Science décalée : pouvons-nous avoir confiance en ce que nous voyons ?
Êtes-vous de ces incrédules qui ne croient que ce qu’ils voient ? Alors, peut-être allez-vous devoir justement, revoir votre position. Car des chercheurs l’affirment : ce que nous ne voyons pas existe parfois. Pire encore : ce que nous voyons n’existe pas toujours !
Kezako : peut-on vraiment faire confiance à nos yeux ? L’œil humain peut différencier près de huit millions de nuances de couleurs. Pourtant, cet organe si avancé ne donne que peu d’informations à notre cortex pour créer une image. Alors que se passe-t-il exactement lorsque nous voyons ? Unisciel et l’université de Lille 1 nous expliquent, avec le programme Kézako, le fonctionnement de ce surprenant organe.
« Ce n’est pas une mauvaise chose que de vouloir remettre un peu en question la réalité telle que nous la percevons », assure Susana Martinez-Conde, professeure à l’université d’État de New York. Ce que nous voyons pourrait bien, en effet, ne pas être le reflet direct du monde qui nous entoure. Cette grande spécialiste des illusions nous encourage donc à regarder les choses d’un œil toujours critique.
Ainsi la photo ci-dessous nous apprend-elle qu’il ne faut pas toujours croire que ce que nous ne voyons pas n’existe pas. Pour en faire l’expérience, fixez donc cette image pendant quelques secondes. Évitez de détourner votre regard. Et même de cligner des yeux. Petit à petit, vous verrez cette image disparaître de votre écran.
Remettre en cause la réalité telle que nous la percevons
Un tour de passe-passe informatique ? Non. Une simple illusion d’optique connue sous le nom d’effet Troxler, en hommage au physicien suisse Ignaz Paul Vital Troxler qui l’a découverte en 1804. Si cette photo a tendance à disparaître ainsi, c’est qu’au bout de quelques secondes, notre cerveau cesse d’y prêter attention. Il ne la voit tout simplement plus. Dans la vie de tous les jours, cela n’arrive heureusement pas – sauf peut-être dans certains couples. Car nous ne sommes pas entourés d’images fixes, floues et aux couleurs insipides.
Dans la vie de tous les jours, nous échappons à cette adaptation neurale, car notre environnement et nos yeux sont en perpétuel mouvement. D’autant qu’au moment où cette image que l’on fixe commence à disparaître, nous avons tendance à bouger nos yeux pour vérifier qu’elle est en fait… toujours là.
Voir ce que nous ressentons
Les illusions d’optique, ce n’est pas nouveau, me renverront peut-être certains. C’est vrai. Alors, intéressons-nous maintenant à une étude menée par des chercheurs américains. Une étude qui conclut que nous sommes ce que l’on peut appeler, des percepteurs actifs. Ainsi les images que nous percevons du monde seraient déformées par notre expérience et notre état émotionnel. De quoi confirmer le vieil adage : « L’amour rend aveugle » ?
Dans leurs expériences, les chercheurs américains ont soumis les participants à une série d’images. À leur œil dominant, il était présenté des photos de visages neutres. À leur autre œil, des photos de visages souriants, renfrognés ou neutres. Notez que, dans l’expérience, les images montrées à l’œil non dominant ne peuvent pas être perçues consciemment.
Résultat : les participants qui avaient été soumis de manière inconsciente à des images de visages heureux ont eu tendance à voir des sourires – qui n’existaient pas – sur les visages neutres qu’ils avaient vus, de manière bien consciente cette fois. Une confirmation intéressante du fait qu’un stimulus positif peut avoir une influence sur notre perception de la réalité.
Les applications de cette découverte pourraient être nombreuses et certaines font froid dans le dos. Ainsi que penser de l’objectivité d’un jury qui doit évaluer la sincérité d’un accusé si quelques images inconscientes peuvent influer sur la décision ?
Ce qu’il faut retenir
- Notre cerveau est capable de cesser de prêter attention à une image. Elle disparaît alors littéralement de notre vue.
- Notre cerveau est aussi capable de s’attacher tant à une image qu’il lui invente des caractères qui n’y figurent pas.
- Nous nous ferions ainsi du monde une représentation mentale influencée notamment par notre état émotionnel.
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