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Thierry Beaudet : « Si l’assurance devient obligatoire, les gens l’accepteront »

Nous souhaitons porter la cause du « grand âge », en être les militants, comme d’autres se mobilisent autour du handicap. Ce serait une évolution naturelle. Aujourd’hui, 70 % des plus de 65 ans choisissent déjà une mutuelle pour leur complémentaire santé, et cette proportion augmente avec l’âge. De plus, nous gérons 200 Ehpad, et nous développons des dispositifs tels que les services de soins infirmiers à domicile, la télé-assistance et les équipements connectés. Nous voulons amplifier ces services auxquels les gens sont attachés, et les solvabiliser. Cependant, les financements publics sont essentiels et devront rester majoritaires. Rappelons que  le coût de la dépendance s’élève à 30 milliards d’euros par an hors aide informelle, et que 80 % de cette dépense est  couverte par la solidarité publique .

Ces offres sont perçues comme chères, pour un accident tardif auquel on ne veut pas penser. Je ne crois pas à la capacité des assureurs complémentaires à vendre demain des contrats dépendance labellisés en se contentant de les aménager à la marge, d’y ajouter un bilan de santé ou un audit sur l’adaptation du domicile… Pour que cela fonctionne, il faut une forme d’inclusion, ou d’obligation de cotiser. La cosmétique ne suffira pas.

Mais il y a une deuxième raison pour laquelle les gens ne souscrivent pas d’assurance-dépendance. Comme s’ils devaient assumer une dette personnelle par rapport à leurs parents. « J’en bave, mais c’est mon devoir. » On est généralement confronté à cet épisode douloureux entre 50 et 65 ans, puis on oublie tout pendant dix ans. On néglige de se préparer à sa propre dépendance. Alors que si l’assurance devient obligatoire, les gens l’accepteront, car ils perçoivent de plus en plus que c’est une nécessité.

On peut se demander s’il est nécessaire de faire payer les jeunes familles, qui ont d’autres soucis à financer. Certains trouvent logique que l’on fasse cotiser les actifs pour leur retraite, puis les retraités pour leur dépendance. Nous prendrons position d’ici la fin de l’année.

Nous n’en savons rien pour l’instant, les travaux vont commencer. Nous constatons juste que la moitié des résidents en Ehpad ont un reste à charge supérieur à leurs ressources. Pour cinq ans en établissement, les pensionnaires doivent eux-mêmes débourser 153.000 euros, dont en moyenne 47.000 euros leur manquent.

Les excédents de la Sécurité sociale doivent servir à investir dans le système de santé ! Car les deux budgets de la Sécurité sociale de ce quinquennat sont malheureusement dans le prolongement de ce qui se fait depuis les années 2000, en termes d’économies : transfert de nouvelles charges aux patients et à leurs complémentaires santé, pression sur les tarifs des établissements de santé, hausse des taxes qui pèsent sur les mutuelles. Emmanuel Macron a présenté une stratégie santé ambitieuse, moi je dis banco, transformons, investissons. Mais j’espère que ce plan ne restera pas lettre morte.


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