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Réforme des retraites : craintes sur les mécanismes en faveur des femmes

Ces derniers jours, les partenaires sociaux ont reçu un document de travail du Haut-Commissariat à  la réforme des retraites qui pose la question sans fard : « Compte tenu des évolutions en matière de taux d’emploi des femmes et de conjugalité, doit-on maintenir des pensions de réversion ? » En 2016, les dépenses de réversion et d’allocation veuvage se sont élevées à 35,8 milliards d’euros, comptant pour plus de 11 % de l’ensemble des pensions.

La simple évocation d’une potentielle disparition de ce dispositif qui profite à 89 % aux femmes fait bondir Philippe Pihet, le négociateur de FO sur les retraites. « Au rythme actuel, on parviendra à l’égalité salariale en 2132, autrement dit, les pensions ne seront égalitaires qu’à partir de 2175 ! » s’émeut-il.

Avant d’adopter  un système de retraites universel par points , les partenaires sociaux vont devoir imaginer de nouvelles solidarités pour compenser les pensions plus faibles des femmes, dues à la fois à un taux d’activité et à  des salaires moindres . Comme son homologue de FO, Pascale Coton, à la CFTC, craint un recul des droits féminins : « 45 % des retraitées touchent un minimum de pension, contre 14 % des hommes, et ce minimum est inférieur au seuil de pauvreté : il ne faut donc pas réduire le niveau de solidarité actuel en faveur des femmes », argumente-t-elle.

Réversions et majorations pour enfants

Les réversions ont un impact majeur, puisqu’elles permettent de diminuer de 15 points les écarts de pension : en 2015, les femmes touchent ainsi 25 % de moins que les hommes, au lieu d’un fossé de 40 % si elles n’avaient droit qu’à leurs pensions directes. Mais il va falloir harmoniser des droits aujourd’hui hétéroclites. Ainsi, une salariée peut toucher la réversion à 55 ans, mais une dentiste doit attendre 65 ans. Parfois, il y a des conditions de ressources, mais pas toujours. Les femmes pacsées ne peuvent en bénéficier. Le taux de réversion varie entre 50 et 60 %. « Il faut non seulement maintenir les pensions de réversion, mais en plus les aligner sur le mieux-disant », revendique Pascale Coton.

Autre atout pour les femmes, les majorations pour enfant (trimestres en plus ou bonification de la pension) corrigent une partie des inégalités liées au sexe. Elles représentaient 17,8 milliards d’euros en 2012.

Même si elles travaillent plus qu’autrefois, les femmes subissent des interruptions de carrière liées à la maternité. Seules 35 % des mères de famille nombreuse dont le petit dernier a moins de 3 ans sont en emploi, alors que ce taux rebondit à 64 % quand le cap de la petite enfance est dépassé (contre respectivement 80 % puis 84 % pour les pères).

La fin de la règle des 25 meilleures années

« Nous serons attentifs à ce que les majorations pour enfants continuent à profiter à toutes, y compris aux cadres de banque », souligne Pascale Coton, qui redoute qu’elles ne soient recentrées sur les mères les plus démunies.

Mais la principale solidarité envers les femmes n’est pas explicite : elle provient du  coeur du système , c’est-à-dire de la règle des 25 meilleures années servant à calculer la pension (6 mois pour les fonctionnaires). Aujourd’hui, on peut avoir eu 17 années de carrière sous-payées sans trop abîmer sa pension. Mais dans le futur système en points, tous les salaires seront pris en compte, y compris les indemnités de congé maternité ou parental. « La seule solution pour que les femmes n’y perdent pas, c’est d’inscrire plus de solidarité dans le système, mais alors on montera bien au-dessus du niveau actuel de 20 % de solidarité », assure Philippe Pihet.


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