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Procès de l’affaire Troadec : la cour pointe du doigt les incohérences d’Hubert Caouissin

La deuxième semaine de procès d’Hubert Caouissin et Lydie Troadec démarre ce lundi à Nantes. Cette journée est consacrée aux interrogatoires des deux co-accusés.

Le procès d’Hubert Caouissin et de Lydie Troadec se poursuit à la cour d’assises de Nantes. Tous deux sont mis en cause dans le quadruple meurtre d’une famille en 2017. Hubert Caouissin est poursuivi pour « meurtre précédé, accompagné ou suivi d’un autre crime » et « atteinte à l’intégrité de cadavres » tandis que son ex-compagne Lydie Troadec qui comparaît libre l’est pour « recel de cadavres » et « modification des preuves d’un crime ».

Ce lundi voit l’interrogatoire des deux co-accusés. Hubert Caouissin a livré le récit de la nuit des meurtres. Il répond volontier aux questions, donne des détails tout en évoquant des trous noirs. A plusieurs reprises, la présidente a attiré son attention sur de nombreuses contradictions. 

Elle l’a longuement interrogé sur le fond l’accusé de 50 ans, s’intéressant à ses déplacements au pavillon
d’Orvault en juin et novembre 2016, février 2017. Ces déplacements ont précédé les meurtres de son beau-frère et de sa belle-soeur, Pascal et Brigitte Troadec, 49 ans tous les deux, et de leurs enfants, Charlotte, 18 ans, et Sébastien, 21 ans, que Caouissin a tués à coups de pied de biche, la nuit des 16 et 17 février.

Sachant la famille absente et convaincu de l’existence d’un « magot », le quinquagénaire a expliqué s’être rendu à leur domicile en juin, avec sa compagne Lydie Troadec, « pour voir si quelque chose bougeait » dans la maison.
Quand, le 11 février, en pleine nuit, l’accusé effectue un trajet de 600 km aller-retour pour « espionner », il sait, dit-il, que « la manne (doit) être à l’étranger depuis longtemps ». 

Cinq jours plus tard, Hubert Caouissin revient à Orvault, vêtu d’une veste de jardinage, d’un bonnet et de gants. Il apporte avec lui un stétoscope, acheté pour les problèmes cardiaques de son fils, né de son union avec Lydie Troadec, afin, affirme-t-il, d »écouter aux portes ».

« Vous apprenez très vite, vous êtes très doué (mais) vous savez que vous n’entendez pas bien avec un stétoscope », a fait remarquer la présidente qui s’interroge sur ses recherches et téléchargements sur internet: un dossier « sur les traces ADN », »comment fabriquer un silencieux »…« Je voulais rentrer pour trouver quelque chose d’exploitable. Je voulais prendre un dessin de la clé (de la maison) et revenir plus tard pour inspecter les papiers, regarder leurs comptes, prendre des photos », soutient Caouissin.

Arrivé à Orvault à 1H00, l’accusé dit avoir coupé le compteur électrique « à 3H00 », empêchant le couple Troadec d’appeler à l’aide avec leur téléphone. Le couple, qui dort à l’étage, est réveillé par Caouissin qui, le visage dissimulé, s’est introduit par le garage. S’ensuit un « déchaînement » de violences, selon la présidente.

Le récit de ces quatre meurtres est incompatible avec le récit d’une bagarre qui dégénère

Maître Cécile de Oliveira, avocate de la mère et des sœurs de Brigitte Troadec

« Pour les parties civile, la version d’Hubert Caouissin n’a aucune crédibilité, c’est ce que les parties civiles pensent d’ailleurs depuis plusieurs années maintenant. Il a démontré ce matin à quel point sa version est non seulement peu crédible, mais absurde » a souligné Maître Cécile de Oliveira, l’avocate de la mère et des soeurs de Brigitte Troadec, l’une des victimes. 

Maître Thierry Fillion, avocat d’Hubert Caouissin ne s’étonne pas du recul pris par Hubert Caouissin lors de son témoignage. « Il a toujours exprimé le souci qui était le sien de ne pas ressentir les choses comme n’importe quelle personne dans ces situations. » Concernant la manière dont ce sont déroulé les faits et la thèse de l’accident, il n’y pas d’incohérences selon lui. « On peut penser que ça c’est passé très très vite, qu’il s’est senti acculé, qu’il avait peur, ce qui a décuplé sans doute sa force, sa violence. »

« Je voulais tuer personne »

Armé d’un pied de biche, trouvé, affirme-t-il, dans la maison, Hubert Caouissin décrit méticuleusement les meurtres, mais s’emmêle les pinceaux dans la chronologie. Selon son récit, il assène des coups sur le crâne de Pascal puis de Brigitte, qui venaient d’alerter leurs enfants, avant de frapper mortellement ces derniers.
A la demande de la cour, il mime depuis le box, l’un des coups portés sur le crâne de Pascal. « Je voulais tuer personne », répète l’accusé sans dévier de sa ligne de défense.

Caouissin transportera ensuite les corps dans sa ferme de Pont-de-Buis (Finistère) où il procède à leur éviscération avant de les brûler. Aux alentours de cette grande propriété, les enquêteurs ont indiqué avoir retrouvé parmi les ronces « 379 morceaux de chair humaine », dispersés dans l’espoir « que les animaux sauvages les feraient disparaître ». 

« A aucun moment, vous ne pensiez que vous pourriez les tuer? », lui demande la présidente. « Non », répond Caouissin. « Pourquoi ne vouliez vous pas laisser les corps dans la maison? », l’interroge-t-elle. « C’était une énorme erreur. Ce qui s’est passé à Orvault ne peut pas exister », glisse l’accusé.

Il est venu pour les tuer. C’est ce que nous soutenons. Ce que raconte Hubert Caouissin sur le déroulement de la scène criminel ne peut correspondre à la réalité. Il ne peut absolument pas avoir tuer ces quatre personnes sans à un moment agir par surprise. Nous pensons même qu’il est peut-être venu armé, qu’il n’a absolument pas trouvé cette arme sur place.

Maître Pacheu, avocat de la famille de Pascal Troadec

Selon Maître Olivier Pacheu, avocat de la famille de Pascal Troadec, il est « hautement improbable » que les faits se soient déroulés tels que Caouissin les relate. « Je pense qu’il a tué tout d’abord l’un des enfants, Sébastien », affirme l’avocat dubitatif sur la sincérité d’un accusé qui « peut raconter ce qu’il veut ». 

Les débats doivent se poursuivre en soirée avec l’interrogatoire de Lydie Troadec. 

Hubert Caouissin encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Le verdict est attendu le 8 ou le 9 juillet.
 


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