses tentent de s’arroger depuis 2014. La région fait partie des quatre territoires de l’est ukrainien annexés par la Russie en septembre dernier, après des référendums non reconnus par Kiev et ses alliés occidentaux.

Comme à Bakhmout, les forces armées ukrainiennes ont déployé d’importants moyens à Soledar et sont parvenues jusqu’ici à repousser les incursions russes. Les duels d’artillerie et les combats de rue ont néanmoins laissé la ville en ruines. « Tout est complètement détruit. Tout le territoire de Soledar est couvert de cadavres (…) et porte les cicatrices des explosions. Voilà à quoi ressemble la folie », a déploré Volodymyr Zelensky dans son message.

Un supermarché détruit à Soledar (Ukraine), le 6 décembre 2022. (STEPHAN GOSS / SHUTTERSTOCK/SIPA / SIPA)

Un supermarché détruit à Soledar (Ukraine), le 6 décembre 2022. (STEPHAN GOSS / SHUTTERSTOCK/SIPA / SIPA)

Mardi matin, le ministère de la Défense britannique affirmé que Soledar était en train de passer sous contrôle russe. « Ces quatre derniers jours, les forces russes et [les miliciens de la société] Wagner ont réalisé des avancées tactiques dans la petite ville de Soledar (…) et contrôlent probablement la majeure partie de la localité », a-t-il rapporté sur Twitter (en anglais). Un point de situation à prendre avec précaution, d’autant que Kiev n’a pour l’heure pas réagi à ces informations.

Pour Moscou, prendre le contrôle de Soledar permettrait d’atteindre plusieurs objectifs. Renforcer ses positions à proximité de Bakhmout, d’abord, qui reste une cible de premier plan. Cela rendrait les soldats russes plus capables « d’envelopper [cette ville] par le nord », détaille le ministère de la Défense britannique, mais aussi de « perturber le réseau ukrainien de communication ».

La société Wagner, qui assure être en première ligne des assauts sur Soledar avec le soutien de séparatistes prorusses, a précisé son intérêt pour cette ville modeste. Ses mercenaires lorgnent en effet sur les quelque 200 km de tunnels situés sous la bourgade et dans toute la région de Bakhmout, vestiges de l’exploitation de mines de sel et de gypse. Des « villes souterraines », pour reprendre le terme employé par Evgueni Prigojine, patron de Wagner, assez vastes pour faire transiter véhicules, armes, munitions et combattants à l’abri des regards – et des bombardements.

De la fumée s'échappe de la ville de Soledar (Ukraine) après un bombardement, le 8 janvier 2023. (ROMAN CHOP / AP / SIPA)

De la fumée s'échappe de la ville de Soledar (Ukraine) après un bombardement, le 8 janvier 2023. (ROMAN CHOP / AP / SIPA)

Côté ukrainien, la défense de Soledar, nouveau point chaud de la ligne de front, revêt un intérêt symbolique et opérationnel. « Grâce à la résistance de nos soldats là-bas (…), nous avons gagné du temps supplémentaire et [préservé] des forces pour l’Ukraine », s’est félicité Volodymyr Zelensky lundi soir. L’inquiétude règne toutefois sur le sort de cette ville.

Si Soledar venait à tomber aux mains des forces russes, les conséquences pour Bakhmout resteraient très incertaines dans un futur proche. D’après le ministère de la Défense britannique, la ville peut encore compter sur « des lignes défensives profondes et stables », les forces ukrainiennes gardant en outre le « contrôle des [principales] voies d’approvisionnement ».


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