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Cumul emploi-chômage : Matignon tente de ménager les syndicats

En découvrant il y a dix jours dans une version non finalisée du projet de loi « pour la liberté de choisir son parcours professionnel » que le gouvernement pourrait  modifier par décret les règles permettant de cumuler emploi et allocations chômage pour les chômeurs ayant une activité réduite , les syndicats ont réagi au quart de tour, soupçonnant Bercy de vouloir faire des économies sur le dos des plus précaires. La version définitive du texte, présentée vendredi par Muriel Pénicaud, va dans le même sens, même si la nouvelle rédaction de l’article incriminé, fruit d’un compromis bancal à Matignon, permet de calmer le jeu.

Le fond du problème repose sur les CDD de moins d’un mois, qui ont explosé ces dernières années. Après avoir mis en place puis abandonné un système de taxation des contrats courts, les partenaires sociaux se sont mis d’accord dans la  dernière convention Unédic du printemps 2017 pour revoir certains travers des règles d’indemnisation des chômeurs qui exercent une activité réduite.

L’élection d’Emmanuel Macron a changé la donne. Appliquant une de ses promesses de campagne, le gouvernement menace les entreprises de leur appliquer un système de bonus-malus qui, selon l’hypothèse finalement retenue, ferait varier leur taux de cotisation chômage en fonction du nombre de ruptures de contrats assorties d’une inscription à Pôle emploi. 

La menace figure bel et bien dans le projet de loi sous la forme d’un décret, mais elle reste suspendue aux résultats des négociations que les branches professionnelles se sont engagées à mener d’ici au 31 décembre 2018 pour favoriser l’emploi durable. Elle dépendra aussi, et c’est la surprise de la version définitive du texte, du résultat d’une autre négociation, interprofessionnelle celle-là, sur les règles de cumul emploi-chômage.

En clair, il y a dix jours, l’article 33 permettait au gouvernement de toucher à ces règles de son seul fait. La version définitive laisse la possibilité aux partenaires sociaux de s’emparer du sujet au préalable. Sachant que syndicats et patronant avaient de toutes façons prévu de se revoir pour évaluer les effets de la dernière convention et, éventuellement, y apporter quelques retouches, le projet de loi permet donc de gagner du temps. 

Si le gouvernement a adouci sa position, c’est parce que Jean-Claude Mailly et Laurent Berger sont montés au créneau auprès d’Edouard Philippe, selon nos informations, avec l’appui tacite du ministère du travail, peu enclin à voir Bercy imposer ses vues.   

Les craintes de syndicats n’en sont pas balayées pour autant. « En aucun cas nous n’accepterons de diminuer les droits pour faire des économies, et encore moins pour financer les promesses de Macron sur l’indemnisation des démissionnaires et des indépendants », prévient Véronique Descacq pour la CFDT. Encore plus critique parce qu’elle na pas signé la dernière convention, la CGT, par la voix de Denis Gravouil, fait le parallèle avec la mission en cours de la cour des comptes sur le régime d’activité réduite, « destinée à préparer les esprits à une baisse des indemnités ».

La prudence reste d’autant plus de mise vis à vis de Bercy qu’avec les aléas ministériels, le renouvellement de la direction de FO ou encore la succession de Pierre Gattaz au Medef, le contexte d’aujourd’hui ne sera peut-être pas le même dans quelques mois.


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