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Cinq choses à savoir sur Yvon Chouinard, le fondateur de Patagonia, qui fait don de son entreprise pour protéger l’environnement

De son propre aveu, Yvon Chouinard n’a « jamais voulu être un homme d’affaires ». Il s’est pourtant retrouvé à la tête d’un empire : Patagonia, une société californienne de vêtements de sport en plein air qui vaut aujourd’hui 3 milliards de dollars environ, selon une estimation du New York Times*. A 83 ans, l’entrepreneur a annoncé mercredi 14 septembre faire don de son entreprise à un trust chargé de reverser ses profits à des associations de défense de l’environnement.

Ce n’est pas la première fois que l’homme d’affaires, engagé de longue date pour la protection de l’environnement, surprend par ses pratiques entrepreneuriales. Voici cinq choses à savoir sur ce patron réputé excentrique et aventurier.

1C’est un escaladeur de haut niveau et un passionné de pêche

Bien avant l’entrepreneuriat, Yvon Chouinard s’est pris de passion pour l’escalade. Né en 1938 dans l’état du Maine au sein d’une famille d’origine canadienne et française, il découvre la grimpe dès ses 14 ans, lorsque ses parents déménagent en Californie. En grandissant, il se forge une réputation de pionnier en ouvrant des voies ou en réalisant des ascensions difficiles. 

Egalement féru de pêche à la mouche, il confie en 1998 à une journaliste, qui fait son portrait pour le New York Times*, boire dans les cours d’eau où il trempe sa ligne, qu’importe le risque de tomber malade, pour s’endurcir. Il a eu son père pour modèle. Il dit se souvenir que ce dernier s’arrachait lui-même les dents avec sa pince d’électricien en buvant du whisky, arguant ainsi ne pas avoir besoin de coûteuses consultations dentaires.

2Il a commencé à vendre des équipements de sport dans le coffre de sa voiture

A 19 ans, membre d’un club de fauconnerie en Californie du Sud et constatant le manque de solidité du matériel à disposition, le jeune Yvon décide de se lancer dans la fabrication de ses propres équipements d’escalade. Il commence alors à gagner un peu d’argent en vendant son matériel depuis le coffre de sa voiture.

Son association en 1965 avec Tom Frost, ingénieur américain et lui aussi grimpeur, donne naissance à une société qui prendra, dix ans plus tard, en 1973, le nom de Patagonia, spécialisée dans les vêtements de sport en plein air. Sa particularité résidait alors dans le choix de couleurs très vives pour habiller les équipements, à contre-courant des tons sombres dominant alors le marché. Une volonté d’Yvon Chouinard pour… remonter le moral des grimpeurs. « En passant des mois dans des tentes dans des conditions de tempête, on devient de plus en plus déprimé », avouait-il en 1998, toujours au New York Times.

3Il confesse être devenu un homme d’affaires malgré lui

Yvon Chouinard ne correspond pas à l’image d’un chef d’entreprise pressé en costume-cravate. Il se qualifie lui-même « d’homme d’affaires à contrecœur » dans son ouvrage Let My People Go Surfing, confession d’un entrepreneur pas comme les autres, sorti en 2005. Il n’a pas d’ordinateur ni de téléphone portable. Il porte la plupart du temps des jeans, des chemises à carreaux ou des pulls en laine épaisse. L’excentrique dirigeant va même jusqu’à enjoindre ses employés à « laisser tomber le travail pour aller surfer » lorsque l’occasion se présente, confie-t-il en 2017 au micro de la radio publique américaine NPR*. « Je me fiche de savoir quand vous travaillez, tant que le travail est fait », ajoute-t-il.

Enfin, c’est un entrepreneur qui se méfie de la Bourse. « Une fois cotées en Bourse, même les entreprises ayant les meilleures intentions du monde font le choix du gain à court terme plutôt que de penser responsabilité et croissance à long terme », écrit-il dans la lettre annonçant le don de sa société.

4Il agit de longue date pour le climat

Homme d’affaires contrit, Yvon Chouinard n’a pour autant pas négligé l’impact marketing que pouvait avoir son entreprise en matière d’écologie. Patagonia mène de nombreuses actions, reversant notamment 1% de ses ventes annuelles à des groupes environnementaux, et le fait savoir. Un slogan choc, « la Terre est notre unique actionnaire », ouvre la lettre du 14 septembre. Une volonté affirmée de « transformer le monde des affaires ».

Déjà en 1994, la firme avait annoncé renoncer à toute utilisation de coton cultivé avec des pesticides. Au tout début de son business, Yvon Chouinard a fabriqué et initié des coinceurs et mousquetons en aluminium pour remplacer les pitons qui abîmaient la roche, contribuant ainsi à l’essor de la « grimpe propre », laissant la voie intacte après l’ascension.

5Il a engagé un bras de fer avec Donald Trump

Yvon Chouinard s’est inscrit à plusieurs reprises contre la politique de l’ancien président des Etats-Unis. En 2017, avec d’autres poids lourds de l’économie américaine, dont l’entreprise aux activités similaires The North Face, Patagonia a signé une lettre de défiance à l’égard de la décision de Donald Trump de faire sortir les Etats-Unis de l’accord de Paris sur le climat. La même année, Yvon Chouinard avait annoncé poursuivre le chef d’Etat en justice, après que ce dernier eut réduit la taille de deux zones naturelles protégées dans l’Etat de l’Utah. Un acte assez inédit de la part d’une entreprise privée à l’égard d’un président en exercice.

* Les liens suivis d’un astérisque sont en anglais.


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