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L’argent caché des « gilets jaunes »

La convergence des luttes emprunte parfois des chemins inattendus mais piégés. « Gilets jaunes » et fonctionnaires européens même combat ? C’est ce que pourrait faire penser à tort l’étude sur les niveaux de la fiscalité en 2017 dans les Etats de l’Union européenne publiée ce mercredi par Eurostat.

Faisant de la France le pays où le poids des recettes d’impôts et cotisations sociales, rapportées à la richesse produite, est le plus élevé (48.4 % contre 40.2 % en moyenne dans l’UE), ce document semble donner raison aux révoltés fiscaux de l’an 18. La réalité rejoint la statistique. A chacun son échelle. Pour les uns, c’est le litre de gazole à 1.80 euros. Pour les autres, c’est la masse des prélèvements obligatoires, qui a passé 1.000 milliards d’euros – et encore, sans compter les cotisations à la mutuelle.

Ceux qui manifestent contre les taxes sur les carrefours devraient cependant regarder plus loin. Ils verraient que, contrairement à ce que leur serine la France insoumise, ce n’est pas tant par le niveau de ses impôts sur le revenu ou de la TVA que notre pays se détache. Si nous sommes champions d’Europe des recettes fiscales, nous le devons aux impôts pesant sur la production des entreprises et au poids extravagant de nos cotisations sociales.

Autrement dit à ce modèle social qui est en vérité un anti-modèle économique. Or, parmi les injonctions des « gilets jaunes » à l’égard du chef de l’Etat, il en est une particulièrement contradictoire : celle consistant à demander moins de taxes et plus de salaire ou d’aides sociales. Il faut choisir. Il en va de l’argent public en général comme d’une pièce de monnaie. On ne peut pas voir les deux faces en même temps mais l’une ne va pas sans l’autre.

Changer d’échelle

C’est cette leçon élémentaire d’économie qu’a gentiment distillée mardi le chef de l’Etat en indiquant à la fin de son discours que la contrepartie d’un contre-choc fiscal serait nécessairement une baisse plus forte de la dépense publique. C’est une bonne nouvelle pour la compétitivité de l’économie, donc pour la création d’emplois et les gains de pouvoir d’achat.

A condition que le gouvernement change enfin d’échelle dans ce domaine. Non pas qu’Emmanuel Macron en fasse moins que ses prédécesseurs. A raison de 0 % en volume cette année et de 0,6 % l’an prochain, la dépense publique progresse bien moins que sous les trois quinquennats précédents. Mais pas suffisamment pour atteindre l’objectif affiché qui est de la ramener à 51 % du PIB à la fin du mandat.

Inculture économique générale

Surtout, l’exécutif n’ayant pas assez mis à profit la reprise de 2017, le doute grandit sur sa capacité à réformer en profondeur la sphère publique maintenant que la croissance mollit.

Dans les administrations centrales, quelques regroupements se font à bas bruit, de peur d’effrayer l’opinion. Mais personne ne voit de méthode, encore moins de discours de la méthode. Pour baisser vraiment les dépenses afin de baisser enfin les impôts, il faudra à Emmanuel Macron, à ce degré d’impopularité, un courage hors du commun. L’inculture économique générale ne l’aide guère. 


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