
JESCO DENZEL / PICTURE-ALLIANCE / AFP
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Le divorce Europe-Etats-Unis (2/3). A l’occasion de la venue de Donald Trump en France, dimanche, « Le Monde » consacre une série d’articles à la crise des relations transatlantiques.
Selon à qui l’on s’adresse, c’est La Cène de Léonard de Vinci, ou le film Douze hommes en colère. Ce n’est jamais qu’une photo, mais le cliché est saisissant par la tension qu’il reflète : on y voit Donald Trump, assis les bras croisés dans une attitude de défiance, face à un groupe de dirigeants européens, debout de l’autre côté de la table. Au premier rang d’entre eux, penchée vers le président américain qu’elle domine du regard, sous l’œil approbateur du premier ministre japonais, Shinzo Abe, la chancelière allemande, Angela Merkel, semble user de toute son autorité pour amener M. Trump à la raison.
La scène se passe au G7 de La Malbaie, au Québec, le 9 juin. La photo fait aussitôt le tour du monde, et l’utilisation que vont en faire les différents dirigeants en dit long sur l’acrimonie qui se dégage de ce sommet, que M. Trump quittera avant la fin et, surtout, dynamitera d’un tweet envoyé de l’avion présidentiel Air Force One pour annoncer qu’il retire sa signature du communiqué final.
La photo est prise par Jesco Denzel, le photographe de la chancellerie fédérale allemande, et diffusée sur les réseaux sociaux par le porte-parole de Mme Merkel, qui y voit l’occasion de montrer la chancelière sous un jour favorable, résistant à M. Trump. D’autres clichés pris par d’autres photographes, représentant le groupe plus détendu, vont être publiés, mais c’est celui-ci que l’on retiendra.
Piqué au vif par l’avantage psychologique pris par les Allemands, Donald Trump va revenir longuement sur cette scène, dans un entretien accordé à la télévision ABC à Singapour, où il a atterri le lendemain pour un sommet avec son nouvel « ami » nord-coréen Kim Jong-un. Le président s’inscrit en faux contre l’interprétation faite de cette « photo tellement innocente » : tout se passait très bien, dit-il, « on discutait en attendant le document final. C’était juste une photo de moi, assis les bras croisés, j’attends le document pour pouvoir le lire. C’était juste une photo amicale ».
M. Trump affirme qu’il s’est très bien entendu « avec pratiquement tout le monde », avec une mention spéciale pour « le nouveau, celui d’Italie, que j’aime beaucoup, il vient juste de gagner [Giuseppe Conte, le chef du gouvernement italien formé à la suite de la victoire des populistes aux élections] », et répète à plusieurs reprises : « Vous savez, c’est nous qui avons diffusé cette photo, ce sont mes gens qui l’ont diffusée ! »
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