Economie

Les pistes d’Air France KLM pour abaisser ses émissions de CO2

À Lyon, Stéphane Lamarrigue a pris la responsabilité régionale d’Air France KLM en août 2021. Au moment où la compagnie reprend la parole à travers une nouvelle campagne publicitaire, il a bien voulu répondre à nos questions à propos de la relance du trafic, de la décarbonation ou encore de la place de la compagnie dans la région.

Après la crise sans précédent du transport aérien due au covid-19, à quel rythme votre activité se relève-t-elle ?

Stéphane Lamarrigue : Les prévisions de l’IATA tablent officiellement sur 2024 pour un retour au trafic d’avant-covid. Chez Air France KLM, nous observons une nette reprise depuis janvier 2022. Pour la saison été, nous proposons une offre correspondant à 90 % des capacités d’avant crise, avec près de 200 destinations desservies à travers le monde. Il a fallu nous adapter, bien sûr, avec l’Asie qui reste majoritairement fermée et, au contraire, de fortes progressions sur l’Amérique du Nord (Etats-Unis, Canada, Mexique) ou encore le bassin méditerranéen. En résumé, la reprise est bien là, les réservations sont proches de celles de 2019, même si les voyages pour motif affaires reprennent plus lentement que les vols touristiques. Nos clients n’ont pas perdu l’envie de voyager.

Et à Lyon Saint-Exupéry, plus précisément ?

Stéphane Lamarrigue : A Lyon, Air France-KLM est à 80 % de l’offre pré-covid avec, rappelons-le, six vols quotidiens vers Paris-CDG permettant des correspondances sur l’ensemble du réseau d’Air France, notamment sur long-courrier, et quatre vols quotidiens sur Amsterdam, pour accéder cette fois au réseau de KLM.

Outre Lyon, nous proposons également trois vols quotidiens vers Paris CDG depuis Clermont-Ferrand, ainsi que deux vols par jour vers Paris-Orly depuis Aurillac (opérés par Amélia).

Comment redonnez-vous envie à la clientèle de voyager en avion ?

Stéphane Lamarrigue : Nous simplifions au maximum la vie de nos clients et nous multiplions les services qui améliorent le confort et le bien-être dans les aéroports (nouveaux salons à Paris-Charles de Gaulle, service Ready To Fly) comme dans les avions avec le renouvellement de notre flotte et le réaménagement de nos cabines. Notre nouvelle campagne de marque « S’envoler avec élégance » souligne cette volonté de monter en gamme grâce à l’art de recevoir, la gastronomie – avec des menus signés de chefs étoilés en cabines Business et La Première, l’accueil des enfants…

Le transport aérien est régulièrement pointé du doigt pour sa contribution au réchauffement climatique. Comment réagissez-vous ?

Stéphane Lamarrigue : Il n’y a aucune ambiguïté. Pour contribuer à l’atteinte des objectifs de l’Accord de Paris visant à limiter le réchauffement climatique en deçà de +2°C, le transport aérien doit accélérer sa transition environnementale. C’est pourquoi Air France a lancé « Air France ACT », un programme présentant la nouvelle trajectoire de réduction des émissions de CO2 de la compagnie. Notre nouvelle trajectoire de décarbonation vise une réduction de 30 % des émissions de CO2 par passager-kilomètre d’ici 2030 par rapport à 2019, soit une réduction de 12 % des émissions totales de la compagnie entre 2019 et 2030, selon les évolutions prévues d’activité, après une réduction de 6 % atteinte entre 2005 et 2019. Et nous visons le zéro émission nette de CO2 en 2050.

Comment allez-vous y parvenir ?

Stéphane Lamarrigue : La priorité est le renouvellement accéléré de notre flotte avec des appareils moins gourmands en carburant. Les A380 et A340 (quatre réacteurs) ont quitté notre flotte au début de la crise Covid et nous avons maintenu nos investissements d’un milliard d’euros par an pour introduire des appareils de dernière génération, Airbus A350 et A220 qui nous font baisser nos émissions de CO2 de 20 à 25 % en moyenne… La flotte Air France KLM comprendra 45 % d’avions de nouvelle génération en 2025 et 70 % en 2030.

Quelles perspectives les biocarburants représentent-ils pour le transport aérien ?

Stéphane Lamarrigue : A moyen terme, les carburants d’aviation durables sont appelés à devenir le premier levier de décarbonation du transport aérien. Ils permettent une réduction de 80 % des émissions de CO2 sur l’ensemble du cycle de vie par rapport à du kérosène conventionnel. Air France a été l’une des pionnières dans leur expérimentation, dès 2011. Depuis janvier, la réglementation française prévoit 1 % d’incorporation. Mais nous monterons beaucoup plus haut : nous visons 10 % en 2030 et 63 % en 2050. Il y a quelques semaines nous avons assuré deux vols, l’un vers Montréal et l’autre vers Lisbonne, avec respectivement 16 et 30 % de carburant durable. Et nous n’utiliserons que des biocarburants dont la « durabilité » est avérée comme, par exemple, ceux issus de la biomasse (déchets agricoles, huiles végétales usagées…). Reste à faire diminuer leur prix (4 à 8 fois le prix du kérosène fossile, aujourd’hui) et à structurer une filière de production.

Y a-t-il d’autres voies vertueuses à tracer ?

Stéphane Lamarrigue : L’éco-pilotage des avions en est une. Nous pouvons gagner 2 à 3 % d’émissions de CO2 grâce à l’action de nos pilotes, qui sont très engagés sur le sujet. Roulage avec un seul moteur sur la piste, optimisation des trajectoires en lien avec le contrôle aérien : chaque geste compte à l’échelle de nos opérations.

Le développement de l’intermodalité, en particulier avec le train (nous travaillons en partenariat avec la SNCF depuis 25 ans) fait aussi partie des solutions, sur les trajets de courte distance. Par exemple en proposant, sur une même réservation, des trajets combinés en train et en avion, avec des correspondances. Près de 160.000 clients utilisent cette formule chaque année depuis ou vers Paris-CDG ou Paris-Orly, depuis ou vers 18 gares en France.

Enfin, je parlais tout à l’heure de gastronomie, nous travaillons à rendre notre restauration plus responsable : nous proposons des menus bio, de la vaisselle en bagasse, des produits locaux respectant la saisonnalité, nous réduisons le gaspillage, faisons un tri sélectif à bord, travaillons avec des chariots plus légers… En 2023, nous aurons supprimé 90 % de plastique à usage unique par rapport à 2018.

Quelle position l’aéroport Saint-Exupéry tient-il dans la géographie nationale d’Air France KLM ?

Stéphane Lamarrigue : Auvergne Rhône-Alpes est la deuxième région économique française après l’Île-de-France, avec un potentiel de clientèle à cette mesure. Notre objectif est de connecter les clients régionaux au monde et le monde à la région Auvergne-Rhône-Alpes. Et en interne, nous parlons toujours du « hub lyonnais » : Saint-Exupéry reste une plateforme de correspondance très importante, notamment le matin et le soir, en provenance et en direction de nombreuses villes françaises. Le devenir de Lyon reste dans cette double fonction : la desserte de la clientèle régionale et d’une clientèle en correspondance. Air France KLM propose cet été 50 vols chaque jour !

Et si l’on compte sa filiale low cost Transavia, le groupe représente près de 38 % du trafic de l’aéroport.

Logistique / Transport
Stéphane Lamarrigue, brefeco.com
AIR FRANCE KLM (LYON)