« Sergio Leone, une Amérique de légende » : un cinéaste homérique

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De gauche à droite : Henry Fonda, Claudia Cardinale, Sergio Leone, Charles Bronson et Jason Robards sur le tournage du film « Il était une fois dans l'Ouest », en 1968.

De gauche à droite : Henry Fonda, Claudia Cardinale, Sergio Leone, Charles Bronson et Jason Robards sur le tournage du film « Il était une fois dans l’Ouest », en 1968. BRIDGEMANIMAGES.COM

Arte, dimanche 16 décembre à 22 h 45, documentaire

L’Amérique est dans tous les films de Sergio Leone. Même dans Il était une fois la Révolution, qui se situe au Mexique, Juan, le péon naïf, n’a qu’une idée en tête : aller « en Amérique, là où les banques poussent comme des champignons ». De Pour une poignée de dollars (1964), film dans lequel il transforme le chevalier preux du western hollywoodien en tueur sans pitié, à Il était une fois en Amérique (1984), monument testamentaire de plus de quatre heures sur la chute et la décadence d’un gangster new-yorkais, le cinéaste italien n’aura cessé de fantasmer une Amérique mythologique, cinématographique et universelle. Jean-François Giré, spécialiste des westerns spaghetti, a donc eu la bonne idée de titrer son documentaire : Sergio Leone, une Amérique de légende.

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Il a également été bien inspiré en suivant le fil conducteur de l’enfance. Tous les films de Sergio Leone sont habités par son regard d’enfant. Né en 1929, le réalisateur italien grandit en plein cœur du Trastevere, quartier populaire de Rome, où il découvre les comics et les fourberies d’Arlequin et de Polichinelle qui influenceront ses personnages pittoresques tels Peripero, le croque-mort dans Pour une poignée de dollars. Jean-François Giré meuble son film avec des saynètes où l’on retrouve ces deux marionnettes. Un artifice un peu lourd, mais pas très dérangeant, qui permet d’introduire les grands thèmes du cinéma de Sergio Leone.

Fêlure originelle

L’amitié, tout d’abord. Le cinéaste italien, qui parlait parfaitement français, explique que lui, fils unique, la recherchait. D’où une part de regret. Dans un autre entretien filmé, Sergio Leone précise sa vision : « L’amitié entre deux personnages négatifs est plus forte qu’entre deux personnages qu’on appelle “bons”. »

Autre thème au cœur de son œuvre : la famille. Le documentaire retrace l’histoire de la sienne. Son père, célèbre cinéaste, dont le pseudonyme était Roberto Roberti, fut banni par le dictateur italien Benito Mussolini. Cette époque, marquée par la seconde guerre mondiale, et pendant laquelle il connaîtra la faim et la pauvreté, fera de lui « un pessimiste, un socialiste déçu, au point d’être un anarchiste ». Cette fêlure originelle le conduira à se recroqueviller sur les siens, sa femme Carla et ses trois enfants. D’où une vision désabusée du monde et une dénonciation des totalitarismes : les exécutions qu’il met en scène dans Il était une fois la Révolution symbolisent l’oppression fasciste qu’il voyait comme « sa bête noire ».


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