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Guerre en Ukraine: «Les véhicules blindés et l’artillerie font cruellement défaut»

Publié le : 23/01/2023 – 20:27

La Pologne prévient qu’elle est prête à se passer de l’aval de Berlin pour livrer des chars Leopard de fabrication allemande à l’Ukraine. Le chancelier Olaf Scholz est donc sous pression, d’autant que sa ministre des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a jugé dimanche soir 22 janvier que Berlin était disposé à autoriser Varsovie à fournir ces blindés à Kiev. L’Ukraine redoute une vaste contre-offensive russe dans les toutes prochaines semaines, et elle s’y prépare activement. Entretien avec Kirill Mikhailov, analyste du Conflict Intelligence Team.

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RFI : Comment l’Ukraine se prépare-t-elle à l’éventualité d’une offensive russe de grande ampleur ?

Kirill Mikhailov : On sait par exemple qu’au nord, à la frontière avec la Biélorussie, les Ukrainiens ont sérieusement renforcé leurs positions défensives, de façon à empêcher les Russes de s’enfoncer aussi loin qu’ils avaient pu le faire en février 2022. Parallèlement, la mobilisation se poursuit, de nouvelles unités ukrainiennes sont créées, les militaires reçoivent des formations pour utiliser les équipements occidentaux.

L’armée ukrainienne est-elle prête à faire face à une nouvelle offensive des forces russes ?

Tout dépend de l’échelle de cette offensive, bien sûr. Les Russes continuent à produire et à moderniser leur équipement : leurs chars, leurs véhicules de combat d’infanterie… Mais ils rencontrent des problèmes. Ils manquent, par exemple, d’équipements pour les unités nouvellement mobilisées et ils n’ont pas suffisamment de munitions soviétiques de calibre 122 et 152 millimètres. Bien sûr, l’armée russe peut faire appel aux forces qui sont déjà formées et expérimentées dans une zone donnée. Mais il s’agira alors d’une offensive à plus petite échelle, qu’il sera, en principe, possible de repousser.

Quelles sont les régions, où l’armée russe serait le plus à même de mener des attaques importantes ?

Une nouvelle offensive pourrait être menée du territoire biélorusse, comme certains le suggèrent, mais l’armée russe y sera confrontée aux mêmes difficultés logistiques qu’elle avait connues lors de la première offensive dans ce secteur. Si une nouvelle offensive était menée sur Kiev, on ne sait pas si la Russie pourrait concentrer au moins les mêmes forces qui avaient été déployées la première fois. D’un autre côté, il pourrait aussi y avoir une offensive en direction de Zaporijia, avec pour objectif de couper l’approvisionnement des troupes ukrainiennes qui se battent dans le Donbass. Ou encore une offensive dans la région de Louhansk, pour tenter d’éloigner les forces ukrainiennes de Kreminna et Svatove.

Les combats les plus violents se déroulent dans le Donbass autour de Bakhmout. Récemment, un haut fonctionnaire américain a déclaré que l’Ukraine ne devait pas s’attacher à défendre cette ville à tout prix et qu’elle devait plutôt profiter de cette occasion pour préparer une contre-offensive majeure contre les forces russes. Les Ukrainiens pourraient-ils manquer de ressources du fait de l’épuisement de leurs forces dans la bataille de Bakhmout ?

Les Ukrainiens savent très bien à quel moment ils doivent abandonner une ville. Si les Russes parvenaient à couper les lignes d’approvisionnement de Bakhmout, les Ukrainiens devraient alors se retirer de là. Et c’est ce qu’ils feront. Bien sûr, ils continuent d’avoir des pertes, mais les Russes aussi. Dans le même temps, il semble que les Russes mobilisent à Bakhmout leurs unités aguerries, leurs parachutistes, ce qui signifie que d’autres parties du front pourraient être moins prêtes à faire face à une offensive ukrainienne. C’est pourquoi on peut s’interroger sur l’efficacité de la stratégie russe visant à épuiser les Ukrainiens, si c’est ce qu’elle vise.

Les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne ont approuvé ce lundi une nouvelle aide militaire à l’Ukraine d’un montant de 500 millions d’euros. Quels sont les besoins les plus criants de l’armée ukrainienne ?

L’armée ukrainienne a surtout besoin de véhicules blindés modernes, d’artillerie et de munitions. Elle a également besoin de missiles de haute précision à longue portée, qui peuvent frapper plus loin que les lance-roquettes HIMARS, par exemple, qui ont une portée de 80 kilomètres. Les Russes ont réussi à déplacer leur logistique un peu plus loin et si les Ukrainiens veulent continuer à la frapper, cela nécessite des armes de plus longue portée. Les véhicules blindés et l’artillerie font cruellement défaut : ils sont nécessaires aussi bien pour repousser les offensives russes que pour mener des actions offensives.


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